«Deux mille neuf est peut-être le meilleur millésime que j'ai dégusté en 32 ans à Bordeaux.»

Ça y est, les folies sont reparties chez nos amis bordelais. Il aura suffi de cette phrase prophétique de Robert Parker (et de la bénédiction de la communauté des grands dégustateurs réputés) pour que le plafond explose une fois de plus à Bordeaux.

La récession? La crise économique? Tout cela n'existe pas dans le monde parallèle des grands vins bordelais.

Quant aux actes de contrition des producteurs de cette région, qui avouaient il y a quelques années qu'ils étaient en train de tuer la poule aux oeufs d'or, oubliez ça! Quand il y a de l'argent à faire (et des consommateurs prêts à payer), pourquoi se priver?

Résultat: le prix des primeurs Bordeaux 2009 (ces vins goûtés en barrique, que l'on commande auprès de la SAQ trois ans avant de les recevoir) a explosé, parfois jusqu'à 400%!

La dernière fois qu'un tel tsunami avait frappé les amateurs de Bordeaux, c'était pour le millésime 2005, «peut-être le meilleur de tous les temps», avançaient certains spécialistes. Le même Robert Parker disait, du cru 2005: «Je n'ai jamais goûté tant de vins si extraordinairement riches, concentrés, massifs, si jeunes et déjà d'une telle précision, d'une telle fraîcheur et dotés de si nombreux tannins.»

Le résultat, à la caisse, avait été spectaculaire. Mais ce n'était rien à côté des 2009! Il est vrai que Bordeaux vient de connaître trois années plutôt ordinaires, mais qu'a-t-on trouvé dans les barriques, au printemps, pour que les prix atteignent la stratosphère?

Apparemment, le slogan voulant que la modération a bien meilleur goût ne s'applique qu'aux consommateurs, pas aux vendeurs.

Quelques exemples de prix de primeurs 2008 et 2009 à la SAQ:

- Château Haut-Brion: de 345$ en 2008 à 1375$ en 2009 (une augmentation de 400%);

- Château Ausone: de 895$ en 2008 à 2135$ en 2009;

- Château Cheval Blanc: de 795$ en 2008 à 1585$ en 2009;

- Petrus: de 795$ en 2008 à 1475$ en 2009;

- Château Lafite-Rothschild: de 325$ en 2008 à 1250$ en 2009;

- Château Latour: de 325$ en 2008 à 1375$ en 2009;

- Cos d'Estournel: de 159$ en 2008 à 480$ en 2009 (trois fois plus cher, trois fois meilleur?);

- Château Pichon-Longueville Comtesse de Lalande: de 99$ en 2008 à 295$ en 2009;

- Château Clinet: de 89$ en 2008 à 170$ en 2009

- Château Léoville-Barton: de 73$ en 2008 à 145$ en 2009;

Un rare exemple de modération: le Château Magdelaine, premier grand cru classé en Saint-Émilion, est au même prix que l'an dernier (85$).

Quelques comparaisons entre les prix de 2005 et 2009 démontrent que l'inflation augmente à un rythme accéléré dans le bordelais:

- Cos d'Estournel: 275$ en 2005; 480$ en 2009;

- Château Palmer: 349$ en 2005; 490$ en 2009;

- Lynch-Bages: 75$ en 2008; 180$ en 2009;

Conclusion: comme le veut le bon vieux dicton, les petites années, on achète les grandes maisons et les grandes années, on achète les petites maisons. Avant de placer votre commande, fouillez l'offre de la SAQ et celle de la LCBO (sa cousine ontarienne) et comparez les prix.

Et puis, si les prix des Bordeaux 2009 vous effraient, regardez ailleurs, comme du côté des Côtes-du-Rhône 2007 (une année exceptionnelle), dont plusieurs bouteilles sont offertes en ce moment au Québec.