Quelle éducation financière avez-vous reçue ? Que cherchez-vous à transmettre à vos enfants ? Points de vue de trois parents.

Guy, 47 ans, père de six enfants âgés de 3 à 18 ans

«Mon père ne dépensait pas une cenne qu'il n'avait pas.»

Son père, né en 1930, était très économe. La maison mise à part, il payait tout comptant. Guy savait que sa famille, qui vivait à la campagne, n'était pas riche. «Mais il ne manquait jamais de rien», précise-t-il.

Lui se dit d'emblée plus «lousse» avec ses enfants. En tant qu'entrepreneur, il affirme ne pas pouvoir faire semblant qu'il n'a jamais recours au crédit. «Le crédit existe et il y a des risques à prendre quand on a une entreprise», fait-il valoir.

Critique, voire méfiant vis-à-vis le système économique dans lequel on vit, il joue volontiers le «vieux communiste bougon» pour justifier ses refus d'acheter une télé HD, une console de jeu vidéo ou même l'abonnement au câble. Il préfère que ses enfants jouent dehors.

«Je ne veux pas qu'ils pensent qu'on n'a pas d'argent, parce que ce n'est pas vrai de toute façon. La famille ne manque de rien. Mais je n'aime pas les discussions d'argent, avoue-t-il. Je ne veux pas non plus que le bonheur de mes enfants dépende des biens qu'ils ont, de la maison ou de la voiture qu'ils ont achetée.»

Manon, 49 ans, mère de deux adolescents

Manon a appris comment gérer l'économie d'une maison avec sa mère. «L'argent ne manquait pas, mais il ne sortait pas pour rien», se rappelle-t-elle. Mère de deux adolescents, Manon a grandi dans une famille au revenu modeste et a appris tôt les règles de l'emprunt et du remboursement à la faveur d'un prêt octroyé par son père pour qu'elle puisse s'acheter un orgue.

Avec ses enfants, la situation est différente. Son mari et elle sont à l'aise financièrement. Est-ce que les enfants en sont conscients? «Beaucoup trop, trouve-t-elle. Ils ne réalisent pas que ce ne sera peut-être pas toujours aussi facile pour eux.» Manon et son conjoint n'affichent pas leur aisance. Ils choisissent leurs luxes et tentent depuis peu d'inculquer des notions de budget et de gestion à leurs enfants.

Elle craint qu'une fois habitués à un certain train de vie, ils soient malheureux s'ils n'arrivent pas à le reproduire par eux-mêmes. «Pouvoir vivre avec peu et ne pas avoir de dettes, c'est ça pour moi, la liberté, dit Manon, évoquant ses années de jeunesse. Je suis inquiète qu'ils n'aient pas cette liberté-là.»

Guillaume, 41 ans, père de trois enfants de 3 mois à 13 ans

«Pourrie, lance Guillaume quand on lui demande le genre d'éducation financière qu'il a reçue de ses parents. On ne m'a pas montré à économiser et j'ai eu des problèmes avec ça plus jeune. À l'université et même avec mes premiers emplois, dès que j'avais de l'argent, je dépensais tout. J'ai eu des problèmes de dettes.»

Il ne se sent pas forcément compétent aujourd'hui face à son fils de 13 ans. Guillaume juge que celui-ci vit dans un univers de «consommation intense». Il ne le blâme pas pour autant. Il s'inquiète plutôt des messages que son propre comportement envoie à son fils, car lui-même n'est pas à l'abri de la tentation. «Mon père était "gadgeteux" et je le suis aussi un peu», avoue-t-il.

Guillaume, qui dit avoir des discussions à la maison au sujet de la consommation, a dû refaire le point avec son adolescent avant Noël après que celui-ci eut établi une liste de cadeaux de deux pages. «Il est en train d'apprendre, mais il devrait avoir déjà appris», estime le père de famille.

«C'est comme l'éducation sexuelle, ça devrait être constant, mais on ne l'est pas forcément comme parent, poursuit Guillaume. Puisqu'on n'a pas été constant, on a du rattrapage à faire avec son éducation financière. Et c'est plus de notre faute que de la sienne.»