Une revue jésuite milanaise se prononce en faveur de la reconnaissance officielle des unions homosexuelles. Il n'est pas nécessaire de réviser la position catholique sur l'homosexualité - un «désordre» selon le magistère - pour considérer qu'une telle reconnaissance est bénéfique pour la société, parce qu'elle «stabilise» les relations homosexuelles et impose aux deux membres du couple une obligation de «solidarité» l'un pour l'autre.

«En partant des positions du magistère, nous avons exploré s'il est possible de soutenir la reconnaissance d'un lien stable entre deux personnes, même si elles sont du même sexe, non sur la base de la connotation sexuelle de ce lien, mais plutôt de son intérêt social et constitutionnel», explique l'un des coauteurs, Carlo Casalone, de la revue Aggiornamenti sociali.

Avec beaucoup d'habileté, le père Casalone a appuyé sa réflexion sur une phrase du cardinal Camillo Ruini, qui intervient souvent dans les débats sociaux italiens pour défendre les positions du Vatican. À l'occasion d'une tirade contre les unions homosexuelles, Mgr Ruini avait indiqué qu'il était hors de question de les comparer au mariage et à la famille, et que toute solution aux revendications des homosexuels devait «préciser les devoirs et non seulement les droits» de ces derniers.

Reprenant la balle au vol, l'essai avance que des relations homosexuelles stables impliquent des «droits et des devoirs» vis-à-vis de la société. Par contre, pas question de définir ces droits et devoirs. «C'est un travail juridique plus technique», explique le père Casalone.

L'approche rappelle une solution trouvée par le cardinal William Levada quand il était cardinal de San Francisco, au milieu des années 90. Mgr Levada faisait face à la menace d'une poursuite judiciaire pour forcer le diocèse à respecter un règlement municipal imposant aux régimes d'assurances de reconnaître les couples homosexuels. Il avait proposé avec succès que les employés du diocèse puissent désigner comme co-bénéficiaire de leurs assurances quiconque habitait avec eux. Ce compromis l'a rendu suspect aux yeux des partisans d'une stricte adhésion aux dogmes catholiques, qui ont été déçus quand le pape Benoît XVI l'a nommé à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi, responsable du maintien de la discipline au sein de l'Église.

«Le contexte est différent, commente le père Casalone. L'accent était alors mis sur la revendication de droits plutôt que sur la prise en charge de devoirs, ce qui est au contraire l'un des points les plus forts de notre réflexion. Nous voulons trouver une manière de garantir, pour les gens qui vivent ensemble, une solidarité réciproque, une solution qui protège les plus faibles. Mais il est vrai que Mgr Levada a proposé une solution qui va au-delà de la connotation sexuelle du lien entre un employé de son diocèse et la personne désignée comme co-bénéficiaire des assurances. C'est aussi un élément clé de notre réflexion.»

Cette prise de position ne surprend pas le vaticaniste John Allen, de l'hebdomadaire américain The National Catholic Reporter. «Il y a au sein de l'Église des gens qui ne veulent rien savoir des unions homosexuelles de peur d'affaiblir le magistère. Mais il y a aussi des gens, assez haut placés, qui pensent que le vide juridique actuel crée des injustices auxquelles il faut remédier, et que cela ne remettra pas en question la morale sexuelle catholique. Je ne pense pas que le pape tranchera dans un sens ou dans l'autre. Il laissera ça à son successeur, pour laisser mûrir les opinions.»

Préservatifs pour sérodiscordants

À peine nommé, en 2005, le pape Benoît XVI a commandé une étude sur l'utilisation des préservatifs par les couples hétérosexuels sérodiscordants, où l'un des deux membres est atteint du sida. Après une année de réflexion, la Commission pontificale pour la pastorale des services de la santé a rendu son verdict: d'accord pour les préservatifs dans ce cas précis, parce que l'objectif n'est pas d'empêcher la procréation, mais surtout de protéger la santé. Depuis, le dossier semble mort.

«Benoît XVI a donné un signal clair qu'il voulait une vraie réflexion sur la question en donnant le mandat de l'analyse à la Commission pontificale plutôt qu'à la Congrégation pour la vie, qui a beaucoup plus tendance à voir ce genre de question sous l'angle de la morale sexuelle», a expliqué le vaticaniste John Allen, de l'hebdomadaire américain The National Catholic Reporter.