Petite et allongée, peau lisse, couleur nuancée du vert au noir violacé, «l'olive de Nice» fait partie du patrimoine gustatif des Alpes-Maritimes et se protège des faussaires. Mais sur 403 moulins à olives recensés voici 150 ans, il n'en reste que 25.

«Elle est aussi bonne pour le sel en bocal, que pour son huile douce au goût d'amande et d'herbes vertes», décrit avec un accent chantant Jean-Luc Spinelli, au milieu des oliviers de son arrière-grand-père, sur les collines du village de Castagniers proche de Nice.

«À douze ans, j'étais déjà dans les oliviers. J'aime la nature, j'aime cet arbre», dit Jean-Luc, un passionné qui a repris récemment à plein temps «Le Moulin de Castagniers», exploitation familiale de trois hectares produisant 8 tonnes d'olives par an.

La cueillette vient de démarrer avec retard fin novembre chez les particuliers du littoral qui apportent fièrement à son moulin leurs olives de la variété «cailletier» pour les triturer et extraire quelques flacons d'huile d'olive (six kilos pour un litre). La récolte peut s'étaler jusqu'en mars en moyenne montagne.

À la fin du 19e siècle, le port de Nice était un haut lieu du négoce de l'huile d'olive «riviera» de renommée internationale, avec quelque 67 maisons de commerce en concurrence. Le renom des négociants était fondé sur leur capacité à mélanger les crus d'huiles de différents producteurs pour obtenir des saveurs spécifiques, explique dans un ouvrage Paul Raybaut, universitaire à Nice.

Quelque 25 000 tonnes annuelles d'huile étaient alors produites grâce à 20 000 hectares d'oliveraies.

Aujourd'hui, 241 tonnes d'huile sortent des moulins (campagne modeste de 2011/2012), on recense 4500 hectares d'oliveraies et 300.000 arbres entretenus sur une centaine de communes des Alpes-Maritimes.

Le déclin s'est accéléré après la seconde guerre mondiale pour de multiples raisons: la concurrence de l'huile de graines, la culture de l'oeillet de Nice, l'expansion urbaine et l'exode rural, mais aussi quelques gels catastrophiques dans les zones semi-montagneuses.

Un cahier des charges très strict

Mais la véritable «olive de Nice» est une denrée encore plus rare, explique Sylvie Dupuy, qui anime le syndicat interprofessionnel de l'olive de Nice et veille sur la distinction européenne «AOP» (appellation d'origine protégée).

Seulement 30 000 oliviers «cailletier» entretenus par 113 oléiculteurs des Alpes-Maritimes obtiennent le précieux AOP «huile d'olive de Nice» (22 tonnes en 2011/2012) et l'AOP «olive de Nice» pour les olives de table (17 tonnes) et la pâte d'olive (2 tonnes).

Les producteurs acceptent de suivre un cahier des charges très strict, définissant l'excellence du produit.

«C'est une reconnaissance pour nous», souligne Jean-Luc Spinelli, en pleine installation d'immenses filets multicolores sous ses arbres pour recueillir ses olives durant l'hiver.

Après la cueillette sur les typiques «restanques» (terrasses pentues), viendra la taille plus fastidieuse afin de ne pas laisser les arbres pousser trop en hauteur.

Il devra aussi être adoubé chaque année par les goûteurs à l'aveugle qui veillent soigneusement à la qualité AOP.

Sylvie Dupuy est à l'affût sur les marchés, car sa mission consiste aussi à prévenir le service des fraudes si elle repère des usurpatrices, comme les «coquillos» espagnoles plus foncées et plus rondes.

Même une olive «cailletier» du département, non AOP, ne peut être étiquetée olive de Nice ou olive niçoise. Une grande surface de la région en a fait les frais récemment au tribunal.

Pour les connaisseurs comme Sylvie, l'olive de Nice, qui se confit longtemps dans le sel pour perdre son amertume, a un goût caractéristique très parfumé sans aucune acidité. Elle peut présenter «des arômes de fruits confits, de clafoutis, des odeurs de vieux vin et de cuir».

Tout comme la «pâte d'olive» -100% d'olives avec de l'huile- à ne pas confondre avec la très répandue tapenade mélangée à des câpres et des anchois...

Quant à l'huile «aux arômes d'amande» émanant du noyau d'olive, elle peut aussi présenter «des arômes d'artichaut cru, de fleurs de genêts, des notes citronnées ou de foin».

Une carte touristique des producteurs permet d'aller vérifier la provenance (www.olivedenice-aop.com).