Il ne faut pas la sous-estimer parce qu'elle n'est qu'une petite fille. Dora l'exploratrice vaut des milliards de dollars et pourrait bien contribuer à former une génération d'enfants plus tolérante et ouverte aux autres cultures.

Dix années se sont écoulées depuis que la latine Dora est devenue la première héroïne bilingue des émissions pour enfants et qu'elle a conquis les coeurs des bambins du monde entier.

Afin de célébrer cet anniversaire, la chaîne Nickelodeon a préparé une émission spéciale d'une heure où l'on pourra notamment entendre les voix des comédiens Rosie Perez, John Leguizamo et Hector Elizondo.

Un documentaire commenté par l'exploratrice elle-même a aussi été produit. Les créateurs et les experts de l'industrie ajouteront leur grain de sel entre les interventions des vedettes d'origine latine Salma Hayek et Shakira.

«Je pense que le fait que les enfants s'identifient à une fillette qui a une couleur de peau plus foncée et qui parle une autre langue (montre qu'ils sont plus ouverts)», estime le cocréateur et coproducteur exécutif Chris Gifford.

Une vraie bourlingueuse

«Dora l'exploratrice» a été traduite en 30 langues différentes et elle est diffusée dans 151 marchés différents à travers le monde.

Dans les pays anglophones comme les États-Unis, l'Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande et l'Irlande, Dora apprend l'espagnol aux enfants.

Au Québec et ailleurs dans le monde, l'aventureuse jeune fille apprend les rudiments de la langue de Shakespeare.

Selon Nickelodeon, la vente des produits dérivés de Dora a généré des profits de 11 milliards $ à travers le monde.

En France, la maison d'édition Albin Michel a vendu environ 12 millions de ses livres éducatifs - un pour chaque enfant de l'Hexagone, donc.

Latine par hasard

L'idée originale de l'émission n'avait rien à voir avec le bilinguisme, ni même avec une fillette en tant que tel.

«Elle ne devait pas être une »Latina« ou une héroïne. Nous avions en tête un personnage d'animal qui habitait dans la forêt!», explique la cocréatrice et coproductrice exécutive Valérie Walsh Valdes.

«En fait, c'est Nickelodeon qui nous a demandé de penser à en faire un personnage latin puisqu'une étude récente démontrait qu'il n'y avait pas de personnage bilingue positif dans les émissions jeunesse.»

Les producteurs se sont donc tournés vers des experts, notamment l'historien Carlos E. Cortes.

«Sa contribution nous a aidés à trouver la meilleure façon de bien présenter la culture latine de Dora», souligne Chris Gifford.

Carlos E. Cortes est «ravi» du personnage qu'il a aidé à mettre au monde. «J'apprécie surtout l'impact qu'elle semble avoir sur les jeunes», affirme le professeur d'histoire émérite de l'Université de Californie.

«Les enfants d'origine latine sont fiers d'avoir une représentante comme elle tandis que les autres apprennent à aimer un personnage différent.»

Chaque épisode s'appuie sur les conseils d'éducateurs et d'experts en culture et peut prendre jusqu'à un an à produire. Et Dora doit ensuite se soumettre à un jury redoutable: les quelque 75 enfants qui prévisionnent chaque épisode.

Les vedettes honorent Dora

Les plus vieux de la tribu Jolie-Pitt en raffolent. Ils se sont d'ailleurs préparés à l'arrivée des jumeaux Vivienne Marcheline et Knox Léon en écoutant Dora.

«Il y a un épisode où la mère de Dora accouche de jumeaux, un garçon et une fille», a expliqué l'actrice au magazine People en 2008. Les aînés de la famille «l'ont beaucoup écouté».

La comédienne et productrice Salma Hayek, qui a été invitée à participer au documentaire, est une inconditionnelle.

«Je l'adore! Elle fait partie de la relation que j'ai avec mon enfant», a-t-elle dit en mars lors de la conférence de presse soulignant le 10e anniversaire de la série.

Et Dora pourrait bien avoir une influence sur la société américaine à long terme, croit Carlos E. Cortes. Car les enfants qui écoutaient Dora en 2000 avaient cinq ans. Ils en ont maintenant quinze et pourront voter dans trois ans.

«Je pense que nous verrons une différence, indique Carlos E. Cortes. On ne peut en être certain, mais notre souhait, c'est que les jeunes de tous les milieux soient plus ouverts.»

«Si Dora peut faire ça, son impact est inimaginable.»