Le musée du design Victoria and Albert s'est mis à l'heure olympique. L'exposition Mode c. sport permet de découvrir aussi bien des «survêtements» Yves Saint Laurent que des photos de David Beckham en slip.

L'exposition Mode c. sport du musée V&A de Londres a beau être haute en couleurs, la première chose qui frappe en entrant, c'est l'odeur. Une odeur artificielle de sueur flotte dans la grande salle d'exposition.

Pas aussi désagréable que ce que l'on pourrait craindre, le «parfum» - créé en synthétisant de la sueur de sportifs - est censé «réinjecter le corps humain» au coeur de l'exposition. Une manière de rappeler que si les vêtements sportifs se font de plus en plus glamour, leur fonction principale est encore de faire suer.

Ironiquement, la première pièce de l'exposition montre que le mariage entre mode et sport peut parfois mener à des flops retentissants. En 2004, l'équipe de soccer du Cameroun a en effet dû payer une amende de plus de 150 000$ pour avoir porté un uniforme «révolutionnaire» de Puma. Composé d'une seule pièce, l'UniQT contrevenait aux règles de la Fédération de soccer.

Mais cette faute - tant sportive que de goût - n'a certainement pas ralenti le rapprochement entre les deux industries au cours des dernières années. «Je crois que les marques de mode sont aussi avides de produire des collections sportives que les marques sportives le sont de collaborer avec des designers de mode», assure Ligaya Salazar, curatrice de l'exposition.

Salazar croit que les sports ont eu une influence déterminante sur la mode du XXe siècle. Plus pratique, moins contraignante, la mode s'est décontractée, tandis que les vêtements de sport se sont mis à avoir plus d'allure. Après tout, comme l'a fait remarquer aux sportifs la designer britannique Stella McCartney: «Il n'y pas d'excuses pour des silhouettes pauvres et de mauvaises couleurs, elles ne vous font pas courir plus vite.»

Outre la fameuse combinaison LZR Racer de Speedo - portée notamment par Michael Phelps aux Olympiques et designée en partenariat avec Comme des Garçons -, l'exposition présente plus de 200 vêtements, souliers et accessoires. Toutes ces pièces montrent comment les designers de mode ont tantôt repris, tantôt détourné, les codes du vêtement sportif.

Dans le lot, il y a évidemment les créations aventureuses d'Yohji Yamamoto et les petits shorts pastel de Stella McCartney pour Adidas. Mais la vraie vedette de l'expo reste toutefois le traditionnel survêtement de coton gris. Réinterprété en version XXXL par Vivienne Westwood, il est joliment transformé en combinaison chic par Stefano Pilati pour Yves Saint Laurent.

Si la mode et le sport flirtent l'un avec l'autre depuis les années 20 (avec l'entrée du polo dans la garde-robe masculine), «la relation entre les deux industries s'est intensifiée au cours des 20 dernières années», précise Liagya Salazar.

Paradoxalement, ce ne sont ni les designers ni les grandes marques sportives qui sont à l'origine de ce rapprochement. Ce sont d'abord les pionniers du hip-hop qui ont introduit des vêtements sportifs dans leur garde-robe. Quelques photos de Jameel Shabazz rappellent d'ailleurs ces heures glorieuses où il était «coolissime» de porter un bandeau éponge et des espadrilles Adidas dans les rues de Harlem.

Fier descendant de cette tradition, le rappeur britannique Niyi arbore un look fortement influencé par les vêtements de sport. Sur une des photos de l'exposition, on peut notamment le voir dans un spectaculaire pantalon de jogging créé par le designer Jeremy Scott pour Adidas.

Pourquoi apprécie-t-il tant les vêtements de sport? «J'aime bien le genre de signal que cela envoie», explique-t-il. Anticonformiste, il dit aimer l'idée de faire un pied de nez aux esclaves de la mode en mariant des vêtements et des couleurs qui ne se marient normalement pas.

Mais ces derniers étaient quand même fortement représentés parmi les visiteurs de l'exposition. Après tout, ne faut-il pas être un peu esclave de la mode pour s'extasier devant une planche de surf signée Chanel?