Malgré les nombreuses tentations, les Britanniques nourrissent toujours une passion sans pareille pour leur «cup of tea», une tradition qui n'aurait pas survécu à la vie moderne sans l'invention fortuite il y a 100 ans du sachet de thé. 

«La consommation du thé sur le continent a un côté chic. Ici, c'est comme respirer, on le fait automatiquement», confie à l'AFP William Gorman, président du Conseil britannique du thé, partenariat des pays producteurs de thé et des fabricants britanniques.À l'heure actuelle, le Royaume-Uni se place au deuxième rang mondial de consommation annuelle de thé per capita avec 2,5 kg, derrière l'Irlande (2,7 kg). La Chine et l'Inde n'affichent que 0,5 kg par personne.

Cela représente en moyenne trois tasses de thé par jour pour chaque Britannique (enfants compris), soit un total d'environ 165 millions par jour ou 60,2 milliards par an.

En 1970, la consommation moyenne quotidienne était de quatre tasses par personne mais l'apparition de nouvelles boissons a entraîné une légère désaffection. Pourtant ces dernières années, les industriels ont assisté à une reprise dans une société de plus en plus soucieuse de sa silhouette.

«Les preuves scientifiques du bienfait du thé sur la santé se sont multipliées. Les femmes, en particulier celles entre 25 et 40 ans, dopent ce renouveau parce qu'elles en ont marre de l'eau», a estimé M. Gorman.

Et de rappeler qu'une tasse de thé est constituée à 99% d'eau, qu'elle est riche en anti-oxydants, hydratante, n'est pas calorique, qu'un nuage de lait ne «pèse» que 14 calories, et que le taux de caféine est faible.

Mais ce n'est pas suffisant pour expliquer le regain d'intérêt pour cette boisson popularisée au 17e siècle en Angleterre par l'infante portugaise et épouse du roi Charles II, Catherine de Bragance, et qui a explosé avec la révolution industrielle.

«À l'instar du vin ces 30 dernières années, les fabricants de thé proposent désormais de merveilleuses sélections de thés spécialisés. La gamme a augmenté de façon spectaculaire», a relevé M. Gorman.

Infusions, thés parfumés et thés verts ont fait de nouveaux adeptes mais le palais britannique préfère de loin le thé noir au lait, qui est présent dans 90% des «mugs» (grande tasse).

Face à l'apparition récente de chaînes de café, le thé n'a même pas frémi: «Le café n'a jamais été une menace. Le café est un concurrent honorable mais nous sommes une nation dominée par le thé», a affirmé William Gorman, indiquant que les Britanniques consomment seulement 70 millions de tasses de café par jour.

Reste que le breuvage préféré des Britanniques ne doit sa survie qu'à une opération promotionnelle qui a mal tourné et qui célèbre cette année son centenaire: «Le sachet de thé a sauvé l'industrie», reconnaît M. Gorman.

En 1908, un marchand anglais de thé installé à New York, Thomas Sullivan, veut développer son commerce et envoie à des prospects des échantillons dans de petits sacs de soie. Les destinataires, peu familiarisés avec la préparation de l'élixir, plongent l'ensemble dans l'eau chaude.

Il faut attendre 1953 pour que le sachet, perfectionné par les Américains, traverse l'Atlantique mais les Britanniques sont d'abord réticents à renoncer au cérémonial de la préparation du thé en vrac.

Au début des années 1960, le thé en sachet représente moins de 3% des ventes, alors qu'aujourd'hui 96% des quelque 160 000 tonnes de thé importées chaque année au Royaume-Uni sont vendues en sachets, plus pratiques et plus rapides à utiliser.