Son nom ne vous dira peut-être rien et il est possible que vous la confondiez avec d'autres mamies de la mode, dont Betsey Johnson et Vivienne Westwood - la dame prétend d'ailleurs que cela lui arrive régulièrement. Pourtant, Zandra Rhodes a un style, une personnalité et un parcours bien à elle, parcours qui lui fait faire un bref saut à Montréal cette semaine, à l'invitation de l'Opéra de Montréal.

L'excentique aux cheveux fuchsia a toujours eu un pied dans le monde de la mode et l'autre dans le milieu des arts. Elle a fait sa marque dans le premier en créant des tenues vaporeuses aux imprimés très colorés portées par des personnalités aussi opposées que Lady Di, Freddie Mercury (du groupe Queen), Jackie Onassis et Paris Hilton.

 

Certaines de ses créations de soie peinte sont de véritables chefs-d'oeuvre, mais son engagement dans les arts va plus loin. La designer britannique, qui vit la moitié du temps à Londres, dans un appartement situé au-dessus du Fashion and Textile Museum qu'elle a fondé en 1999, et l'autre moitié en Californie, s'est réincarnée en conceptrice de décors et de costumes pour l'opéra. Son succès dans ce milieu est retentissant, au point d'avoir remis Les pêcheurs de perles de Bizet au goût du jour. La production de l'Opéra de San Diego, créée en 2004, a fait plusieurs escales aux États-Unis et s'arrête maintenant chez nous, en location.

«L'oeuvre est intéressante en soi, mais présentée dans un écrin comme celui-là, elle l'est encore plus, croit Michel Beaulac, directeur artistique de l'Opéra de Montréal. C'est rare qu'on voit des productions aussi chatoyantes. Chaque image a un côté aquarelle, une transparence. On est très près du geste en pleine exécution, du coup de pinceau. L'ambiance est exotique, romantique, à la fois conte de fées et conte oriental. C'est une véritable magie de couleurs.»

 

Photo fournie par Alain Labonté Communications

Un modèle d'une récente collection de Zandra Rhodes.

Jointe à Londres, la semaine dernière, la créatrice est revenue sur l'expérience. «J'avais d'abord proposé un décor très réaliste, puis j'ai compris qu'ils n'étaient pas venus voir une dame aux cheveux roses pour qu'elle leur propose un décor réaliste. Comme je suis avant tout une designer de textiles, j'ai décidé d'utiliser le tissu et l'imprimé comme matières de base. Entre-temps, on m'a demandé d'être juge au concours Miss Inde. J'en ai profité pour me rendre au Sri Lanka, lieu de l'action des Pêcheurs de perles, afin de faire un peu de recherche.»Venue avant tout pour mettre la dernière main aux costumes qui apparaîtront sur la scène de la salle Wilfrid-Pelletier à compter de samedi soir, entre autres sur le soprano Karina Gauvin, Zandra Rhodes a également présenté sa collection automne-hiver, hier soir, à la Place des Arts. Disparue des radars de la mode dans les années 90, cette pionnière de la «haute punk» a renoué avec les passerelles il y a deux ans, mais la plupart de ses ventes de vêtements se font néanmoins sous forme de commandes privées.

Copiée à qui mieux mieux depuis les années 70, la designer n'en est pas moins demeurée fidèle à son style. La mode étant un phénomène cyclique, il arrive régulièrement que ce style refasse surface. «Si l'on se réinvente trop, les gens ne nous suivent pas, croit-elle. Il faut trouver l'équilibre parfait entre la tradition et l'innovation. De toute manière, c'est devenu très difficile de surprendre les gens», affirme celle qui semble avoir baissé les bras devant les exigences et l'intransigeance du milieu de la mode.

En Amérique du Nord, on trouve difficilement des pièces portant la griffe de Zandra Rhodes, à moins de se rendre dans les boutiques se spécialisant dans le vintage ou de naviguer sur eBay. Chez E.R.A Vintage, rue Notre-Dame, on a déjà vu passer quelques morceaux, vite arrachés par des collectionneurs. Même scénario dans des boutiques comme Cherry, à New York, et Decades, à Los Angeles. Mais si vous vous intéressez à la fourrure, sachez que Holt Renfrew tient quelques modèles de la collection que Mme Rhodes a dessinée pour la marque Pologeorgis.