Mauro Colagreco, chef du Mirazur à Menton, en France, a été désigné «cuisinier de l'année» par l'édition 2009 du guide gastronomique GaultMillau France, à paraître jeudi.

Mauro Colagreco croit au pouvoir des fleurs, celles de son jardin où ce jeune chef italo-argentin installé à Menton (Côte d'Azur) et désigné lundi «cuisinier de l'année» par l'édition 2009 du guide culinaire GaultMillau, puise l'inspiration d'une cuisine inventive, l'une des plus en vue du moment.

En 2007, le GaultMillau l'avait déjà distingé en le proclamant «révélation de l'année». Son restaurant «Le Mirazur», ouvert depuis quelques mois, avait alors décroché sa première étoile faisant de lui le seul chef argentin auréolé d'une telle distinction.

Ce natif de La Plata mesure le chemin parcouru depuis l'époque, pas si lointaine, où il se débattait avec les chiffres dans le cabinet d'expert-comptable de son père, cherchant sa voie.

La cuisine s'est imposée. La France apparaissait comme le passage obligé: «J'ai hésité avec l'Espagne, pour la langue, et à cause du "phénomène" Ferran Adria (le cuisinier catalan connu mondialement). Mais la France restait la référence pour l'acquisition des bases classiques», explique cet homme à l'accent chaleureux.

Admis au lycée hôtelier de La Rochelle, Mauro Colagreco ne s'y attarde pas: au terme d'un premier stage de quatre mois chez Bernard Loiseau, ce dernier lui propose de continuer son apprentissage à ses côtés. Il restera dans la prestigieuse maison jusqu'au suicide du chef, en 2003.

D'autres maîtres suivent. Auprès de chacun, le jeune homme ajoute une petite pierre à son édifice: «passion et raffinement de modes de cuisson» chez Loiseau, «créativité permanente, sublimation du légume» chez Alain Passard, «perfection et rigueur absolues» chez Alain Ducasse, au Plaza Athénée à Paris.

Mauro Colagreco maîtrise désormais son solfège. Reste à trouver la scène idéale pour composer. L'Espagne, une fois encore, le tente. De nouveau, la France le rattrape par la manche lorsqu'une connaissance lui fait découvrir le Mirazur, une villa contemporaine suspendue entre ciel et mer, à la sortie de Menton.

Faire revivre cette table, fermée depuis trois ans après avoir connu un sort contrasté sous la férule de Jacques Chibois, n'est pas un mince pari. Mais certains signes ne trompent pas: l'Italie, terre des ancêtres du jeune chef, est à quelques mètres du restaurant; dans le jardin, des jacarandas flamboyants le renvoient aux images de sa jeunesse argentine. Mauro Colagreco se lance.

«Au départ, j'avais en tête trois, quatre cartes par saison que je me voyais développer ici. J'ai tout jeté à la poubelle dès que j'ai mis un pied dehors».

Dehors, ce sont des parfums entêtants et une nature luxuriante qui affolent les sens. Mauro Colagreco apprend à se perdre dans les jardins de ce bout de Côte d'Azur, d'où il ramène herbes et fleurs sauvages.

Confiés à son talent, menthe, bourrache, fleur de roquette, oxalys acidulé, enfièvrent un carpaccio de maquereau, une bouchée d'écrevisse, des tripes de cabillaud.

Depuis cette année, il regarde pousser dans son potager une vingtaine de variétés de tomates, cinq sortes de courgettes, des aubergines, des piments, plantés avec l'aide d'une botaniste neo-zélandaise et qu'il travaille à différents stades de maturation.

«Ce potager est mon petit "chouchou", j'aimerais l'agrandir au point d'être autonome. Le contact avec la terre est un moment de réflexion dans ma journée et une forme de devoir pour un chef: celui de conserver et transmettre».