Jeune designer, Samuel Mercure vient de faire son entrée chez Michel Brisson, boutique pour hommes, rue Laurier. En moins de deux ans, il a été adopté par le sérail de la mode grâce à un parti pris fort: des vêtements noirs qui dessinent des silhouettes structurées à la limite de l'austérité.

Samuel Mercure travaille dans un appartement-atelier, rue Ontario Est. Chevelure blonde, visage d'ange, il est tout vêtu de noir. On distingue sur lui des superpositions de leggings, un pantalon coupé aux genoux et des strates de T-shirts.

«Mon engouement pour le noir est d'ordre purement esthétique, dit-il. Ce n'est pas faute d'avoir essayé de me tourner vers des nuances colorées et vives, mais rien n'y fait: j'y reviens toujours, comme un aimant.»

Son atelier fait écho à cette monomanie. Ici, il y a du noir partout. Sur une table basse, Noir: Histoire d'une couleur, de Michel Pastoureau, historien médiéviste français, est posé en évidence, soulevant la question: le noir est-il une couleur ou pas? Les opinions divergent. Michel Pastoureau, spécialiste de la symbolique des couleurs, décrit ainsi le noir: «Cette couleur qui n'en finit plus d'opérer un mouvement de balancier, du morbide au raffiné, du sinistre à l'élégant, du ténébreux à l'implacable, indice du mystère comme de l'autorité.»

Rick Owens, Ann Demeulemeester et Neil Barrett sont autant de références pointues du monde de la mode. Elles ont fait du noir non seulement leur signature esthétique, mais aussi leur fonds de commerce. C'est dire que le très sombre fascine et, plus trivialement, se vend toujours bien.

«Le commerce n'est pas ce qui m'a motivé, explique Samuel Mercure. C'est simplement plus facile de coordonner sa garde-robe lorsque tout y est monochrome.»

Le chemin parcouru par le jeune designer semble déjà long depuis sa première apparition publique à la Semaine de mode de Montréal, en 2010.

Photos fournies par Samuel Mercure

«J'aime par-dessus tout les silhouettes carrées, précise-t-il. J'ai un côté obsessionnel, dans la mesure où le monolithe de 2001: L'odyssée de l'espace, de Stanley Kubrick, est ce qu'on pourrait appeler mon Graal. Je crée des modèles protecteurs, qui se distinguent par une structure toujours identique, puisqu'ils sont tous symétriques.»

Sa collection printemps-été 2012 - sa deuxième - nous donne à apprécier des T-shirts hyper légers à manches évasées en jersey de bambou, des pantalons et des bermudas avec panneaux de tissus superposés, d'amples tuniques en lin, le tout parfaitement maîtrisé.

Après des études à l'UQAM en arts visuels et une année de design à Paris, Samuel Mercure semble promis à une carrière fulgurante et durable, comme l'est le noir dans la grande épopée de la mode.