Originaire du nord-est de l'Amérique, le topinambour est connu aux quatre coins de l'Europe, où il a beaucoup été cultivé, et même dans le reste du monde. Étrangement, les Québécois cuisinent encore bien peu ce tubercule.

Robert Desmarais ne connaissait presque rien du topinambour avant qu'un agriculteur ne lui en échange contre une caisse d'oignons, il y a une dizaine d'années.

«Je cherchais une culture, j'ai commencé avec le topinambour par hasard.» Aujourd'hui, il en cultive une cinquantaine d'acres, ce qui en fait l'un des plus importants producteurs de ce légume au Québec.

C'est environ à la même époque que Lorraine Nadon, propriétaire des Jardins de Stéphanie, a commencé à en faire pousser à Saint-Lin-Laurentides. «Un monsieur m'avait amené ça dans une conférence horticole que je donnais. Il m'avait expliqué qu'on devait le semer à l'automne, alors j'en ai mis dans mon champ.»

Il n'est pas exagéré de dire du topinambour qu'il pousse comme de la mauvaise herbe. Il s'accommode d'une terre sablonneuse, doit être arraché chaque année si on ne veut pas qu'il s'étende, et ne requiert presque pas d'engrais. Le froid? Non seulement il ne le redoute pas, mais il faut l'y soumettre si on veut le meilleur tubercule possible.

«Il faut que le sol ait gelé avant de récolter le topinambour. C'est là que le sucre va se concentrer», explique Lorraine Nadon.

«Des fois, on a l'impression que les topinambours poussent l'hiver», abonde Robert Desmarais qui, au début de novembre, récoltait encore le tubercule dans sa ferme d'Acton Vale, en Montérégie.

Le grand oublié

Le tubercule a beau être adapté à notre nordicité, il reste dans l'ombre. «C'est dommage que le topinambour ne soit pas connu davantage. Je suis productrice, pas chef, mais j'essaie de donner des recettes aux gens pour qu'ils le préparent», dit l'agricultrice Lorraine Nadon. C'est cru qu'elle préfère manger le tubercule, qu'elle apprête avec une rémoulade.

Robert Desmarais les préfère poêlés dans l'huile ou le beurre, coupés en tranches d'environ un centimètre d'épaisseur. «Les topinambours deviennent dorés, ça donne un bon goût caramélisé. C'est là que les saveurs sont intéressantes», dit-il.

Des saveurs qui, pendant la Deuxième Guerre mondiale, étaient devenues bien accessoires. Comme il n'a pas été réquisitionné par les Allemands, le topinambour a été abondamment consommé dans les foyers européens, à tel point que bien des familles l'ont pris en aversion et l'ont tranquillement oublié. Le petit tubercule a beau avoir fait la guerre, il retrouve aujourd'hui ses lettres de noblesse, des deux côtés de l'Atlantique.

Préparer un topinambour

Doit-on le peler?

Quiconque a déjà essayé de peler un topinambour sait que l'exercice devient rapidement frustrant. L'automne, le topinambour qui vient d'être récolté n'a pas besoin d'être pelé. «On n'a qu'à le brosser, dit Lorraine Nadon. La pelure est encore assez tendre pour être mangée.» Après les Fêtes, toutefois, l'agricultrice commence généralement à l'éplucher, parce que la pelure a bruni. «Ça se mange pareil et c'est quand même bon, mais c'est moins beau», dit-elle.

Comment le conserver?

Vous pouvez oublier le topinambour pendant des mois dans le réfrigérateur sans qu'il s'en ressente. Seulement, il faut savoir qu'il n'aime pas l'air libre. Il s'oxyde facilement. Le producteur Robert Desmarais conseille de le garder dans un sac en plastique dans le tiroir à légumes. «Deux mois plus tard, c'est encore super.»

Il paraît que...

Votre collègue vous a raconté la fois où, après qu'il eut mangé trop de topinambours, ses intestins se sont révoltés? Il n'est pas hypocondriaque. «Le topinambour est riche en inuline et il agit sur la flore intestinale», explique Robert Desmarais qui, en plus de le cultiver et de le vendre tel quel, le transforme également en poudre qu'il commercialise sous la marque Inuliflora.

