Strass et paillettes se faisaient discrets en ces temps de crise financière à la 16e Foire aux millionnaires ce week-end à Munich (sud de l'Allemagne), loin de l'extravagance de ses précédents rendez-vous internationaux.

Avant ses grands-messes annuelles à Amsterdam, Moscou ou Istanbul et après avoir fait étape à Shanghai, cette espèce de supermarché itinérant du luxe faisait halte pour la première fois en Allemagne, dans la riche capitale bavaroise, en provoquant quelques grincements de dents.

Jeudi, peu avant l'inauguration du salon, des associations anticapitalistes locales ont manifesté pour protester contre la venue de la foire. On pouvait encore lire, tracé à la craie sur le sol: «Le luxe c'est du gaspillage, du vol, du meurtre».

Klass Simon Obma, l'organisateur de la foire, balaie les critiques d'un revers de main. «Certains nous reprochent de nous afficher en ces temps de crise financière», déclare-t-il à l'AFP. «Au contraire, la crise nous aide: les gens déçus par la spéculation boursière retrouvent le goût des choses réelles. Nous proposons ici des produits de très haute qualité et qui stimulent l'industrie».

M. Obma attendait environ 20 000 visiteurs jusqu'à dimanche. Mais malgré un tarif d'entrée abordable pour un salon (39 euros par personne (62$ CAN)- les visiteurs étaient plutôt rares vendredi parmi la centaine de stands de sociétés de poduits de luxe répartis sur quelque 16000 mètres carrés.

Un caddy de golf téléguidé, un piano qui joue tout seul des airs que l'on télécharge d'un portail internet, le plus grand écran de télévision haute définition sur le marché (103 pouces, soit 2,62 mètres carrés): à défaut d'être toujours utiles, les produits exposés sont indéniablement agréables.

Pierre Siegling, chef de projet d'une société d'articles de sport et de bien-être vendus à partir de 6000 euros (9500 $CAN), confie que les ventes sont rares à la foire.

«Les gens viennent surtout ici pour voir et se faire voir», explique-t-il. Quand ils sont intéressés, ils ne demandent pas le prix, ça leur est égal. Ils se renseignent et nous relancent éventuellement plus tard».

Sur le stand d'Audi, un jeune couple d'origine ukrainienne avec bébé en poussette se prend en photo devant une rutilante R8. «J'aime cet endroit où l'on ne dit pas nous sommes les moins chers sur le marché mais plutôt nous sommes les meilleurs qui existent», déclare le mari, patron d'une entreprise de logiciels informatiques à Munich, qui comme tous les visiteurs interrogés préfère taire son nom.

Une blonde Italienne tout en fourrures et parures se dit «un peu déçue» par la foire. «Il y a de tout, mais seulement un peu de tout. Et il n'y a pas l'extravagance que j'attendais».

Son mari, médecin munichois, lunettes et lèvres fines, fait la moue devant les vitrines d'un bijoutier et ajoute: «A Munich, la culture du luxe est ancienne. Il n'y a pas le même besoin de clinquant comme en Russie par exemple, où les nouveaux riches se sont tellement serrés la ceinture pendant des décennies qu'ils achètent désormais tout ce qui brille».

«Les Allemands sont envieux par nature, alors on n'exhibe pas ces richesses, tout est dans les sous-entendus», poursuit-il. «Il y a même une certaine radinerie dans la société, que l'on retrouve aussi chez les millionnaires».

Illustration, selon lui: «Certains de mes patients rechignent à payer les 10 euros (16$ CAN) de taxe par consultation, alors qu'une Bentley les attend dehors».