À l'occasion de la sortie de La Sélection Chartier 2008 , nous avons soumis notre collaborateur à un petit questionnaire, histoire de l'amener à nous dévoiler quelques-unes des exclusivités du livre.

1 À l'occasion de la parution du 12e guide des vins, La Sélection Chartier 2008, quelle évaluation faites-vous de la qualité générale des vins accessibles aux Québécois?

«Du début du mois de mai au début octobre 2007, le coeur de mon désormais marathon annuel de dégustations, j'ai été surpris de constater la hausse de qualité générale des vins. Après en avoir dégusté plus ou moins 3000, j'y ai trouvé des vins plus nets et plus précis, sans déviations aromatiques, moins d'échantillons que l'an dernier à être marqués par le SO2, et une baisse considérable de défauts liés au bouchon de liège. Donc, dans l'ensemble, une qualité qui monte, chez les meilleurs, bien sûr!

2 De toute évidence, le style des vins a beaucoup évolué ces dernières années, tout comme les tendances de la gastronomie. Vous traitez de ce sujet abondamment dans cette nouvelle édition 2008 de La Sélection Chartier. Quels impacts ces changements ont-ils sur le rapport vins et mets?

«Depuis une dizaine d'années, alors que le style des vins se concentrait et que le niveau d'alcool s'élevait de plus en plus, la cuisine, elle, prenait un chemin toujours plus épuré et allégé. Plus de 75% des plats proposés sur les cartes des restaurants des grandes villes du monde sont construits pour s'unir au vin blanc et non au vin rouge. Et ce, pendant que la clientèle désire boire rouge dans 80% des cas. Doit-on, alors, effectuer un remodelage des habitudes de consommation, afin de proposer à cette nouvelle clientèle des vins qui s'uniront le mieux à la cuisine, en fonction du goût de l'heure, ou faut-il plutôt redéfinir la place du vin à table en fonction de l'assiette de l'amateur de vin du XXIe siècle? Voilà d'où me vient l'inspiration pour mes nouvelles recherches harmoniques.»

3 La technologie est omniprésente dans notre société et la viniculture n'y échappe pas, dans le domaine de l'obturation des bouteilles notamment. Assisterons-nous bientôt à une véritable révolution dans ce domaine?

«La fameuse capsule à vis Stelvin est utilisée depuis plus d'une vingtaine d'années en Suisse (80% des vins en sont obturés), et plus récemment en Nouvelle-Zélande (pour 90% des vins) et en Australie (50%). Cette année, dans La Sélection 2008, j'ai décidé d'ajouter, à la fin de chaque description, la désignation (capsule à vis), afin de mettre en évidence le nombre de vins obturés par ce bouchon révolutionnaire. La plupart des vins ne nécessitant plus de tire-bouchon proviennent des pays du Nouveau Monde, avec 113 vins obturés par la capsule à vis, contre seulement 39 vins pour la Vieille Europe. Ce taux d'utilisation est encore faible, mais en forte hausse, lorsque l'on compare ces 152 vins à capsule au nombre de vins sous liège commentés (1500 vins) dans la 12 édition de La Sélection - un ratio de 10%.»

4 On parle beaucoup des changements climatiques. Ont-ils déjà un impact sur l'industrie vinicole? En auront-ils davantage à l'avenir?

«En avril 2007, lors d'une rencontre privée avec Miguel Torres, dans son domaine au sud de Barcelone, il m'a confié que d'ici plus ou moins cinq ans de nouvelles législations européennes obligeront les producteurs de vins à participer à l'effort général de diminution des émissions de gaz à effet de serre en leur demandant d'établir un bilan carbone de leurs activités. Ils devront alors indiquer sur chaque étiquette le taux de CO2 engendré dans la production de chaque bouteille de vin. Miguel Torres s'apprête même à acheter des terres dans les Pyrénées afin de contrer la chaleur excessive et la sécheresse omniprésente en Espagne. Sa société a déjà injecté plus ou moins 10 millions d'euros dans un projet de sauvegarde du climat (reboisement des vignobles, réutilisation des eaux usées et des eaux de pluie, toit vert sur les nouveaux chais, système de climatisation naturelle, etc.). Plus que jamais, la viticulture est sensibilisée aux bouleversements climatiques en cours et à venir.»