À LA FRANÇAISE...

Topinambours glacés au thym et citron

Une recette de Pascal Turgeon, chef du restaurant Tandem

Depuis près de cinq ans, Pascal Turgeon officie dans les cuisines du Tandem, dont il est aussi copropriétaire avec sa conjointe. Dans le petit restaurant du quartier Villeray, il cuisine le tubercule presque toute l'année. «On le fait en chips, en velouté, en accompagnement. Les gens sont réceptifs, même si c'est un légume peu connu, qu'ils ne cuisinent pas beaucoup», dit-il.

Préparation: 20 minutes

Cuisson: 10 minutes

Portions: 4 à 6 en accompagnement

Ingrédients

375 g de topinambours bios du Québec

1/2 oignon jaune

Une feuille de Laurier

Deux branches de thym

1/2 citron frais

Six noix de beurre

200 ml d'eau froide

80 ml de vin blanc (facultatif)

Deux gousses d'ail

50 ml d'huile d'olive

Sel et poivre au goût

Préparation

Brosser à l'eau froide les topinambours, les égoutter et les tailler en quartiers.

Peler et ciseler l'oignon jaune.

Tailler en deux les gousses d'ail.

Dans un grand poêlon, faire mousser le beurre et l'huile d'olive.

Faire suer les oignons sans les colorer pendant environ une minute, en remuant.

Ajouter les topinambours et le reste des ingrédients.

Porter à ébullition.

Couvrir et laisser mijoter cinq minutes à feu doux.

Retourner les topinambours.

Couvrir et laisser cuire deux minutes (jusqu'à tendreté).

Augmenter la chaleur pour faire réduire le jus de cuisson

En arroser les topinambours à la cuillère.

Servir.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Topinambours glacés au thym et citron

À LA TURQUE...

Topinambours braisés dans le jus d'orange

Une recette de Fisun Ercan, chef des restaurants Su et Barbounya

«Un des sauveurs de l'hiver.» Voilà comment Fisun Ercan qualifie le topinambour, qu'elle sert pendant la période hivernale chez Su, son joli restaurant de Verdun. Elle nous l'a préparé à la façon traditionnelle turque, poché dans l'huile d'olive avec des pommes de terres rattes, des carottes de couleur et du pamplemousse. «Ce n'est pas un accompagnement, c'est un plat principal. Avec moi, les légumes sont les stars», dit la chef, tout en précisant que le légume accompagnera bien un plat de poisson, une viande ou tout simplement du riz. Avec un bon pain pour tremper dans le jus, c'est un pur délice.

Préparation et temps de repos: 45 minutes

Cuisson: 15 minutes

Portions: 4 à 5

Ingrédients

250 g de topinambours épluchés et coupés en quarts ou demis selon la grosseur

6 petites carottes de couleur, coupées en quart ou demi selon la grosseur

6 pommes de terre rattes, épluchés et coupées en quarts ou demis selon la grosseur

1 petit oignon rouge, épluché et émincé

4 gousses d'ail, épluchées

2 tiges d'estragon

11/2 c. à table de vinaigre de vin blanc

1/2 tasse de jus d'orange

2 c. à thé de jus de citron

1/2 tasse d'huile d'olive

Segments d'un pamplemousse rose, d'orange ou de lime, au goût

1/2 c. à thé de sel de mer

Préparation

Préparer une sauteuse profonde d'environ 10 cm et munie d'un couvercle.

Mettre l'huile dans la sauteuse et faire revenir l'oignon et les gousses d'ail pendant une minute à feu moyen.

Ajouter le vinaigre de vin blanc, le jus d'orange et de citron, les pommes de terre et les carottes.

Cuire de quatre à cinq minutes et ajouter les topinambours, le sel et l'estragon.

Couvrir et cuire de 8 à 10 minutes.

Vérifier la cuisson des légumes: le topinambour doit être tendre mais pas trop cuit pour que les morceaux restent intacts.

Enlever la sauteuse du feu et laisser reposer une demi-heure avec le couvercle fermé.

Servir à la température ambiante.

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Topinambours braisés dans le jus d'orange