Chaque semaine, Vivre va à la rencontre de ceux qui ont trouvé le bonheur hors des sentiers battus.

Âge: 32 ans

Profession: sous le pseudonyme de Tricot pirate, artiste textile au sein du collectif les Ville-Laines.

Devise: celle des Ville-Laines: «Knit fast, Die warm» (tricote vite, meurs au chaud)

> Son histoire

«Après mon bac en arts visuels à l'UQAM, j'ai fondé ma compagnie de toutous en peluche. Maintenant, j'enseigne l'art aux enfants. Pour la prochaine installation des Ville-Laines, nous allons recouvrir les gros piliers du carré Viger. Puisque les itinérants vont dormir là, on va écrire en grosses lettres «Home Sweet Home», comme une façon de leur dire qu'on ne les oublie pas.»

> Pourquoi faire du graffiti-tricot?

«J'ai découvert ça sur l'internet, j'ai vu que ça existait dans d'autres pays et j'avais le goût de faire partie de cette communauté. Mon but était d'envahir l'espace public avec l'art textile. J'ai commencé par moi-même, rue Milton, dans le temps que je restais dans le ghetto McGill. J'ai accroché quatre pièces, au début de l'été 2010. Si j'allais à la campagne, j'en mettais sous les arbres, dans les forêts. C'était surtout pour laisser ma trace et observer la réaction des gens.»

> Ce qu'elle espère transmettre, à travers son art:

«C'est une façon de revendiquer l'espace public. La ville est à nous et on en prend possession! À nous quatre, les Ville-Laines, on essaie de créer quelque chose d'esthétique et de ludique, en plus d'avoir une portée sociale et politique. On a été invitées à des événements organisés par Projet Jeunesse. On a fait une manifestation à la Régie du logement, pour dénoncer les délais dans les procès intentés aux propriétaires qui prennent trop de temps pour mettre le chauffage (on a eu le temps de tricoter un chandail!) Ça vient chercher l'imagination des gens.»

> Tricote-t-elle pour son bébé (elle est enceinte de quatre mois)?

«Je voulais faire des petites capuches crochetées, mais je n'ai pas encore réussi à trouver le temps, parce que j'ai une expo de peinture à préparer. Je pense que cet hiver, quand j'aurai une grosse bedaine et plus le choix de m'asseoir, je vais apprendre à utiliser des patrons et m'y mettre!»

> À quoi elle pense, quand elle tricote?

«Ah! C'est quelque chose qui te «grounde». Pour une fois, tu ne penses à rien pendant deux secondes. Ton cerveau se calme. Tu deviens zen. C'est une forme de méditation. Je ne tricote pas tous les jours et c'est rare que je tricote pendant des heures: d'habitude, ce sont des petits moments dans la journée. Quand je tricote avec ma gang, on fait ça un peu à l'image du Cercle des fermières: c'est un prétexte pour parler politique.»

> Sa philosophie:

«Ce n'est pas facile d'être un artiste ces temps-ci à Montréal: il y a plus d'artistes que de centres de diffusion. Moi, je me suis dit que je n'allais pas attendre, que j'allais juste faire mes projets, même si en investissant l'espace public, tu prends le risque de ne pas récupérer tes pièces.»

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