«Qu'est-ce qu'on faaaaaaaait?» «Persoooooooonne ne veut jouer avec moi!» Prendre une grande respiration. Surtout, ne pas céder. Surtout, résister à l'appel des parcs d'attractions, des zoos et des glissades d'eau. Ça viendra, mais pas tout de suite. On a plus important à faire. Les enfants doivent apprendre à tolérer l'ennui, pour (alléluia!) en venir à proposer eux-mêmes des activités.

C'était l'été dernier. J'ai pris de longues vacances avec mes garçons de 4 et 6 ans. Au programme? Un voyage en famille, mais le reste du temps, rien. Rien, comme dans «je suis ouverte aux suggestions, les garçons, profitez-en pour proposer des jeux auxquels on n'a jamais de temps à consacrer.»

Histoire d'apprécier l'été au maximum, nous avions convenu en famille de limiter la télé et les jeux vidéo à environ une heure chaque jour. J'ai lu des histoires, joué aux cartes, lancé des balles au terrain de baseball, mais je n'ai rien proposé d'extravagant.

Je savais qu'après des mois d'école et de garderie, le passage à un rythme de vie plus lent serait difficile. J'avais toutefois sous-estimé l'entreprise.

Les premiers jours furent plutôt pénibles. Décontenancés par le programme d'activités plutôt léger, ils réclamaient à toute heure «quelque chose à faire».

«Penses-tu qu'il reste des places au camp de jour?» demandais-je alors à mon amoureux en rigolant. N'empêche, plus la première semaine s'égrenait, plus je doutais. L'ennui allait-il leur permettre de se créer eux-mêmes des jeux et de lancer des projets plus ambitieux spontanément?

C'est arrivé au bout d'un peu plus d'une semaine. L'ennui a pris la forme d'une grande construction en blocs de bois. Un stade pour l'Euro 2008 où allaient jouer des figurines personnifiant les joueurs de soccer des nations d'Europe. Et pour chaque pays, un petit drapeau de papier au bout d'un bâton de popsicle.

Des heures à lancer les dés pour déterminer les gagnants. Allez savoir! Chaque fois, c'était la République tchèque.

Puis, ils ont réclamé mon aide pour réaliser d'approximatives constructions en bois, avec de vrais clous et de vraies planches. Ils ont aussi entretenu leur jardin d'herbes et mangé d'étranges salades de persil. Toujours à leur propre initiative, avec fierté et grand plaisir.

Apprendre à tolérer l'ennui n'aura pas été de tout repos. C'est aussi à recommencer, chaque fois qu'on laisse mille et une activités prendre toute la place, trop longtemps. Mais les projets qui en émanent valent bien quelques protestations. Puis, d'une fois à l'autre, les idées surgissent plus rapidement.

Alors, qu'est-ce qu'on a prévu pour la relâche? Rien.

Mais pas pour longtemps.

***

L'ennui, la dopamine et le cerveau

Dans le cerveau d'un enfant, le manque de stimulation crée un stress. L'ennui l'amène alors à provoquer une manifestation qui réduira ce stress. Voilà pourquoi, au restaurant, un enfant peut soudainement se mettre à jouer avec les couverts... En lui présentant un livre à colorier, les parents lui apprennent à faire appel à son cerveau inférieur, là où logent les mécanismes en lien avec la curiosité. Cette activité entraîne alors la sécrétion de dopamine dans le cerveau, une substance qui le calmera. Avec les années et beaucoup d'entraînement, les enfants passent plus aisément de l'ennui à la création.

Source: La Science au service des parents, Margot Sunderland, Éditions Hurtubise