L'automne, les champignons foisonnent dans les forêts du Québec et dans les marchés: une mine d'or pour les amoureux du terroir qui ont ainsi accès, pour un court moment, à un large spectre de saveurs et de textures.

«C'est beau, hein? Moi, ça me fait buzzer», lance le chef Jonathan Lapierre en humant les caisses de pieds-de-mouton et de champignons homards fraîchement arrivées de Gaspésie. Ces trouvailles seront mises à l'ardoise du Restaurant de l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec (ITHQ) le soir même. «Ce qui me branche, c'est le côté saisonnier et local des aliments, déclare l'amateur de mycologie. Les champignons, c'est éphémère, c'est maintenant que ça se passe. Après? Je passe à autre chose!»

Lactaires, chanterelles, russules, bolets... En cette saison, les espèces recherchées en cuisine abondent au Québec. «C'est une variété de saveurs, c'est plein d'umami [la cinquième saveur]. Ça donne un boost incroyable à n'importe quel plat», explique l'ancien chef du Laloux en s'affairant aux fourneaux.

Il y a bien sûr des classiques, comme le poulet aux morilles («magique!»), les pâtes aux girolles et aux lardons coiffées d'un oeuf cru («un délice!») ou les matsutake servis en bouillon ou dans des plats asiatiques, énumère-t-il. Mais les champignons diffèrent tellement en saveurs et en textures qu'il est difficile de tracer de grandes lignes en fait d'associations. Voici en revanche quelques conseils pour en tirer le meilleur.

Conservation

Comme ils se développent rapidement, les champignons ont tendance à se défraîchir plus vite que les légumes. Quand ils sont fraîchement coupés, ils se conservent toutefois quelques jours au frigo et jusqu'à deux semaines, dans certains cas. On les dépose dans un sac en papier ou dans un panier recouvert d'un linge propre et humide pour que l'air circule. Jamais dans un sac plastique, car l'humidité les fera pourrir.

Déshydratation

Certains champignons gagnent en saveur après avoir été séchés: la girolle développe des arômes floraux et abricotés ; le bolet, un goût de chocolat ou de café... À moins d'avoir la patience de les étendre sur une grille placée devant un ventilateur pour les sécher, le déshydrateur est conseillé. On ne veut pas cuire la chair. Réhydratés, les champignons restent un peu coriaces. On les réutilise alors braisés ou en sauce. «Évitez de les réhydrater dans trop d'eau, conseille le chef de l'ITHQ, pour ne pas qu'ils perdent en saveur, et récupérez l'eau de trempage pour la sauce.»

Congélation

Certaines variétés de champignons, comme la majorité des chanterelles, s'en tirent mieux une fois congelées. Une rapide poêlée permet de les garder ensuite au congélateur, dans un sac plastique et sous vide pour ne pas qu'elles «cuisent» par le froid. Un truc: glissez le sac dans l'eau pour en retirer l'air.

Marinades

Une autre façon de conserver les champignons est de les immerger dans une marinade, une fois poêlés, refroidis et libérés de leur eau, idéalement le jour même après une cueillette. Conservez-les au réfrigérateur.

Les laver ou pas?

Certains diront que les rincer est un sacrilège. «Quand les champignons sont pleins de terre, moi, je les lave, répond pour sa part Lian Verhoef. Je trouve que la terre est plus désagréable sous la dent que le fait qu'ils prennent un peu d'eau.» Par ailleurs, ils peuvent contenir des bactéries en surface, précise Jean Després qui conseille le lavage à grande eau après une cueillette et un séchage avant la cuisson. «Parfois, c'est nécessaire, mais c'est la dernière option, estime Jonathan Lapierre. Autrement, on les brosse minutieusement en enlevant les taches et l'excédent de terre au couteau».

Cuisson

«Je pars les champignons dans l'huile à feu vif pour les saisir, comme pour une viande, ce qui permet d'éviter qu'ils ne dégorgent trop, puis je réduis la température de moitié à mi-cuisson », indique le chef de l'ITHQ. Évitez de mettre trop de champignons en même temps dans la poêle, conseille-t-il, ce qui aurait pour effet de faire baisser la température : les champignons vont alors bouillir plutôt que de cuire. « S'ils libèrent de l'eau, on ne touche plus à rien et on laisse le liquide de cuisson s'évaporer.»

Photo Marco Campanozzi, La Presse

Jonathan Lapierre, ex-chef du Laloux

Recette: Pieds-de-mouton aux boutons de marguerite

Une recette de Jonathan Lapierre

La plupart des champignons se mangent cuits, mais quelques-uns sont délicieux crus, comme le champignon homard, marié ici au côté terreux du pied-de-mouton dans un plat riche en saveurs. Servir en entrée avec un vin de Bourgogne ou en plat principal, accompagné d'une viande.

Pour 4 portions

Ingrédients

- Crème sure à la berce laineuse

- 100 ml de crème sure

- 5 ml de berce laineuse ou de fenugrec en poudre

- Pincée de sel

- Salade de champignons

- 100 g de champignons homards (Hypomyces lactifluorum) marinés en morceaux

- 200 g de champignons pieds-de-mouton poêlés

- 4 radis coupés en tranches fines

- 20 boutons de marguerite ou câpres

- 20 feuilles de roquette

- 15 ml de vinaigre de cidre

Vinaigrette

- 25 ml d'huile de tournesol

- 10 ml de vinaigre de cidre

- 30 ml de ciboulette ciselée

- Pincée de sel

Marinade

- 1/3 de tasse de vinaigre de cidre

- 1/3 de tasse d'eau

- 1/3 de tasse de sucre

Préparation

1. Cuire les champignons homards dans la marinade pendant 2 à 3 minutes. Égoutter.

2. Saisir les pieds-de-mouton 2 minutes à feu vif dans une huile végétale (ici, de tournesol), réduire le feu et prolonger la cuisson pendant encore 2 ou 3 minutes, jusqu'à ce que les champignons soient poêlés. Déglacer la poêle avec 15 ml de vinaigre de cidre.

3. Mélanger les radis, les boutons de marguerite, la ciboulette et les champignons marinés avec la vinaigrette.

4. Pour la présentation, déposer le mélange de crème sure dans l'assiette et y superposer la salade, puis les pieds-de-mouton. Garnir de quelques feuilles de roquette et de boutons de marguerite.

De l'entrée au dessert

D'autres recettes à découvrir pour mettre les champignons au menu de l'entrée au dessert: 

- Panna cotta aux lactaires, de Lian Verhoef

- Vol-au-vent aux champignons, crabe et saumon, de Gourmet sauvage

Photo Marco Campanozzi, La Presse

Un plat préparé avec des champignons sauvages