Tout le monde aime la fondue. Mais tout le monde ne s'entend pas sur la façon de préparer la meilleure fondue au fromage. Les Suisses ont leurs versions... que les Québécois semblent avoir modifiées à leurs goûts.

Dans quelques jours, le Club suisse de Québec se réunira. «On va aller jouer au curling et ensuite, on se retrouve pour une fondue, dit Marina Belzile, consule honoraire de Suisse à Québec. Chacun amène son caquelon et son mélange magique. On va goûter à différentes fondues pour voir laquelle est la meilleure: il y a certains qui ont l'ego assez gros, c'est comme une compétition!»

Des fondues au fromage, il y en a presque autant qu'il y a de Suisses! Cofondateur de l'entreprise SOS Fondue, Gérald Goulay a ramené au Québec la recette que faisait sa tante dans son restaurant, une fondue aux herbes et aux épices, qu'il affectionne particulièrement. Pour Olivier Schlegel, propriétaire du restaurant montréalais Le Léman, la meilleure fondue est celle composée à 100 % de fromage Maréchal. «Mais ce serait peut-être trop cher à vendre», réfléchit-il à voix haute.

La fondue est aux Suisses ce que le pâté chinois est aux Québécois: un plat convivial et simple, que tout le monde interprète un peu à sa façon. Les Helvètes ont beau avoir la réputation d'être droits, ils ne sont pas pour autant dogmatiques. «Les Valaisans vont la faire avec du gruyère et vont mettre du concentré de tomate, pour faire la fondue aux tomates. En montagne, l'automne, on va ajouter des bolets, qu'on fera sauter avec des échalotes. C'est drôlement bon», s'enthousiasme Olivier Schlegel.

En Suisse, la fondue est un plat de tous les jours, qui n'a rien de guindé. «Ce que je remarque ici, c'est que les gens en mangent à Noël. En Suisse, les gens nous trouveraient cheap de manger de la fondue aux Fêtes. On en mange vraiment souvent: c'est LE repas, avec la raclette», dit Gérald Goulay, qui est au Québec depuis un peu plus de cinq ans.

Pour Olivier Schlegel, la fondue au fromage évoque l'enfance, passée dans le canton de Vaud.

«Mon grand-père était fromager et vigneron. Je suis tombé dans le vin et la fondue quand j'étais bébé! C'était un plat familial et convivial, qu'on mangeait debout autour du fourneau à bois.»

On pourrait dire de la fondue suisse qu'elle est née de conditions gagnantes. «C'est surtout typique de la Suisse romande, dit Marina Belzile. On associe la fondue avec des régions montagneuses comme le Valais, le canton de Vaud, qui sont aussi des régions productrices de fromages d'alpages, un peu relevés, qui sont aussi des régions où l'on produit du vin. Il faut que tout concorde: les montagnes, le climat rugueux, on se retrouve le soir et on mange quelque chose de chaud, c'est convivial.»

En Suisse, la fondue est servie sans artifice, explique Gérald Goulay. «Chez nous, on est beaucoup dans le classique: on la mange avec du pain et un peu de poivre dans l'assiette. Au Québec, les gens mettent du brocoli, du chou-fleur, des viandes, y en a même qui parlent de raisins. J'ai tout entendu», dit-il, tout en reconnaissant qu'il se «surprend» à mettre aussi du brocoli dans la sienne...

Au restaurant Le Léman, les clients cherchent parfois à accompagner leur fondue au fromage de viande, de cornichons. «Le client, il est chez lui, on fait ce qu'il veut», dit Olivier Schlegel, qui affirme que ses clients viennent d'abord et avant tout pour l'expérience typiquement suisse. Chose certaine, il vous dira que l'expérience s'accompagne bien de vin blanc. Suisse, bien entendu.

Photo Olivier Jean, La Presse

Olivier Schlegel, propriétaire du restaurant Le Léman.