«J'essaie d'apprendre... mais c'est difficile, il y a tellement de vins, tellement de pays qui font du vin maintenant!» me disait récemment un collègue journaliste.

Le consommateur québécois a en effet aujourd'hui le choix entre plusieurs milliers de vins, de multiples pays, de l'Argentine au Liban, en passant par l'Allemagne, la France, l'Espagne, la Grèce, l'Italie, etc.

Comment faire? Comment aborder un monde à ce point complexe?

Il y a pourtant moyen de se retrouver dans ce qui peut sembler au premier abord un dédale inextricable.

Voyons donc, en ce début de rentrée, l'une des manières les plus simples, et les plus sûres, d'y arriver.

La clé est à mon avis d'y aller par les cépages, c'est-à-dire par le biais des variétés de raisins avec lesquelles sont faits les vins.

Au départ, la sagesse est de s'en tenir aux cépages les plus connus et cultivés dans de nombreux pays. Soit, pour les vins blancs, le Chardonnay, le Riesling et le Sauvignon blanc. Puis, pour les rouges, le Cabernet Sauvignon, le Merlot, le Pinot noir et la Syrah (ou Shiraz, comme disent les Australiens et les Sud-Africains).

Pour chacun de ces cépages, on goûte au moins quatre vins différents (ou davantage, ce qui est mieux encore), d'autant de pays.

Ainsi, pour le Chardonnay, on goûtera un vin d'Australie, un autre d'Afrique du Sud, un du Chili, un du Languedoc, un autre encore de la Bourgogne, par exemple un Chablis, et ainsi de suite.

Ce qu'on apprend ainsi a vite fait de nous sauter aux yeux!

En bref: on voit les différences entre les vins, on a une première idée de ce que peut être un vin de Chardonnay d'Australie, boisé et très goûteux normalement, et un Chablis non boisé, délicat, subtil, mais élaboré pourtant lui aussi avec du Chardonnay.

Même chose pour les vins de Cabernet Sauvignon, un cépage facile à cultiver - comme le Chardonnay - et qui est planté dans de nombreux pays.

On peut goûter ainsi, de ce cépage, des vins d'Argentine, d'Australie, de Californie, du Chili, de France (de Bordeaux et du Languedoc), d'Italie, etc.

Dans tous les cas, l'idéal est bien sûr de les goûter côte à côte, soit seul, soit avec des amis ou des parents.

Mais on peut aussi les déguster un à un, par exemple avant le repas du soir, de préférence en quelques jours d'affilée, pour garder tous les vins en question bien en mémoire. Ainsi, en quatre ou cinq jours consécutifs, on déguste autant de vins d'un cépage donné.

Bref, par ces dégustations répétées et systématiques, on obtient peu à peu un portrait de ce que peut être la diversité de la production mondiale, on s'initie à la notion de style.

Car même si à l'heure actuelle les vins d'un même cépage de différents pays ont souvent tendance à se ressembler (la mondialisation existe aussi dans le vin), reste qu'il subsiste ce qu'on pourrait appeler des caractéristiques nationales.

Exemple, les vins de Cabernet Sauvignon.

Ceux du Chili ont en règle générale quelque chose d'un peu végétal; ceux d'Argentine ont des saveurs plus mûres; ceux d'Australie se présentent bien souvent avec des arômes d'eucalyptus ou de menthe; ceux du Bordelais sont normalement plus austères que les autres, sans le côté très mûr de ceux d'Afrique du Sud ou de Californie, etc.

Même chose pour les vins de Syrah, pour ceux de Merlot, pour ceux de Sauvignon blanc, etc.

Chaque pays (mais pas toujours) a plus ou moins un style de vin qui lui est propre.

Tout ce qu'on peut apprendre par ce simple moyen est donc considérable - même sans avoir suivi de cours de dégustation au préalable.

Mais - mais! - pour que tout cela soit vraiment profitable, il est important de faire au moins une courte note (par exemple dans un carnet destiné uniquement à cet usage) sur chaque vin qu'on goûte. Sinon, on oublie.

La note peut se résumer à ceci: le nom du vin et le millésime, son prix, la date où on l'a dégusté, et un très bref commentaire, par exemple si on l'a aimé ou pas, et ce qui nous a frappé dans le vin en question.

Enfin, si possible, on goûte avant de passer à table, avant l'apéritif et, le cas échéant, les hors-d'oeuvre, pendant qu'on a la bouche vierge.

Ces deux choses (la dégustation et la prise de notes) sont encore plus profitables si, au surplus, on lit sur le vin.

