Nous avons découvert les produits de Fable Farm un soir de marché tenu à la ferme. Un soir magique, dans une verte clairière, sous une tente de cirque jaune et blanc. La rumeur des cidres fermiers des frères Piana s'était rendue jusqu'au Québec. Nous étions là pour voir ce qui faisait courir les foules.

«Ah! Vous connaissez Vanya!», nous a lancé un des frères, lorsqu'il a su que nous venions de Montréal. En effet, bien que nous n'ayons pas été envoyés par l'illustre sommelière et copropriétaire du restaurant Le Vin Papillon, nous connaissions Vanya. C'est d'ailleurs par l'entremise de l'agence qu'elle a fondée avec deux autres sommeliers, Charles Tarzi et Morgane Muszynski, que les bouteilles de Fable Farm débarqueront à Montréal d'une semaine à l'autre.

Il ne fallait pas plus que l'énumération de quelques amis communs pour que les frères barbus, chevelus et pieds nus se mettent à déboucher bouteille après bouteille. Ambroise, Lil'Dandy, Mamma Elder, Aïken, Fluxion ancestrale ne sont que quelques-unes des innombrables cuvées expérimentales de Fable Farm Fermentory.

Destinés aux buveurs de beaujolais naturels avec leurs notes parfois animales, de bières brettées ou sures et de kombucha, les cidres fermiers des frères Piana ne laissent pas indifférent. Ceux et celles qui ont déjà goûté à la déroutante mais combien délicieuse cuvée bio (et québécoise) Des bulles, genre, du Clos Saragnat, sauront de quoi nous parlons.

Macération sur les peaux de pomme, ajout de tiges et de feuilles de pissenlit, infusion de fleurs de lilas et de sureau, séances de percussions et de dynamisation dans le chai, etc.: on ne vous soûlera pas avec le menu détail de toutes les manipulations parfois ésotériques que Jon et Christopher imposent à leurs pommes. Des pommes sauvages du Vermont, qui plus est, puisque le verger du domaine vient à peine d'être planté.

Ce qui importe, c'est le résultat: des cidres vraiment surprenants, de la manière la plus positive et intéressante qui soit. Certaines cuvées flirtent un peu (beaucoup) avec l'acidité volatile. L'appréciation devient alors un peu (beaucoup) une question d'habitude et de goût. Les vinaigres à boire sont à la mode, après tout!

Apprendre «sur le tas»

En discutant avec Christopher, on apprend vite que le monde et le vocabulaire de la fermentation alcoolique étaient complètement étrangers aux deux jeunes jardiniers-cueilleurs lorsqu'ils ont commencé à passer un peu moins de temps au potager et un peu plus de temps dans la «cave». Ils ont tout appris «sur le tas», entre autres en discutant avec leurs voisins bien aimés... Deirdre Heekin et Caleb Barber, de La Garagista.

Leurs premières installations étaient dans le garage de Jon, au village. Mais c'est un bâtiment flambant neuf et une cave digne des vignobles les plus établis que nous visitons, au lendemain du marché Feast and Field.

Au-delà de leurs imperfections techniques, les nouvelles installations plus luxueuses ne semblent pas tout à fait assumées par Christopher l'anticonformiste. «Je ne veux pas que nous soyons connus comme étant les gars avec la cave super sexy!», avoue-t-il.

«C'est vraiment une période charnière pour Fable Farm, pour moi, pour Jon. On a peur de rater notre coup, mais en même temps, il faut que nous laissions tomber un peu de nos peurs et de nos insécurités pour mieux foncer.»

Le jour est presque arrivé où les cidres des frères Piana se retrouveront sur quelques-unes des meilleures tables de Montréal. Cette consécration suffira-t-elle à calmer les inquiétudes des cidriculteurs de garage? On le souhaite. Mais on souhaite surtout qu'ils continuent de nous envoyer du bon jus!

Les cidres de Fable Farm Fermentory arriveront au Québec sous peu, par l'entremise de l'agence Les vins Dame-Jeanne, qui importe également les vins de La Garagista. 

http://vindamejeanne.com/