Les Québécoises hésitent de moins en moins à accoucher sur le tard. Coup d'oeil sur une tendance de plus en plus présente dans le monde occidental.

Sur les traces de Nicole Kidman, de Nanette Workman et de l'ex-députée fédérale Lise Bourgault - Argenteuil-Papineau - les Québécoises de 40 ans et plus ont eu 33 % plus d'enfants en 2007 qu'en 2001. Elles ont accouché 597 fois en 2001, contre 795 fois en 2007, indique l'Institut de la statistique du Québec.

 

Le taux de fécondité des femmes de 40 ans et plus est passé de 9,1 à 14,9 durant la même période. Et le taux de naissances hors mariage chez les femmes de 40 ans et plus a bondi de 8,2 en 1976 à 46,9 en 2000. Ce sont les plus récents chiffres disponibles en la matière.

 

Cette tendance est vraisemblablement étendue à tout l'Occident. Aux États-Unis et en France, par exemple, le nombre d'accouchements des femmes de 40 à 44 ans a grimpé de 50 % depuis 1972. Près de 30 000 bébés sont nés en France d'une maman de 40 ans et plus, contre seulement 8000 il y a 20 ans. Mais cette augmentation des naissances après 40 ans ne fait que suivre le vieillissement général de la maternité. Au cours des 20 dernières années, l'âge moyen des Canadiennes à l'accouchement est passé de 27 ans à 29,3.

En 2006, le taux de fécondité des femmes canadiennes âgées de 30 à 34 ans a dépassé pour la première fois celui des femmes âgées de 25 à 29 ans. Ce taux a été plus élevé que celui des femmes âgées de 20 à 24 ans depuis 1989.

Pourtant, «si vous voulez tomber enceinte, n'attendez pas!» lance aux femmes l'une des grandes spécialistes mondiales de la fécondation in vitro, la Dre Joëlle Belaïsch-Allart, gynécologue accoucheuse. «Ce n'est pas parce qu'on a toujours ses règles que l'on est aussi fertile. Et les techniques de fécondation in vitro ne sont pas une baguette magique.

Plus de temps à perdre

Pour la Dre Belaïsch-Allart, «il faut que les femmes arrêtent d'attendre l'homme idéal, la maison idéale, le travail idéal avant de faire un enfant, car après il est trop tard!»

Les chances de concevoir un enfant en période de fécondité sont d'une sur quatre à 20 ans, d'une sur huit à 35 ans et de 1 sur 12 seulement après 40 ans! En gros, vous avez une chance par an de faire un bébé après 40 ans, et à partir de 45 ans, ces chances sont quasi-nulles, dit la Dre Belaïsch-Allart.

L'avis des spécialistes est clair : après 35 ans, il n'y a plus de temps à perdre. Les femmes qui veulent un enfant doivent consulter leur gynécologue. Non pas pour se faire prescrire tout de suite un traitement pour améliorer la fertilité, mais pour un check-up et pour être sûr que toutes les chances sont de leur côté. Car si elles se disent qu'elles vont laisser faire la nature, et qu'à 38, 39 ou 40 ans elles commencent à s'inquiéter, leurs chances ont déjà radicalement baissé.

Mais qu'à cela ne tienne! Les femmes passent au comptoir in vitro. À l'Université de la Californie du sud, par exemple, 77 femmes de 50 à 63 ans ont obtenu une transplantation d'ovules fécondés. En 1997, un couple y aurait déboursé 50 000 $ pour qu'Arceli Keh donne naissance à une petite fille à 63 ans. En 1993, une Britannique de 59 ans a accouché de jumeaux, avec l'aide du célèbre Dr Severino Antinori. L'année suivante, une autre patiente de ce dernier, une Italienne de 62 ans, donnait naissance à un garçon par césarienne.

Dans certaines cliniques des États-Unis, l'âge limite de fécondation in vitro a été fixé à 60 ans. Mais au Québec, la clinique Procréa a fixé ce maximum à 50 ans. «Les femmes ont le droit d'avoir un enfant, mais l'enfant a le droit d'avoir une mère en santé,», proclament ses dirigeants.

«Les obstétriciens ne devraient pas stresser»

Accoucher à 40 ans est dur pour la mère et pour le bébé aussi, dit le Dr Jean Ross, un as de l'accouchement à Québec. «Mais les obstétriciens ne devraient pas se stresser pour autant, fait-il valoir. Nous avons au CHUL (Centre hospitalier de l'Université Laval) des ressources de soutien incomparables.»

Le Dr Ross est un cas. Cet omnipraticien a passé sa carrière à faire de la médecine familiale et à accoucher ses patientes à toute heure du jour ou de la nuit. Il a assisté la naissance de 3000 bébés, c'est-à-dire une centaine par année, alors que la moyenne canadienne est de 40.

«Accoucher une femme de 40 ans est pour moi une expérience différente, dit-il, mais pas plus stressante.» Il a eu la chance de ne «perdre» aucune mère ni aucun bébé non plus, même si les risques sont alors beaucoup plus grands, reconnaît-il d'emblée.

«Les grossesses à 40 ans sont à risques élevés, c'est certain, explique-t-il. Problèmes de diabète, saignements plus fréquents, haute tension artérielle, accouchement prématuré.»

«Ce n'est pas pour rien, ajoute-t-il, que la mortalité périnatale est de 0,9 à 1,7 % plus élevée quand une femme accouche à 40 ans. La mère ou l'enfant meurt dans une proportion de 16 sur 1000, contre 8,5 sur 1000 pour les plus jeunes mamans.»

«Les femmes veulent faire un bout de carrière avant le premier bébé, observe-t-il. Tout est dans cette explication.»

Ironiquement, le Dr Ross n'a pas engendré d'enfant. Mais il en a adopté deux!