Détecter soi-même en quelques minutes si un plat est halal ou pas, si un autre contient des allergènes alimentaires ou non, voilà les services que la jeune start-up francilienne Capital Biotech entend développer pour répondre aux inquiétudes des consommateurs.

Lancée il a quinze jours, sa gamme de «tests halal» (autorisé par la religion musulmane), qui proposent de repérer si un plat contient de la viande de porc par la présence d'albumine porcine sérique, ou si une boisson est alcoolisée, a déjà enregistré «près de 100 000 euros de commandes, une surprise», assure Jean-François Julien, 27 ans, cofondateur de cette société basée à Asnières, créée l'an dernier. Pays du Golfe, Turquie, Chili ou Indonésie, les demandes sont arrivées du monde entier.

Le test individuel, à usage unique, est commercialisé exclusivement sur internet au prix de 6,90 euros. Pour l'utiliser, il faut plonger une bandelette dans un tube contenant l'aliment à tester mélangé à de l'eau chaude. Le résultat tombe en moins de dix minutes.

Les inventeurs reconnaissent que ce test ne permet pas de vérifier complètement le caractère halal d'un produit, ce qui supposerait de connaître la méthode d'abattage de l'animal, mais assurent qu'il permet déjà aux musulmans pratiquants d'écarter les aliments interdits par l'islam.

«Cela permet de lever un doute ponctuel, par exemple en vacances ou quand une nouvelle marque halal arrive sur le marché», explique Jean-François Julien.

Malmenés eux aussi par les scandales alimentaires, dont celui, en 2011, de saucisses halal Herta contenant du porc, les 5 millions de musulmans de France demandent à être rassurés sur ce qu'ils consomment, observe Abbas Bendali, directeur du cabinet de conseil en marketing Solis.

À terme, Capital Biotech vise une clientèle composée à 70% de professionnels, et espère devenir «l'un des champions européens des tests rapides».

«Pas le rôle du consommateur»

«Les tests rapides, par exemple d'alcoolémie ou de grossesse, font foi et sont moins chers que des tests en laboratoire», souligne Jean-François Julien, qui assure ne pas avoir de concurrent direct en Europe.

Après le scandale de la viande de cheval l'an dernier, le groupe Eurofins, numéro un mondial de la bioanalyse, a dû faire face à une avalanche de demandes d'analyses de produits carnés. Le groupe nantais ne réalise cependant pas de tests rapides.

Interrogé sur leur fiabilité, Fayçal Bennatif, directeur marketing d'Eurofins, se dit «dubitatif». «Nous travaillons sur du séquençage ADN en laboratoire, ce n'est pas du tout la même méthode», explique-t-il, tout en estimant que ce n'est «pas le rôle du consommateur» de réaliser des tests de qualité sur les produits qu'il achète.

Pour être commercialisés, les «tests halal» n'ont pas besoin d'autorisation de mise sur le marché. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) assure cependant qu'elle va «évaluer leur fiabilité».

En France, le marché des produits halal s'élève à 5,5 milliards d'euros. Pour Abbas Bendali de Solis, le prix d'un test constitue néanmoins «un frein évident à l'achat en période de crise». «Il est difficile d'investir sept euros pour tester une barquette de raviolis à trois euros», note-t-il. Pour lui, les musulmans «se rassurent davantage avec une vraie certification halal», agréée par les autorités religieuses musulmanes.

Le «halal test» n'est qu'une première étape pour Capital Biotech, qui annonce le lancement imminent de plusieurs tests destinés à mesurer la présence d'oeuf, de soja ou d'amandes, trois allergènes alimentaires, dans des plats cuisinés. Suivront ensuite les tests de gluten, d'arachides ou encore de lait de vache. À terme, la PME table sur des ventes en pharmacie.

Pour l'allergologue Jocelyne Just, chef de service à l'hôpital Trousseau à Paris, ces tests sont certes «une première», mais restent à manier avec précaution «dans la mesure où un patient peut être allergique à une forme d'aliment et pas à une autre, par exemple au lait cru et pas au lait cuit».

Quant au marché des «tests casher», Capital Biotech dit y avoir «déjà pensé» en achetant préventivement les noms de domaine.