Avec la baisse de la consommation intérieure et les succès des vins des Amériques, la France dépend de plus en plus des exportations pour commercialiser ses crus.

Aussi, vignerons et négociants misent beaucoup sur le premier salon Wine Paris qui réunit depuis lundi, pour la première fois dans la capitale, l'ensemble des terroirs viticoles français en un même lieu. Dans l'espoir de relancer les ventes à l'étranger.

«À Paris, il nous manquait un salon comme celui-ci», explique à l'AFP Thomas Laydis, du Château Roc de Calon, propriété familiale de Montagne Saint Émilion dans le Bordelais, dont il est en train de relancer la distribution.

«La France doit reprendre des parts de marché à l'export, et ce salon inédit doit aider à y parvenir», complète Pascale Ferranti, directrice du salon.

Selon elle, la France doit «réagir par rapport à toute la concurrence des marchés producteurs proches comme l'Espagne et l'Italie», mais «encore plus celle des vins lointains comme l'Australie ou le Chili qui sont très offensifs commercialement et progressent sur les grands marchés à l'export comme les États-Unis ou l'Asie».

Le sujet est d'autant plus sensible que vins et spiritueux représentent le second excédent commercial de la France, juste derrière l'aéronautique.

Lundi, le Comité interprofessionnel du champagne a lancé un discret signal d'alarme: les ventes de champagne ont baissé de 1,8 % en 2018, en raison essentiellement d'un recul de 4,2 % de la consommation de bulles en France, alors que les marchés hors Europe progressaient de 2,1 %.

Du coup, les exportations de champagne représentent désormais plus de la moitié des ventes totales: un «renversement de tendance par rapport au siècle dernier», selon le CIVC.

Pour l'ensemble des vins français, les chiffres totaux d'exportation en 2018 seront dévoilés mercredi par la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux.

Un vin français à 10 dollars, «c'est important»

Au premier semestre 2018, les exportations avaient reculé de 1 %, mais le chiffre d'affaires avait progressé de 5 % à 4,2 milliards d'euros, confirmant le positionnement de plus en plus luxueux des vins français à l'étranger.

Un état de choses que Valérie Pajotin, directrice de la fédération Anivin, essaie de combattre en faisant la promotion des «Vins de France».

Pour s'adapter aux marchés anglo-saxons, cette troisième catégorie de vins, lancée depuis dix ans, n'est pas liée à un terroir, mais d'abord à un cépage, chardonnay, sauvignon, cabernet franc, syrah, grenache, chenin ou le célèbre merlot.

Elle complète les traditionnels vins de terroir, signature des trois grands pays viticoles européens que sont la France, l'Italie et l'Espagne: AOC ou AOP (Appellation d'origine contrôlée ou protégée) et IGP (Indication géographique protégée).

«Et ils sont la seule catégorie en progression en France, représentant désormais 15 % des exportations de vins tranquilles (non pétillants, NDLR) en volume», souligne Mme Pajotin.

La France «est capable de servir toutes les tranches de marché et toutes les attentes de consommateurs, jusqu'aux vins ultra-élitistes qui sont les plus connus dans le monde entier, mais je pense que c'est important aussi qu'un consommateur, à 10 dollars, achète quand même du vin français», martèle Mme Pajotin.

Constat confirmé par Dionisio Chaves, sommelier brésilien consultant pour la chaîne de supermarchés brésiliens Zona Sul, qui dit-en français à l'AFP-être venu chercher à Paris «des vins de très bonne qualité à des petits prix».

«Les vins français ne représentent que 13 % du marché brésilien, alors que les chiliens sont à 53 %», dit-il.

Surfant sur l'appel du grand large, les vins de Loire, parfois boudés par les Français mais en plein renouveau, jouent à fond la carte de l'étranger. Les exportations d'anjou, saumur, touraine et muscadet ont doublé en volume et triplé en valeur en dix ans vers les États-Unis, selon l'interprofession InterLoire.

«Beaucoup des tendances nouvelles en France donnent le "la" pour les développements à venir dans le monde du vin», résume Bob Paulinski, acheteur pour le site Stellar Bottles à San Francisco.

Lui, ne cherche pas des vins de cépage, grande spécialité des vins américains.

Il goûte et achète des vins produits en biodynamie, avec des critères encore plus exigeants que le bio: «Les consommateurs veulent du vin propre, pur, et authentique [...] Ici, à Paris, on ne parle que de ça».