«Jamais je ne travaillerai dans ton usine, ça pue !» À 15 ans, Karine Pomerleau était loin de se douter que, 20 ans plus tard, elle serait vice-présidente de Trans Herbe. La société de thés et tisanes gourmets, fondée par sa mère Johanne Dion, est en pleine expansion. Les deux femmes en assurent la direction avec une complicité évidente. 

«Notre relation est très facile, on travaille bien ensemble, indique Johanne Dion, présidente. Karine est de la nouvelle génération et je tends à lui laisser les guides. Je suis plus instinctive, elle est plus rigoureuse. On a deux styles de gestion complètement différents, mais ça fonctionne. Je sais que je peux lui faire confiance.»

Mère de deux jeunes enfants, Karine Pomerleau a d'abord été notaire. Elle a eu l'appel des affaires sur le tard, lors d'un voyage en Californie avec sa mère. Elle a subitement laissé le notariat pour le thé et la tisane. C'était il y a 13 ans. «Question de me familiariser avec l'entreprise, j'ai travaillé dans tous les services. J'ai gravi les échelons un à un, je n'ai eu aucun passe-droit.»

«Il n'était pas question que je lui donne un poste tout cuit dans le bec. Je souhaitais qu'elle reste humble, explique sa mère. Quand j'ai démarré l'entreprise, je travaillais énormément, j'en ai beaucoup bavé. Les affaires, c'était pour les hommes. J'avais trois hypothèques sur la maison, j'ai vécu un divorce.»

Pour Karine, sa mère fait sans surprise office de mentor. «Indépendante, je fais à ma manière, mais je lui demande toujours conseil. J'admire sa détermination, sa force.»

Née à une époque où «on ne buvait que du thé Salada», l'entreprise de Saint-Bruno a su tailler sa place lentement mais sûrement avec ses produits La Courtisane et Four O'Clock. Elle compte actuellement 150 employés et des clients partout dans le monde. Johanne Dion dirige les ventes, tandis que sa fille Karine s'occupe davantage de la production.

Quand on est patron de ses enfants, est-on plus exigeant envers eux ? «Beaucoup plus !» répond Karine, à la surprise de sa mère. «Johanne connaît mes limites et sait jusqu'où elle peut me pousser. Mais jamais je n'ai l'impression qu'elle regarde par-dessus mon épaule.»

Franches et honnêtes, les deux femmes ne laissent jamais les malentendus envenimer leur relation. «À la maison comme au travail, si on a quelque chose à se dire, on va au fond de la question sans attendre», dit Karine. Désormais, elles se côtoient moins le week-end, mais elles aiment partager un souper au restaurant à l'occasion et, bien entendu, un bon thé.