Si votre dîner est encore constitué d'une soupe aux tomates Campbell et d'un sandwich au fromage fondu, alors vous avez probablement grandi à l'époque de la machine à écrire.

Le plus important producteur de soupes de la planète cherche maintenant à rejoindre les consommateurs qui ont délaissé sa soupe aux tomates ou sa soupe poulet et nouilles au profit de saveurs plus riches et plus exotiques.

Campbell Soup a lancé l'an dernier une vaste initiative qui a vu ses dirigeants visiter des villes allant de Portland, dans l'Oregon, à Londres, au Royaume-Uni, pour trouver comment formuler des soupes qui intéresseront des consommateurs plus jeunes et plus exigeants. L'entreprise vieille de 143 ans prévoit maintenant mettre en marché pas moins de 50 nouveaux produits au cours de la prochaine année, qu'il s'agisse d'une soupe au chorizo épicé ou d'une soupe au poulet de style marocain.

Les habitués de la soupe au poulet traditionnelle sursauteront peut-être en consultant la liste des ingrédients: des tomatillos, du lait de coco et des champignons shitake.

Les nouvelles soupes se distanceront aussi des substances gélatineuses issues des boîtes de conserve en métal qui ont fait de Campbell une marque aussi connue. Ces nouvelles soupes seront offertes dans des sachets de plastique faciles à ouvrir, que l'on peut réchauffer en moins de trois minutes au four à micro-ondes.

Ça pourrait être une question de vie ou de mort pour Campbell. La consommation mondiale de soupe en conserve est en recul de 13% depuis 10 ans, selon la firme Euromonitor International, maintenant que les soupes fraîches sont de plus en plus faciles à trouver dans les épiceries et les restaurants. Campbell détient désormais environ 53% du marché, comparativement à 67% il y a 10 ans.

Campbell devra obligatoirement trouver le moyen d'attirer l'attention des consommateurs de 18-30 ans, ceux qui sont les plus recherchés et les plus prisés par les entreprises et les publicitaires.

«J'ai grandi avec du sel, du poivre et du ketchup, a dit Chuck Vila, qui surveille les habitudes des consommateurs pour Campbell. Ces gens-là s'amusent avec des épices vraiment intéressantes qui proviennent de partout dans le monde.»

Les dirigeants et chefs de cuisine de Campbell sont donc partis à la rencontre de ces jeunes consommateurs pour déterminer ce qui les allume. À New York, par exemple, une douzaine de chefs ont visité les boutiques d'épices, les boulangeries et les épiceries ethniques. Au terme de cette visite, le chef de Campbell, Thomas Griffiths, a même envisagé de formuler une soupe avec du kimchee, les très odorants légumes marinés coréens.

Ces missions ont mené les dirigeants de Campbell à deux conclusions divergentes. Tout d'abord, les mets jadis considérés comme exotiques - qu'ils soient thaïlandais, brésiliens ou indiens - sont devenus la norme. Mais, en même temps, des années de repas pris à l'extérieur ont fait en sorte que les jeunes consommateurs sont moins habiles dans leur propre cuisine, surtout en ce qui concerne ces saveurs exotiques.

«Ils ne peuvent reproduire chez eux les mets qu'ils apprécient quand ils mangent à l'extérieur», a expliqué le directeur de l'innovation chez Campbell, Darren Serrao.

Cela a mené aux sachets de plastique Go de Campbell, qui offrent des variétés comme Cari au coco, Piment rouge crémeux et Lentilles dorées. Les consommateurs déchirent le sachet, le mettent sac au four à micro-ondes environ deux minutes et demie et versent la soupe dans un bol.

Campbell a aussi dû faire son deuil de la boîte de conserve si connue.

«Pour des millions de personnes, la conserve est un contenant parfait, a dit la directrice de l'emballage pour l'Amérique du Nord, Mary Gregg. Ils la connaissent depuis des années et ils sont à l'aise avec ça.»

Mais aux yeux des jeunes consommateurs, la boîte de conserve n'est pas synonyme de fraîcheur. Les sachets Go sont donc ornés de lettres colorées et de visages jeunes et heureux.

Campbell compte sur ces nouveaux produits pour lui donner un nouvel élan, puisque les soupes génèrent encore la moitié de ses revenus. Plus tôt cette semaine, les dirigeants de la compagnie ont anticipé une croissance de leurs ventes pendant l'exercice 2013 - quoique cette augmentation sera générée par une entreprise de jus récemment acquise, et non par ses soupes, ses bouillons et ses sauces.

Malgré tout, les ventes de soupes se sont améliorées pour la première fois en deux ans au dernier trimestre. Cette hausse est attribuée aux promotions offertes par des épiciers qui avaient fait des réserves avant que Campbell ne gonfle ses prix. De plus, au même moment l'an dernier, les ventes de soupes avaient fondu de 9%.

Les nouveaux produits devraient être sur les rayons d'ici à la fin de l'année. Chuck Vila a prévenu que les consommateurs sont prêts à donner une nouvelle chance à Campbell mais que la compagnie devra tenir ses promesses.