Il y a de l'action, beaucoup d'action dans les environs de la fromagerie La Station, à Compton. Pour la deuxième fois depuis son ouverture en 2004, on y mène des travaux d'agrandissement, et de très grande ampleur, cette fois: près de 3 millions de dollars sont investis dans l'aventure.

30 000 meules

La fromagerie familiale construit cet automne une annexe encore plus grande que les installations actuelles, portant de 9000 à 20 000 pi2 leur superficie totale. Le plan n'est pas tant d'augmenter la production globale - qui connaît tout de même une hausse de 10 à 15 % par année depuis sa création - que d'accroître la proportion de «grands crus» affinés de deux à trois ans avant d'être envoyés en boutique. «On a donc besoin de beaucoup, beaucoup plus d'espace pour l'entreposage», explique Simon-Pierre Bolduc, fromager en chef. À terme, 30 000 meules seront affinées simultanément, comparativement à 8000 à l'heure actuelle.

Grands crus

La fromagerie La Station compte deux «Grands crus», l'Alfred le fermier, vieilli 24 mois, et le Chemin Hatley, vendu après 12 mois, peu ou pas du tout distribués à Montréal. «On écoule déjà presque tout à la fromagerie», dit Simon-Pierre Bolduc. La demande est forte pour les deux fromages qui ont été maintes fois primés dans des concours québécois et canadiens. «Mais on se fait plaisir aussi: c'est le type de fromages que je préfère et je ne vois pas pourquoi on devrait se limiter à ceux qui sont faits en Europe, comme les vieux gruyères de grotte. Nous aussi, on peut en faire.» L'entreprise réoriente sa production au moment où de nouveaux accords de commerce ont été signés avec les États-Unis et l'Union européenne. «Cela nous inquiète un peu», confie M. Bolduc, surtout la perspective que les quotas des producteurs canadiens soient réduits s'il y a surabondance de lait sur le marché. « Mais on verra à l'usage comment ça se passe. On ne peut pas s'empêcher de continuer nos projets en attendant de voir.»

Robot

Des quelque 3 millions investis par la fromagerie, une partie servira à l'achat d'un automate qui s'occupera du brossage des meules à un rythme nettement supérieur à celui de l'humain: 600 brossages à l'heure comparativement à 600 par jour ! Mais peut-on encore parler d'une fromagerie «artisanale» dans ces conditions? «On a philosophé là-dessus plusieurs heures, plusieurs semaines, reconnaît Simon-Pierre Bolduc. Je me sens encore artisanal: le robot n'est pas capable d'évaluer les meules, s'il faut les brosser plus souvent, les retourner, etc. Tout ce travail sera encore fait par des humains, mais il faut comprendre que c'est lourd, une meule. C'est un travail difficile de soulever toute la journée des poids de 5 kg. Et avec la pénurie de main-d'oeuvre dans la région, ce n'est pas évident de trouver des gens qui veulent le faire.»

«C'est un peu comme pour la traite des vaches: on ne s'imaginerait plus aujourd'hui traire toutes nos vaches à la main. Les choses évoluent, mais il faut garder en tête qu'on est loin des grandes fermes industrielles», ajoute-t-il. D'autres fromageries artisanales, dont celle du Presbytère (le Louis d'Or), ont aussi adopté des robots pour le brossage des meules.

Fermiers

Chose certaine, les fromages de la Station restent «fermiers» et le resteront, c'est-à-dire qu'ils continueront à être produits exclusivement avec le lait de la ferme familiale. Le troupeau d'une centaine de vaches holsteins permet la transformation de 800 000 litres de lait en fromage par année en moyenne. L'élevage est certifié biologique. La fromagerie est exploitée par trois frères et leurs parents, qui s'occupent de la production du champ à la meule. Une quinzaine d'emplois ont été créés depuis 2004.

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https://fromagerielastation.com