2013 s'annonce comme un mauvais millésime pour les vignobles français durement éprouvés par les incidents climatiques des derniers mois, qui laissent de nombreux domaines en situation de détresse à l'heure des vendanges.

Selon les estimations de la filière présentées mercredi, la récolte devrait atteindre 43,5 millions d'hectolitres pour l'année, bien en dessous de la moyenne décennale de 45,4 millions alors que certaines exploitations en Vouvray et dans le Bordelais notamment ont vu leur production réduite à néant par la grêle.

Cette médiocre performance, que Jérôme Despey, président de la filière viticole de l'organisme public FranceAgrimer, attribue aussi aux températures fraiches et aux pluies excessives du printemps, se double d'une «menace» pour les années à venir, prévient-il, parlant de «désastre» quand les vignobles ont été anéantis par le poids des grêlons.

Début août, le service statistique du ministère de l'Agriculture (Agreste), qui intégrait déjà l'effet de l'humidité sur les cépages, misait sur une récolte de 45,8 millions d'hectolitres.  Mais c'était avant les orages du Bordelais notamment, où les professionnels estiment qu'un million d'hectolitres ont été perdus, soit 20% de la production habituelle.

À ce stade, 2013 enregistrerait l'une des plus petites récoltes en 40 ans, après celle historiquement faible de 2012 (41,4 M hl) selon  Jérôme Despey.

Après les vignobles de Vouvray, en Touraine, dévastés aux deux tiers par les premiers déluges de grêle mi-juin, la Bourgogne a été frappée à son tour en juillet puis la Gironde, le Bordelais et notamment l'Entre-deux-Mers et les Côtes du Rhône début août.

En Gironde, «15 000 hectares de récolte ont été perdus à 80%» a insisté le responsable qui attend les estimations des autres régions.

Par ailleurs, les vendanges qui commençaient ces dernières années autour voire avant le 15 août dans le sud ont tout juste débuté en Languedoc-Roussillon et ne démarreront ailleurs au mieux que la semaine prochaine. «Ça fait longtemps qu'on n'a pas vendangé aussi tard», note Jérôme Despey, lui-même exploitant dans l'Hérault qui compte s'y mettre la semaine prochaine.

Le casse-tête des assurances

«Je suis impatient, d'autant qu'on n'est pas à l'abri de nouvelles difficultés», notamment dans le sud où sévissent en arrière-saison les «épisodes cévenols» accompagnés de forte pluie, précise-t-il.

Pour la qualité, le taux d'alcool relevé dans les premiers prélèvements est «très faible» indique M. Despey: «le sucre n'est pas arrivé dans les grappes et on aura des teneurs (en alcool) beaucoup plus faibles que les années précédentes».

Mais à ce stade, c'est surtout l'absence ou la faible production disponible dans certains vignobles - comme l'Entre-Deux-Mers et le Vouvray notamment - qui inquiète la profession, car la clientèle risque de se détourner de territoires incapables de répondre à la demande pour aller se ravitailler ailleurs.

D'autant que l'Espagne, selon les estimations du ministère de l'Agriculture espagnole citées par FranceAgriMer, devrait récolter quelque 40 millions d'hectolitres contre 30 l'an passé et l'Italie, plus stable, 42 millions contre 40 millions en 2012.

Or les viticulteurs français qui ont essuyé les intempéries se trouvent pour la plupart totalement nus, faute d'assurance pour les indemniser: selon M. Despey, qui se dit «meurtri» par certaines situations, seuls 100 000 hectares sur les plus de 800 000 que compte le vignoble hexagonal sont couverts par une assurance, alors que l'État s'est désengagé ces dernières années portant le montant du fonds public d'indemnisation de 125 millions d'euros en 2011 à 71 millions cette année.

«Nous avons aujourd'hui des centaines de domaines dont la survie est menacée», assure le responsable qui dénonce «une offre inadaptée et couteuse» des assureurs pour les petits domaines.

«Les viticulteurs sont complètement démunis face aux risques, alors qu'on assiste à des phénomènes climatiques de plus en plus fréquents, de plus en plus violents et qui impactent des surfaces de plus en plus larges», insiste Jérôme Despey qui interpelle le ministère de l'Agriculture. «Il faut absolument réfléchir à un système d'assurance obligatoire» juge-t-il.