Avec le bouillonnement que connaît la scène de la boulangerie artisanale à Montréal ces dernières années, l'ouverture d'un nouveau pétrin n'est plus un «événement» en soi. N'empêche qu'il convient de souligner l'arrivée des petits nouveaux qui se démarquent par la qualité de leur travail. Surtout quand ils ne s'installent pas (encore!) sur le Plateau Mont-Royal ou dans le Mile End, mais dans un quartier où les bonnes baguettes ne s'enfournent pas à tous les coins de rue.

Le plus récent coup de coeur, c'est donc Éric Blidi qui en est responsable. Son nom ne vous dit sans doute rien, mais si vous fréquentez De froment et de sève, cette institution de la rue Beaubien, dans l'arrondissement de Rosemont-La Petite-Patrie, vous avez certainement déjà goûté à son talent: c'est lui qui en était le chef boulanger depuis plusieurs années. Jusqu'à ce que le Français décide de voler de ses propres ailes et d'ouvrir La grange du boulanger, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, un choix qu'il n'a pas fait au hasard: «Quand j'ai emménagé au Québec, mon premier appartement était à cinq minutes à pied. J'ai toujours adoré le côté populaire du quartier, et j'ai bien suivi son évolution depuis 10 ans: il a un immense potentiel!»

Il y travaille avec soin. Les viennoiseries goûtent bon le beurre frais et on a aimé retrouver les fameux croissants au beurre d'érable véritable qui ont tant d'adeptes chez De froment et de sève.

Côté pain, Éric Blidi passe le test de la baguette haut la main. Sa version au levain est excellente: l'acidité du ferment est juste assez perceptible, la mie bien alvéolée et la croûte très craquante. «Je voulais attendre quelques semaines avant de me lancer dans le levain, explique-t-il, mais j'avais déjà des tas de demandes des clients.» On les remercie. La miche de kamut est aussi fort réussie, avec une mie bien grasse et un goût délicat (on aurait quand même préféré un peu plus de légèreté et une croûte un peu plus croustillante). Le pain aux noisettes, miel et levain marque un sans-faute: encore cette belle mie humide, délicatement sucrée. Un vrai péché pour les tartines du petit-déjeuner, avec un peu de beurre et de miel.

Autre valeur sûre: le viennois, une brioche longue à croûte souple et dorée. Nature, elle fait de très bons sandwichs au saumon fumé; la version aux pépites de chocolat fait un très bon compagnon du verre de lait à l'heure de la collation. Pour le reste, la carte est assez classique, mais Éric Blidi compte l'allonger sous peu, notamment en travaillant davantage avec les produits de l'érable. À suivre.

«Alors qu'en France, on est en train de perdre le côté artisanal de la boulangerie au profit de points chauds où l'on ne fait que réchauffer ou terminer la cuisson de pains produits ailleurs, ici, on se tourne de plus en plus vers la boulangerie artisanale, note-t-il. C'est l'effet inverse, elle est remise au goût du jour, et c'est très stimulant.»

Quelques plats salés sont aussi proposés (quiches, pizzas) ainsi que quelques desserts: les tartes sont faites par le boulanger (mention très bien pour la tarte amandine), mais les gâteaux sont l'oeuvre de deux jeunes pâtissières qui viennent de se lancer en affaires et que M. Blidi accueille temporairement dans ses locaux. Quelques tables permettent de casser la croûte sur place.

La grange du boulanger

3227, rue Ontario Est, 514 522-2424

facebook.com/lagrangeduboulanger