Le Québec donnera-t-il l'exemple? L'Agence de santé publique du Canada se penche à son tour sur la publicité de malbouffe adressée directement aux enfants.

«Pour l'instant, le Québec est la seule province où il y a une réglementation, rappelle Suzie Pellerin, directrice de la Coalition québécoise sur la problématique du poids. Ailleurs au monde, la Norvège et la Suède ont aussi réglementé la publicité destinée aux enfants.»

 

La situation pourrait changer: un peu partout au Canada, de nombreux groupes de santé publique pressent les gouvernements provinciaux de s'attaquer au dossier. Ottawa avoue s'intéresser aussi à la question.

«Nous procédons à l'examen des éléments scientifiques probants et nous considérons diverses options stratégiques pour réduire l'exposition des enfants canadiens à la commercialisation de boissons et d'aliments mauvais pour la santé», explique la porte-parole de l'Agence de santé publique fédérale.

Ce n'est qu'un premier pas, mais Suzie Pellerin se félicite déjà de voir Ottawa se pencher sur la question. «Les choses changent beaucoup, dit-elle. Avec l'épidémie d'obésité, les gens sont de plus en plus sensibles à ce problème.»

Au Québec, il est interdit d'adresser de la publicité directement aux enfants de moins de 13 ans. Quatre géants de l'alimentation, dont Saputo, ont d'ailleurs reconnu avoir enfreint la Loi sur la protection du consommateur cette année, à la suite de plaintes de la Coalition Poids.

Les enfants ne peuvent pas faire la différence entre du contenu publicitaire et du contenu informatif, soutient Brian Cook, chercheur à l'Agence de santé publique de Toronto, qui rêve d'une loi «à la québécoise».

«Les représentants de l'industrie prétendent que les enfants canadiens regardent la télévision américaine, explique-t-il. C'est vrai, mais ils regardent ces émissions sur des chaînes canadiennes qui sont relèvent de la compétence d'Ottawa.»

Le chercheur rappelle d'ailleurs que les fans de football du Canada n'ont pas accès aux fameuses publicités américaines pendant le Super Bowl. Si les multinationales peuvent bloquer leurs publicités durant une manifestation sportive, elles devraient être en mesure de le faire pendant les émissions pour enfants, dit-il.

«Les compagnies nous disent que le gouvernement n'a pas à décider de ce que mangent les enfants, que c'est aux parents de le faire, explique Brian Cook. Nous croyons que ces compagnies devraient justement laisser les parents faire leur job.»

Autoréglementation

Dans ce dossier, Ottawa ne ferme pas la porte à l'autoréglementation. «Nous examinons notamment l'efficacité de l'actuel système d'autoréglementation qui régit la publicité sur les aliments et les boissons destinée aux enfants au Canada», explique-t-on, à l'Agence.

Mais l'idée de laisser l'industrie gérer sa bonne conduite ne fait pas l'unanimité. «C'est très difficile d'obtenir des résultats positifs avec l'autoréglementation, dit Brian Cook, car l'industrie impose ses propres règles. Par exemple, les compagnies vont accepter de faire la promotion d'aliments sains, mais elles incluront leurs céréales sucrées dans la catégorie.»

Suzie Pellerin mentionne aussi qu'une nouvelle étude américaine conclut que l'autoréglementation n'est tout simplement pas efficace. Plusieurs géants de l'alimentation, dont McDonald's, Pepsi et General Mills, se sont engagés il y a deux ans à faire la promotion d'aliments et d'un mode de vie sains auprès des enfants de moins de 13 ans. Dans son étude, le groupe Children Now calcule néanmoins que, dans les médias américains, plus de 70% des publicités de nourriture vantent des aliments aux qualités nutritives très faibles, comme les céréales sucrées, la restauration rapide ou les grignotines. Seulement 1% des publicités adressées directement aux enfants faisaient la promotion des fruits et légumes.

Brian Cook a réalisé une étude semblable pour le Canada anglais. Il a calculé que 95% des publicités alimentaires présentées à Teletoon et à YTV faisaient la promotion d'aliments à faible valeur nutritive.

Au Québec, le groupe de recherche Médias et Santé de l'UQAM a calculé que seulement une publicité d'aliments sur cinq présentées à Télétoon et Vrak TV vante des aliments sains.