L'un des sujets sur lequel lire en priorité est bien sûr la dégustation. (Il y a de nombreux ouvrages sur le sujet - à chacun de trouver celui qui lui convient en les consultant dans une bonne librairie.)

Il est aussi fortement recommandé d'avoir toujours un ouvrage de référence à portée de la main.

Exemple, et très bien fait, le Petit Larousse des vins, ou encore L'Atlas mondial du vin (Flammarion), de Hugh Johnson et Jancis Robinson. Mais, en matière d'ouvrages de référence, on a également l'embarras du choix.

Bref, on déguste disons un vin de Cabernet Sauvignon d'Argentine, et on en profite pour lire par la suite quelques pages sur les vignobles de ce pays.

Une remarque, enfin: comme en toute chose, il faut y mettre le temps et être patient, en évitant de penser qu'on peut tout apprendre en un tournemain.

«C'est en forgeant qu'on devient forgeron», dit le proverbe.

C'est la même règle qui s'applique pour le vin... Finalement, il faut se rappeler que tout cela est au fond moins compliqué qu'on ne peut le penser à première vue.

Des cours sur le vin

La SAQ donne, entre autres, des cours d'initiation à la connaissance des vins, qui sont également une très bonne façon de s'y retrouver. Voir le site www.saq.com à la rubrique "cours sur le vin".

Il y en a d'autres, donnés à Montréal et ailleurs par des particuliers ou des organismes. Notamment les suivants:

- Amicale des sommeliers du Québec donne elle aussi des cours un peu partout au Québec à partir de lundi 10 septembre, consulter le site www.amicaledessommeliers.ca;

- Allan Laforest, quatre soirées à partir du mardi 18 septembre, 19h à 21h30, 257, rue Dante, à Montréal; 165$ taxes comprises. Info: 514-388-5164 et www.degustationslaforest.com;

- Les Conseillers du vin, qu'anime Nick Hamilton, cinq soirées à partir du mardi 25 septembre, 19h à 21h 30, 6417, rue Saint-Denis, à Montréal; 175$ plus taxes. Autres cours sur différents vignobles de France, mais aussi en anglais. Info: 514-271-2175 et www.lesconseillersduvin.ca.

DÉGUSTÉS POUR VOUS

Mâcon-Uchizy 2006 Gérald & Philibert Thalmard. Vin de Chardonnay non boisé, toujours fiable et égal à lui-même, très Chardonnay au nez, ample, moelleux, bien en chair et aux saveurs relevées. Fort bon. S, 882381, 19,95 $, ** 1/2, $$, 2007-2008.

Douro 2004 Quinta de la Rosa. Vin rouge portugais, d'une couleur pourpre-prune soutenue et au bouquet de bonne ampleur, de petits fruits rouges et noirs, avec des notes épicées-boisées bien présentes. Élaboré avec quatre cépages du Douro, dont de la Touriga Nacional, il ne manque ni de chair ni de corps, et ses tannins sont fermes. Sérieux. S, 928473, 20,55 $, ***, $$ 1/2, 2007-2010.

Saint-Joseph 2004 Les Coteaux Éric et Joël Durand. Très beau vin du nord de la vallée du Rhône, au bouquet distingué, de petits fruits noirs et aux nuances caractéristiques d'olives noires (la Syrah), moyennement corsé, aux tannins aimables. Une preuve de plus que qualité et concentration ne sont pas nécessairement synonymes. S, 10273379, 33,75$, *** 1/2, $$$ 1/2, 2007-2009.

Victoria 2004 Shiraz Deakin Estate. Vin rouge de Syrah d'Australie, aux arômes rappelant un peu la réglisse, le goudron, etc. Au plus moyennement corsé, souple, facile, c'est un vin à servir assez frais, à environ 13-14 degrés. C, 560821, 14,85 $, **, $ 1/2, 2007.

LA RECOMMANDATION DE LA SEMAINE

La concentration marquée de bon nombre de portos des types late bottled vintage et vintage peut rebuter certains consommateurs. Rien de tel dans le cas du tout dernier millésime (2001) du Late Bottled Vintage Graham's, qui est en voie de succéder au 2000, peu corsé, aux arômes et aux saveurs de petits fruits noirs. Vin qui a de l'éclat et au charme certain, il gagne à être servi assez frais, ce qui en exalte le fruit. Une preuve de plus que les millésimes modestes, comme le fut 2001 pour la région de production des portos - le Douro -, offrent eux aussi plus d'intérêt qu'on ne peut être porté parfois à le croire.

C, 191 239, 20,95$, ** 1/2,$$ 1/2, 2007-2009.