Blonde, brune, ambrée ou fruitée... la bière belge n'a jamais été aussi populaire à l'étranger, un succès construit depuis des siècles par des brasseurs de taille mondiale, mais aussi par une multitude de brasseries traditionnelles, notamment des monastères.

«La bière est à la Belgique ce que le vin est à la France. Elle offre une véritable identité à notre petit pays», explique Sven Gatz, le directeur de la fédération des brasseurs belges.

Avec une réussite croissante, car les exportations de bière ont bondi de 70% au cours des dix dernières années. 62% des 19 millions d'hectolitres produits en 2012 ont été vendus hors du royaume, selon les statistiques de la fédération.

«La bière belge a réussi à profiter pleinement du boom global de la bière grâce à sa bonne image et à la force de son industrie brassicole, qui s'est tournée vers l'exportation pour compenser le recul de la consommation dans notre pays», explique Vincent Caulier, patron de la brasserie familiale du même nom.

Cette évolution est quasi générale parmi les 150 brasseries en activité dans le royaume, du géant AB InBev, avec ses marques Leffe, Hoegaarden ou Stella Artois, aux brasseries familiales et régionales.

Ensemble, elles proposent plus de 1100 bières différentes, de la «pils» (blonde) de comptoir aux bières plus sucrées ou houblonnées, à la mode actuellement.

«On trouve de très bonnes pils dans quasiment tous les pays, mais la production de bières spéciales demande un savoir-faire particulier, basé sur des houblons, des levures et des techniques spéciales, comme la refermentation en bouteille», souligne Olivier Degehet, responsable commercial de la brasserie du Bocq, qui exporte la réputée Blanche de Namur.

Le succès de ces bières raffinées répond à une tendance de fond. «Dans les pays développés, les amateurs boivent en moins grande quantité, mais privilégient les bières spéciales, plus typées», souligne M. Gatz.

C'est notamment le cas en France, de loin le premier marché à l'exportation pour la bière belge avec 3,5 millions d'hectolitres en 2012. L'Hexagone devance les Pays-Bas, les États-Unis et l'Allemagne. Même le Japon est devenu un marché de poids, avec des volumes multipliés par quatre en trois ans.

Les brasseurs tirent parti de la mondialisation: «Les perspectives sont également très positives dans le reste de l'Asie et en Amérique latine, où les classes moyennes aiment se distinguer en découvrant de nouveaux produits étrangers», précise le patron des brasseurs.

Les bières trappistes montrent l'exemple

Parmi les marques les plus populaires figurent les bières trappistes, produites par des monastères selon de strictes règles établies depuis des siècles. La Belgique occupe une position de force avec six des huit «trappistes» du monde, dont les célèbre Chimay, Orval ou Westvleteren, cette dernière ayant été sacrée «meilleure bière au monde» par un site américain spécialisé.

«Le fait que la Chimay soit brassée dans un monastère est un avantage commercial dans certains pays, comme les États-Unis ou l'Italie. Mais ce n'est pas le cas dans d'autres, notamment en Chine», témoigne Jérôme Goffinet, chargé de la communication de l'abbaye ardennaise.

Au nombre de 22, les «bières d'abbaye», aux liens souvent distants avec des communautés monastiques, jouissent également d'une belle notoriété à l'étranger, comme la Grimbergen, l'Affligem ou la Tongerlo.

La plus connue reste la Leffe, au coeur de la stratégie développée par AB Inbev pour «s'adapter aux nouvelles modes de consommation de bière», selon une porte-parole du groupe. La gamme ne cesse de s'enrichir de variétés, comme la Nectar, la dernière née aromatisée au miel.

Le premier brasseur mondial cultive la popularité de ses bières dans ses Cafés Leffe, une enseigne de brasseries lancée en 1987, et ses Belgian Beer Cafés, qui «font la promotion des traditions culinaires belges» comme les moules-frites. Une cinquantaine de Belgian Beer Cafés prospèrent dans 18 pays, de la Hongrie à l'Australie en passant par Dubaï.

Malgré leur bonne santé, les brasseries belges, qui font travailler directement plus de 5000 personnes, «ne peuvent se reposer sur leurs lauriers», prévient Sven Gatz. Car, aux États unis comme en France, «les bières montent en gamme» avec la multiplication de micro-brasseries régionales qui surfent sur la mode du retour au terroir.