Pour certaines mères porteuses, l'altruisme prend parfois des airs de commerce.

Sylvie* s'affiche actuellement sur de nombreux forums de discussion, où la demande de mères porteuses excède largement l'offre. Sylvie change parfois de pseudonyme, mais son message est essentiellement le même: mère de famille et mère porteuse à trois reprises, elle désire aider encore une fois un couple à réaliser son désir d'enfant.

Comme carte de visite, elle envoie un lien vers un reportage que TQS a réalisé sur elle en 2008 au cours duquel elle dit «adorer être enceinte».

 

Aux personnes qui lui écrivent, elle répond par un très long courriel dans lequel elle explique sa démarche en insistant sur le lien de confiance. Elle ajoute un «exemple de consentement entre les deux parties» dans lequel elle détaille les sommes qui lui seraient versées: 1500$ à la signature du contrat, 3500$ au test de grossesse positif (avec test sanguin obligatoire), 5000$ à l'échographie, 5000$ à l'accouchement par césarienne. Soit 15 000$, plus les coûts de la clinique de fertilisation, déplacements, hébergement, repas.

Elle donne aussi plusieurs renseignements sur la législation québécoise et canadienne en matière de gestation pour autrui, les coordonnées d'une avocate montréalaise et une liste de liens vers des sites web gouvernementaux.

Bref, Sylvie se présente comme une femme sérieuse qui sait exactement ce qu'elle fait.

Disponible maintenant, ou pas?

Ces deux dernières semaines, Sylvie a donné cette information à au moins trois femmes en quête d'une mère porteuse, dont la correspondance a été examinée par La Presse.

Une première correspondante s'informe de sa disponibilité pour une amie; Sylvie invite cette amie à communiquer dès maintenant avec elle. Une seconde demande précisément à Sylvie si elle est «présentement disponible». Sylvie lui répond: «Effectivement, je suis dans ma sélection.»

Une troisième correspondante nous a indiqué que Sylvie lui avait dit, lors d'une conversation téléphonique la semaine dernière, «qu'elle connaît son cycle par coeur et qu'elle serait prête pour une insémination le 5 décembre».

Le hic, c'est qu'une quatrième femme a confirmé à La Presse que Sylvie est «sa mère porteuse» et qu'elle en est actuellement à son premier trimestre de grossesse...

Selon les termes du contrat de Sylvie, ce couple lui a versé 5000$ à ce jour.

Alors, enceinte ou pas enceinte?

Lorsque La Presse l'a jointe pour avoir des éclaircissements sur ces apparentes contradictions, Sylvie a juré porter actuellement le bébé de la quatrième femme jointe par La Presse. Elle a expliqué ses propos sur une insémination en décembre par un malentendu. Elle a dit avoir oublié de préciser qu'il s'agissait de «décembre 2010» (ce qui impliquerait qu'elle connaît sa date d'ovulation un an à l'avance).

Interrogée sur le nombre de grossesses qu'elle a menées à terme en tant que mère porteuse, Sylvie n'a pas répondu.

Après sa conversation avec La Presse mercredi soir, Sylvie a envoyé un message à ses correspondantes pour préciser que sa «sélection du moment est pour une grossesse l'an prochain».

* nom d'emprunt