Désigné jeudi «homme de l'année» par la Revue du vin de France, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius se fait le promoteur de «l'oenotourisme» et plaide pour un meilleur référencement sur internet des vins français, grâce à des marques facilement identifiables.

Quelles sont vos priorités pour promouvoir le vin?

De très nombreux touristes viennent en France à la fois pour sa gastronomie et son vin. Ce sont des atouts considérables pour le tourisme, et d'une façon générale pour l'image de la France.

Dans le passé, on a eu souvent tendance à mettre l'accent sur la dimension du risque, de l'alcoolisme, etc. Je suis évidemment d'accord pour alerter sur les risques liés à l'excès de consommation d'alcool. Mais il ne faut pas confondre consommation excessive et dégustation raisonnable de produits de qualité. Il faut organiser à la fois l'appui à nos vignerons, à nos commerçants, à nos vignobles, et puis développer l'oenotourisme.

De très nombreuses régions en France présentent des vignes et des sites magnifiques, mais souvent les équipements hôteliers, les hébergements, sont insuffisants pour accueillir les touristes. Il faut développer les investissements, faciliter les financements. Au mois d'octobre prochain se tiendra la Conférence nationale du tourisme ; c'est un des sujets sur lesquels j'insisterai.

Il faut mettre en place des offres touristiques qui montrent que le vin, ce n'est pas simplement un produit à consommer, mais qu'il recèle une histoire, une culture, des traditions, une passion : les touristes apprécient ce type d'offre. Je me rends souvent en Asie, la notion de civilisation autour du vin attire énormément les personnes que je rencontre, avec d'ailleurs dans beaucoup de cas un rapprochement entre le thé et le vin.

Quels sont les défis auxquels font face les vins français à l'exportation?

Nous ne sommes que les troisièmes exportateurs en termes de volume, derrière l'Espagne et l'Italie, alors que ces pays ont des vignobles souvent de taille moins importante que les nôtres.

La question du référencement est centrale, il faut donc que les sites internet soient de qualité et faciles à trouver, par exemple avec des noms de marques identifiables. Il y a déjà des efforts qui ont été faits notamment par rapport à Bordeaux, marque mondialement connue. Les producteurs de petites séries et les différents châteaux ne manquent pas, mais les nombreuses appellations peuvent générer un peu de confusion et les gens ne s'y retrouvent pas toujours. Il faut à la fois faire vivre cette diversité, mais commercialement permettre les regroupements nécessaires. Là, il y a encore un travail important à faire.

Il doit y avoir, en quelque sorte, une porte d'entrée prestigieuse et connue. Les gens ne peuvent pas avoir à l'esprit la classification de 1855 de tous les crus de Bordeaux!

L'Élysée et Matignon ont vendu une partie de leur cave, à la différence du Quai d'Orsay. Comment gérez-vous cette cave, qui compte quelque 10 000 bouteilles? Et quels sont vos goûts en matière de vin?

Le Quai d'Orsay est le premier ambassadeur de l'excellence française, je tiens donc à ce que la cuisine et les vins servis ici soient de qualité. Nous achetons chaque année des vins, mais à des prix raisonnables. On ne peut plus servir des bouteilles aux prix inconsidérés.

Je bois peu, mais j'aime le bon vin. Je dois avouer un petit faible pour le Bordeaux. Je préfère le rouge et dans les champagnes, j'apprécie le champagne rosé. J'apprécie aussi particulièrement, dans les blancs, le Sauternes et les vins d'Alsace. Je suis assez curieux de ce qu'on me propose. Je goûte parfois dans mes voyages du bon vin. Par exemple, j'ai le souvenir d'avoir goûté lors d'une visite à Dijon un excellent Bourgogne et, lors d'un voyage au Chili il y a quelque temps, un vin qui était modeste et de grande qualité. Très souvent, c'est à partir de maîtres de chais français qui y ont travaillé. Mais il vaut mieux l'original!