Il est arrivé qu'un vin à 15 $ soit jugé meilleur que des vins à 100 $ lors de dégustations à l'aveugle. Ou encore, que le même vin soit jugé de façon complètement différente selon le prix annoncé: très ordinaire lorsqu'on le présentait avec un bas prix, et excellent avec un prix élevé. Du coup, on proclame haut et fort que tous les critiques de vin, les sommeliers et autres professionnels ne racontent que des histoires et qu'on devrait tous boire du vin à 10 $ parce que personne ne sait réellement faire la différence entre un bon vin et un moins bon.

Le prix offre une certaine indication de qualité. En général, les vins qui offrent les meilleurs rapports qualité-prix se situent entre 15 et 60 $. Au-delà, on entre dans le monde des produits de luxe et on commence à payer pour le prestige et la rareté. En deçà de 15 $, on est dans le monde des vins industriels, élaborés dans une optique complètement commerciale, comme des croustilles ou des barres de chocolat. Oubliez les belles histoires de terroir et de vigneron, ce sont des vins élaborés sur mesure, selon des résultats d'études de marché et de tests auprès des consommateurs.

Pour tenter d'évaluer la qualité des vins, on a développé la dégustation analytique, aussi appelée évaluation sensorielle, parce qu'on évalue le vin avec la vue, l'odorat, le goût et le toucher. Le but est d'être le plus objectif possible: évaluer le vin pour ses qualités intrinsèques, en faisant abstraction de son nom, de son prix, de sa réputation. Pour ce faire, on déguste les vins à l'aveugle. Mais on contrôle aussi l'environnement de la dégustation: pas de couleurs - de préférence des murs blancs et une lumière naturelle -, pas de bruit et, bien sûr, pas d'odeur.

Bref, les dégustations se déroulent dans un cadre plutôt aseptisé, puisque notre environnement influence énormément nos sens, donc notre façon de sentir et de goûter. Nous sommes des êtres multisensoriels: nos sens n'existent pas séparément, mais s'influencent mutuellement. Ainsi, les couleurs peuvent affecter le goût et les sons peuvent altérer notre perception d'une odeur.

Une évaluation nécessaire?

Mais considérant tout ce qui peut influencer nos perceptions, est-ce qu'une évaluation totalement objective est possible ? Et est-elle vraiment nécessaire? Faire des tests hyper objectifs pour évaluer la qualité d'un lave-vaisselle ou d'une tondeuse à gazon, ça se comprend. Mais essayer d'en faire autant pour le vin, ça semble plutôt insensé. C'est comme admirer un tableau sans rien savoir du peintre, de sa démarche, de la période à laquelle il l'a peint ou dans quel contexte. Ce n'est pas du tout la même expérience.

Pensez au cadre aseptisé de la dégustation analytique: dans la vraie vie, personne ne déguste comme ça ! Quand on consomme du vin, c'est le plus souvent entouré de gens, de bruits, d'odeurs, de couleurs. Et de nourriture. Ça fait partie des plaisirs du vin.

La dégustation analytique est une excellente façon de développer ses capacités de dégustateur. On apprend sur le vin, mais encore plus sur nous-mêmes, sur nos sens, nos seuils de tolérance à certains goûts, à certaines odeurs. On devient sans aucun doute meilleur dégustateur. Mais est-ce réellement la meilleure façon de juger la qualité d'un vin?

Notre évaluation d'un vin peut aussi différer d'un jour à l'autre. Ce n'est pas tant un signe d'incompétence que la révélation de la complexité de l'analyse sensorielle. Il est tout à fait normal de déceler des arômes de pomme dans un vin, et un autre jour d'y sentir de l'ananas. En tant qu'individus, nous goûtons tous différemment. La recherche d'une objectivité totale est dès lors peut-être futile.

L'évaluation de la qualité d'un vin reste encore hautement subjective. Raison de plus pour oublier nos complexes par rapport au vin, et boire ce qui nous fait envie. Un bon vin, c'est celui qui nous procure du plaisir. Et, comme je le disais dans ma toute première chronique, je crois sincèrement que le plaisir croît avec la connaissance: plus on en sait au sujet d'un vin, plus notre appréciation s'en trouve enrichie. Et si le vin qui vous fait plaisir aujourd'hui n'est pas le même la semaine prochaine, ça n'enlève rien du tout à sa qualité!

Quatre vins à découvrir

Domaine de l'Ancienne Cure Jour de Fruit Bergerac Sec 2016


Élaboré avec les cépages blancs principaux de la grande région de Bordeaux: 70 % de sauvignon blanc et 30 % de sémillon. On y retrouve tous les arômes très frais du premier, avec des notes d'agrumes et de buis. Puis, le sémillon apporte quelques notes miellées et un peu plus de texture, de rondeur en bouche. Frais, joliment fruité et d'une très bonne tenue en bouche, il accompagnera un plateau de fruits de mer, une salade de fenouil et orange, un tartare de poisson.

18 $ (12594598) 13 %

Emrich-Schönleber Nahe Riesling Trocken 2015

Faire connaître les vins allemands est une de mes obsessions. Tellement de fausses idées circulent alors qu'il y a tant d'excellents vins, et à bon prix! Si le sucre vous fait peur, n'ayez crainte ici: trocken veut dire sec. Une grande impression de fraîcheur au nez et en bouche, avec des arômes de pomme verte, d'agrumes et de fleurs blanches. Racé et tonique, il réveille les papilles et donne envie de manger ! Avec des crevettes grillées, des pétoncles poêlés sur purée de petits pois à la menthe, ou tout simplement un poisson grillé parfumé à la lime et au romarin.

22,15 $ (12892712) 12 %

photo fournie par la SAQ

Domaine de l'Ancienne Cure Jour de Fruit Bergerac Sec 2016

Jean-François Mérieau Le Bois Jacou Gamay Touraine 2015

Énorme coup de coeur pour ce gamay de la Loire! Des arômes affriolants de petits fruits rouges aigrelets, de la fraîcheur et du tonus. Savoureux et léger, à peine tannique, c'est un véritable vin de soif et un vin d'été par excellence. À servir légèrement rafraîchi avec un plateau de charcuteries ou des saucisses au barbecue. Il sera aussi tout à son aise avec des poissons grillés. Très passe-partout.

20,30 $ (12572858) 12 %

Luciano Sandrone Dolcetto d'Alba 2015

La région du Piémont, en Italie, regorge de cépages plus fascinants les uns que les autres. Le nebbiolo, bien sûr, qui produit les grands vins que sont le Barolo et le Barbaresco, mais une foule d'autres, à l'origine de vins de caractère à plus petits prix. C'est le cas de ce délicieux Dolcetto, d'un excellent producteur qui combine tradition et modernité. Une couleur violacée profonde. Un nez riche et complexe où se mêlent des tonnes de fruits, rouges et noirs, frais et confiturés, rehaussé de délicates notes florales. La bouche démarre sur une très jolie trame fruitée, mais portée par une structure solide, avec des tanins bien présents, mûrs, serrés. Puis une longue finale, fruitée, minérale et savoureuse. Un vin qui appelle la nourriture, et qui saura accompagner vos plus belles pièces de viande rouge au barbecue.

23,50 $ (10456440) 13 %

photo fournie par la SAQ

Jean-François Mériault Le Bois Jacou Gamay Touraine 2015