L'esprit «récup» gagne le jean: il se fabrique avec des fibres issues de bouteilles en plastique, et lorsqu'il reste fidèle au traditionnel coton, il peut aussi se réduire en poudre pour devenir papier.

Plusieurs des 64 exposants au salon international Denim by Première Vision, qui vient de se tenir à Saint-Denis, près de Paris, se sont mis au recyclage, affichant des préoccupations écologiques encore discrètes dans l'industrie très polluante du denim.

Chez Hellenic Fabrics, par exemple, Panos Sofianos, chargé de la recherche et du développement, ne veut pas penser simplement bio mais aussi recyclage. «Qu'est-ce qu'on va faire des matériaux qui existent déjà ?» demande-t-il. La société grecque lance donc un denim mélangeant du coton bio et des fibres réalisées à partir de bouteilles d'eau en plastique.

Le coton, cultivé en Grèce, représente 63% des fibres, le polyester, issu de bouteilles collectées notamment en Asie, 37%, indique M. Sofianos. Ce «produit de niche» est vendu «environ 10% plus cher» que les autres denims, précise-t-il.

La société a développé ce tissu non pour des raisons commerciales, mais «100% éthiques», affirme-t-il. «C'est pour l'environnement, pour nos enfants». Ce mélange représente une nouvelle étape pour la société qui avait déjà une ligne bio, explique-t-il.

La société belge Uco Sportswear utilise du «coton recyclé» en invoquant elle aussi «des raisons environnementales».

«Nous récupérons des restes de fils auprès de filatures» en Italie et en Belgique, explique Sibilla Vanderlinden, chargée du développement produit. Mais «c'est moins solide» que les fibres neuves et «pas facile à teindre», explique-telle. La société mélange donc «le vintage avec du polyester» pour plus de solidité et «un effet chiné».

Ce denim, lancé il y a environ deux ans et demi, «n'est pas moins cher» que les autres et représente «moins d'un dixième des ventes», précise Mme Vanderlinden.

De son côté, la société italienne Cadicagroup utilise de vieux jeans, les découpe et les réduit en pâte pour fabriquer des étiquettes.

«Cela fait partie de notre philosophie d'utiliser le plus possible de fibres naturelles et de recycler», explique Paolo Pavarotti, responsable de la communication. Cadicagroup «récupère de vieux jeans auprès des fabricants et revend les étiquettes aux mêmes fabricants».

Le naturel vient aussi se nicher dans des innovations très techniques, comme les «micro-encapsulations», déjà utilisées notamment par les fabricants de bas et collants, et qui gagnent désormais le denim.

Hellenic Fabrics propose ainsi un jean qui fait la peau douce grâce à des actifs contenus dans ses fibres. «Ca fonctionne comme une crème de jour, ça marche comme l'aloe vera», affirme M. Sofianos.

Selon l'étiquette, le produit cosmétique est composé de vitamines et d'huiles essentielles. Il résiste à une dizaine de lavages, précise M. Sofianos.

Le denim lui-même fait peau douce. De nombreux fabricants proposent des tissus «soft touch», c'est-à-dire au toucher très doux obtenu grâce à une enduit. Selon Pascaline Wilhelm, directrice mode de Première Vision, le coton s'associe aussi de plus en plus à des fibres naturelles nobles, comme le cachemire et le lin.