Vinificateur réputé, le Bordelais Stéphane Derenoncourt, dont les talents sont sollicités un peu partout sur la planète, est en passe de modifier la conception qu'on se fait du plus célèbre cépage de Toscane, à savoir le Sangiovese.

Consultant auprès de deux domaines toscans - Tenuta La Novella, inconnu au Québec, et Fattoria La Massa, de Giampaolo Motta, bien connu des amateurs québécois celui-là -, il vinifie en effet le Sangiovese de telle manière que ce cépage prend, sous sa direction, un tout autre aspect que celui qu'on lui connaît.

Cépage «rustique», comme il le dit, donnant dans bien des cas des vins aux tannins rudes, astringents, il acquiert en effet, grâce à sa méthode de vinification, une surprenante distinction.

Exemple (il s'agit d'un échantillon tiré du fût), le 100% Sangiovese 2011 de la Fattoria La Massa, d'un beau rouge soutenu, au bouquet net, et même pur, de fruits rouges, d'une bonne concentration et à la texture serrée, dépourvu de toute rudesse, et sans rien de massif ou de trop concentré.

Bref, de quoi souhaiter que ce domaine se décide à élaborer un vin rouge fait que de Sangiovese! Alors que son Toscana 2009 La Massa (voir plus bas), présentement en vente, en renferme 70%, le reste de l'assemblage étant constitué de cépages bordelais.

Consultant à Fattoria La Massa depuis le millésime 2009, Stéphane Derenoncourt estime que la clé, afin (pour ainsi dire) d'anoblir le Sangiovese, est de ne pas trop extraire.

Ceci, dit-il en substance, est le contraire de ce que prêchent certains commentateurs, tels l'Américain James Suckling, qui a une maison en Toscane, lequel incite les producteurs à extraire le plus de matière possible de ce cépage.

Ne pas trop extraire, dit Derenoncourt, afin de contourner les problèmes que présente ce cépage. À savoir, d'abord, qu'il y a beaucoup d'hétérogénéité dans les raisins d'une même grappe, à cause de la forme de celle-ci.

«Il y a des différences de maturité énormes», dit-il. Ainsi, des raisins de la partie extérieure pourront être mûrs, mais d'autres seront verts, immatures, au coeur de la grappe.

Deuxième problème: «Le pépin du Sangiovese n'est jamais parfaitement mûr.» Résultat, les tannins qu'on peut en extraire sont forcément rugueux.

D'où sa méthode. Les raisins ne sont pas foulés, notamment pour éviter d'extraire les tannins amers des pépins. La période de cuvaison est réduite, la remise en contact des matières solides qui s'agglomèrent au haut des cuves - le chapeau - avec la partie liquide, à intervalles réguliers, est faite tout en douceur, par pigeage (on disloque le chapeau et on l'enfonce dans la partie liquide).

Total, un vin de Sangiovese méconnaissable, dépourvu de rugosité, tout à fait délicieux.

«J'ai fait des micro-vinifications de Sangiovese à la Tenuta La Novella, et c'est comme ça que j'ai appris», signale Stéphane Derenoncourt venu au Québec fin février avec Giampaolo Motta et qui a donné des séminaires de formation aux conseillers de la SAQ.

Toscana 2009 IGT La Massa, 25,75$ (10517759), HHH,$$$, 2012-2015.

D'un pourpre soutenu, c'est le premier millésime de La Massa pour lequel Stéphane Derenoncourt a été consultant. Le bouquet, de fruits noirs et rouges, est de bonne ampleur, plutôt d'une pièce pour l'instant. D'une bonne concentration, nettement plus que moyennement corsée, la bouche est bâtie sur des tannins qui ont de la fermeté, mais dépourvus de rudesse. Très bon. 70% Sangiovese, 20% Merlot et 10% Cabernet Sauvignon et Petit Verdot, avec élevage en fûts de chêne français, dont 20% de neufs. 14% (486 caisses).

Corbières 2007 Cuvée Simone Descamps Château de Lastours, 19,05$ (11367473), ***,$$, 2012-2013.

D'une couleur pourpre-prune et bien coloré sans qu'il soit opaque, ce vin de Syrah, de Grenache et de Carignan se présente avec un bouquet... particulier, relevé par des notes rappelant, curieusement, quelque chose comme la cire (le Carignan?), avec aussi des notes épicées - des odeurs de garrigue, dit-on. De corps moyen, ne manquant pas de matière, ses tannins sont aimables, l'élevage se faisant en fûts de chêne français. 14,5%

(81 caisses).

Brouilly 2009 Henry Fessy, 20,60$ (11589842), ***,$$ 1/2, 2012-2013.

Savoureux beaujolais, d'un grand millésime pour ce vignoble, et dont le bouquet, dépourvu de toute note végétale, associe les petits fruits rouges à des arômes de prunes rouges. Légèrement tannique, il a du corps pour un Brouilly, de l'éclat et un bon goût de fruit. 13,5% (96 caisses).

Mercurey 1er cru Clos des Myglands Faiveley, 32$ (147959), ****,$$$ 1/2, 2012-2016.

Bourgogne rouge de charme, également d'un grand millésime, son bouquet, irrésistible, pur, nuancé, fait... saliver. Moyennement corsé, ses tannins sont tendres, ses saveurs tout aussi pures que l'annonce le bouquet. Superbe. Élevage en fûts de chêne français, dont le tiers de neufs. Il en reste trop peu, hélas! 13% (43 caisses).

Mercurey 1er cru Les Ruelles 2009 Château de Chamirey, 41,75$ (11629808), ****,$$$$, 2012-2017.

Goûté côte à côte avec le précédent, il est un peu plus coloré, le bouquet plus large, séduisant, de petits fruits rouges et noirs. Dense, relativement corsé comme bourgogne, charnu, il est tannique, mais sans dureté. Excellent. Élevage en fûts, dont 30% de neufs. 13,9% (88 caisses).