Le gouvernement britannique a annoncé hier un grand chambardement du milieu bancaire, avec moins de poids de l'État sur Lloyds, davantage sur RBS, et 10% de la banque de détail du pays mis en vente à destination de nouveaux arrivants sur ce marché.

En février, le gouvernement avait proposé de garantir les actifs les plus risqués des banques fragilisées comme Royal Bank of Scotland (RBS), déjà nationalisée à 70%, et Lloyds, détenue à 43%. Elles avaient accepté le principe, mais rien n'avait été signé.

Entre-temps, les conditions de marché se sont améliorées, et elles se sont demandé comment échapper au plan. Pendant ce temps, la Commission européenne a rappelé que l'aide de l'État au secteur privé a un prix, celui de cessions plus ou moins douloureuses, pour des raisons de concurrence. Le résultat de ces différentes réflexions a été annoncé d'un coup hier à l'aube, par les banques et par le ministère des Finances.

Finalement, Lloyds pourra échapper au plan de protection des actifs, en recueillant 21 milliards de livres, dont 13,5 milliards d'augmentation de capital, à laquelle participera l'État à hauteur de sa part (soit 5,7 milliards de livres).

RBS, quant à elle, n'y coupera pas. Le gouvernement va verser 25,5 milliards de livres dans l'opération, et tiendra en outre à la disposition de RBS 8 milliards de livres de plus en cas de «scénario noir». Sa part passe à 84%, mais il n'aura que 75% des droits de vote.

Les banques ont aussi annoncé à quelles cessions elles allaient procéder pour respecter les souhaits de Bruxelles. Lloyds va vendre notamment ses succursales TSB, RBS ses succursales RBS en Angleterre et Pays-de-Galles, et ses succursales NatWest en Écosse. En tout, 10% de la banque de détail britannique est à vendre, et les poids lourds comme Barclays et HSBC n'auront pas le droit de se porter candidats.

Au contraire, les petits participants et les nouveaux arrivants seront privilégiés. Le ministre des Finances, Alistair Darling, a indiqué qu'il aimerait voir naître trois nouvelles banques dans cette opération.

Le groupe de distribution Tesco, géant des supermarchés au Royaume-Uni, ou Virgin Money, filiale du conglomérat Virgin qui cherche à devenir une banque à part entière actuellement, pourraient être sur les rangs. «Cette journée marque peut-être le début du plus grand changement jamais vu dans la banque de détail au Royaume-Uni», a remarqué Manoj Ladwa, d'ETX Capital.

«Si tout marche comme prévu, cela devrait restaurer la confiance dans le secteur bancaire britannique, circonscrire les problèmes de concurrence et en donner au Trésor pour son argent», a-t-il ajouté, avant de s'inquiéter. «Mais si ça ne marche pas? S'il y a une double récession?»

Alors que RBS a annoncé lundi soir 3700 suppressions d'emplois dans ses succursales britanniques, sans rapport avec les cessions annoncées hier, le syndicat Unite a noté que 25 000 emplois étaient en danger après ces décisions et que les acheteurs potentiels devraient s'engager sur leur maintien.

Le gouvernement s'est voulu rassurant. M. Darling a été interrogé sur les 30 milliards de livres remis en jeu hier, alors que l'aide aux banques représentait déjà 10,1 points des 59% de produit intérieur brut (PIB) de la dette publique à la fin de septembre. Il a remarqué que cette somme permettait à l'État de s'ôter du dessus de la tête une épée de Damoclès de 300 milliards de livres d'actifs risqués de Lloyds et partiellement de RBS.

Le premier ministre, Gordon Brown, a pour sa part assuré «qu'au bout du compte, ce seront les banques qui donneront de l'argent aux Britanniques, et pas le contraire».