C'est un plat presque légendaire, qui orne les tables depuis les premiers temps de la Nouvelle-France et qui est toujours aussi envoûtant. Un plat parfait pour les Fêtes. Surtout quand il est préparé par l'équipe du Pied de Cochon.

Un plat costaud, chaleureux et festif

Beaucoup de viande. Des pommes de terre. Une cuisson lente. Le cipaille représentait pour nos arrière-grands-parents un véritable plat de résistance permettant d'affronter le froid et les longues journées de labeur à l'extérieur. Aujourd'hui, on ne le mange plus pour survivre, on le savoure pour le plaisir. Et c'est dans cet esprit que l'équipe d'Au Pied de cochon l'a ajouté au menu de sa cabane à sucre.

«Avant, je n'avais pas vraiment d'affinités avec ce plat, déclare d'emblée Vincent Dion-Lavallée, chef de cuisine à la Cabane à sucre Au Pied de cochon. Ça ne m'appelait pas.»

Debout derrière le comptoir de sa cabane des Basses-Laurentides, vêtu de sa chemise noire à carreaux et une tuque de laine sur la tête, il explique avoir développé un intérêt pour ce plat «sur le tard», contrairement à bien des Québécois qui sont tombés dans le creuset à cipaille quand ils étaient petits. Il avait bien sûr fait connaissance dans son enfance avec la tourtière du Lac-Saint-Jean, mais le cipaille ne s'était jamais retrouvé dans son assiette.

C'est l'an dernier que l'idée de déposer sur la table des clients de la cabane un fumant cipaille-cipâtes-six pâtes a germé dans son esprit. Faute de temps, il n'a finalement pas enfourné ce mets typique, mais il se reprend pour le temps des Fêtes de 2016. On le retrouve donc sur le menu de Noël de la Cabane à sucre, qui ouvre ses portes aux groupes en décembre, sur réservation, les vendredis et samedis.

Mais comment expliquer cette soudaine envie pour le cipaille? «J'aime l'idée d'avoir un plat mijoté, dit-il. Tout le monde aime les poêlés, mais plus tu vieillis, plus tu apprécies les plats mijotés», mentionne le chef âgé d'à peine 29 ans. Et Martin Picard a évidemment approuvé cette idée de préparer cette nouveauté à la cabane. «Martin, c'est un gars de sauces et de plats mijotés.»

Revoir ses classiques

Avant de se lancer dans ce mets composé de gros morceaux de viande et de pommes de terre que l'on dépose sur une abaisse, Vincent Dion-Lavallée a fait ses devoirs. Il a dépoussiéré les livres de recettes de Jehane Benoit et de Monique Chevrier, deux grandes dames de la cuisine québécoise. «Je voulais voir quelles étaient les viandes utilisées et les sortes de pâtes. On aime ça quand ça reste classique, mais avec une twist Pied de Cochon.»

Pour s'approprier le plat, l'équipe de Vincent et de Martin a décidé d'y ajouter un os à moelle que l'on installe, à la verticale, au centre du creuset. On fait de même avec les cuisses de poulet de Cornouailles et les cuisses de canard.

L'agneau, le cerf, le lièvre, le jarret d'agneau, le lard salé, les saucisses - qui font office de viande hachée - de même que les pommes de terre sont coupés en gros morceaux. 

«Si on prend juste des viandes maigres, il n'y aura pas de moelleux. Ça va être sec. C'est pour ça que l'on garde tous les os.»

Autre spécificité: Vincent Dion-Lavallée, qui a fait quelques tests avant d'élaborer une version définitive, a décidé - contrairement à la recette classique de nos grands-mères - de ne pas faire plusieurs étages de pâte, considérant que son cipaille était bien assez costaud comme ça. Il place donc une abaisse au fond du plat de cuisson qu'il fait remonter sur les rebords. Avant de l'enfourner, il recouvre la préparation d'une seconde pâte en prenant soin de faire une incision pour la moelle et les cuisses.

Évidemment, le cipaille peut être cuisiné avec des viandes plus accessibles comme le porc, le boeuf et le poulet. Mais on sent quand même que celui qui travaille depuis sept ans au Pied de cochon a un penchant pour la viande de bois. «Trouvez-vous un ami chasseur!», a-t-il envie de dire aux gens.

Mais la viande achetée chez votre boucher ou au supermarché peut quand même faire l'affaire, car c'est la cuisson lente qui fait l'essentiel du travail. Comptez au moins six heures de cuisson. Autre astuce: on arrose la pâte de bouillon toutes les 30 minutes.

À la sortie du four de la Cabane, le résultat est plus que satisfaisant. La croûte est bien dorée, et le plat porte bien les marques de cuisson, ce qui ajoute à la beauté du résultat. «On ne lave pas les creusets [quand ils sortent du four], c'est une politique», lance fièrement Vincent Dion-Lavallée en tenant fermement le cipaille encore chaud.

Dès qu'il a été posé sur la table de bois, le plat a attiré Martin Picard, qui était dans les environs. Visiblement satisfait, il a lancé en boutade: «Si on voulait se sortir de notre image de viandeux, c'est raté!»