Le classement des grands crus classés de Saint-Émilion a été annulé par le tribunal administratif de Bordeaux, apprend-on mercredi auprès de Me Philippe Thévenin, l'avocat de quatre des huit châteaux qui avaient entamé la procédure.

«Cela signifie qu'il n'y a plus de grands crus classés de saint-émilion à partir du millésime 2006, car le jugement précise par ailleurs que le classement antérieur de 1995 est caduc», a expliqué Me Thévenin. Selon lui, le tribunal a estimé qu'il y avait eu rupture d'égalité entre les postulants, compte tenu des modalités de dégustation.

«La commission de dégustation avait créé deux groupes de vins à déguster: un premier groupe avec les vins déjà classés antérieurement, et un autre avec les nouveaux candidats au classement. Cela était de nature à créer une discrimination», a estimé l'avocat.

«C'est une vraie difficulté, dont nous espérons qu'elle ne sera que passagère. Nous attendons la réaction des ministères de l'Agriculture et de l'Economie, qui ont signé l'arrêté de classement annulé, et notamment de savoir s'ils vont faire appel», a commenté Nadine Couraud, la directrice du Syndicat viticole de Saint-Émilion. «Nous regrettons que ce bien collectif qu'est le classement soit mis à mal temporairement.»

La difficulté est réelle pour les propriétaires de grands crus classés qui doivent mettre actuellement en bouteilles leur millésime 2006. «Ils n'ont plus le droit d'utiliser la mention grand cru classé sur leurs étiquettes», a indiqué Me Thévenin. «Peut-être va-t-il y avoir un décret ministériel pour rétablir un classement et permettre de passer cette situation de crise, mais pour l'instant, on ne sait pas ce que sera demain», a admis Nadine Couraud.

Le classement des grands crus classés de saint-émilion a été créé en 1955, avec pour particularité d'être révisable tous les 10 ans. En 2006, sur 95 prétendants, 61 avaient été retenus, dont deux premiers grands crus classés A, Ausone et Cheval-Blanc, 13 premiers grands crus classés B, et 46 grands crus classés.

Huit candidats malchanceux avaient donc saisi le tribunal, dont Guy-Petrus Lignac, propriétaire de château Guadet-Saint-Julien. «Pour nous, commercialement, cela a été un désastre, alors que nous continuons à obtenir des distinctions internationales lors de dégustations à l'aveugle. Il faut maintenant se mettre autour de la table pour revoir complètement la procédure de classement», a-t-il proposé.