Le Champagne ou le Cognac sont de plus en plus convoités à l'international. Résultat: le prix des terres a flambé en 2012, l'hectare champenois se négociant même plus d'un million d'euros dans un marché du foncier rural pourtant morose.

Après deux années de reprise, les marchés du foncier rural ont rechuté l'an dernier avec des transactions en repli de 4% et des prix en baisse de 9%, selon une étude réalisée par Terres d'Europe-Scafr d'après les Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer).

La crise en Europe est la principale responsable, selon la Fédération nationale des Safer (FnSafer). Et les maisons secondaires à la campagne sont les premières à en pâtir avec un volume de transactions en baisse de 13% et des prix de vente en berne (-3,5% à 167 000 euros le bien en moyenne).

La forêt aussi a vu ses prix de vente reculer de 1,5%, en raison de la baisse des prix du bois (-8%), après une croissance insolente de près de 20% entre 2009 et 2011.

Le marché des terres agricoles lui s'est maintenu (+1,1% à 5420 euros l'hectare). Mais les écarts de prix se sont creusés entre les terres de grandes cultures (+ 3,2%, à 6560 euros l'hectare en moyenne) et les zones d'élevage, moins convoitées (+0,1%, à 4220 euros l'hectare).

«La demande mondiale en biomasse végétale, les cours élevés et les bonnes récoltes dans l'Hexagone ont pu alimenter la hausse des valeurs foncières», commente la FnSafer.

Qui peut s'installer à ces prix?

Mais c'est sur le marché des vignobles que les disparités sont les plus criantes avec des écarts de 1 à 92 selon les régions. Ainsi quand un hectare s'échange 11 800 euros dans le Languedoc Roussillon (-1,7% sur un an), il s'arrache 1,08 million en Champagne !

Les prix ont flambé en 2012 dans certains vignobles d'exception (+21,5% en Champagne, +10% dans le Cognac), dopés par la demande hors Europe de ces boissons emblématiques du luxe français.

La pression sur le foncier champenois devrait néanmoins se calmer en 2013 avec le tassement des ventes de Champagne en 2012.

Dans le bassin Bordeaux-Aquitaine, les prix ont progressé en moyenne de 3,3% mais là encore, certaines parcelles se démarquent: l'AOP (Appellation d'origine protégée) Pauillac a continué son envolée pour atteindre 2 millions l'hectare et l'AOP Pessac-Léognan a enregistré sa 4e année de hausse à 400 000 euros l'hectare en moyenne.

À ces prix, très clairement, aucun jeune ne peut prétendre s'installer.

Et pour les Jeunes Agriculteurs, «ces niveaux de transaction montrent bien que certains spéculent sur les terres et n'en font pas un outil de travail», a expliqué à l'AFP Thomas Diemer, responsable des questions foncières du syndicat.

Mais surtout, «on voit qu'il y a de plus en plus de transactions faites par des sociétés et non des exploitants».

«Lorsqu'il s'agit de faciliter les transmissions au sein d'une famille, on n'est pas contre mais on peut craindre des dérives lorsque des sociétés, qui ne sont pas exploitants, se portent acquéreuses», a ajouté Thomas Diemer.

D'où pour lui l'importance d'encadrer le marché, en «priorisant» la vente de terres aux futurs agriculteurs, ou de mettre en place des produits financiers qui permettent à des investisseurs de placer de l'argent tout en finançant des candidats à l'installation.

C'est ce que viennent de faire par exemple les éleveurs de moutons en s'associant à une société d'investissement pour monter le fonds Labeliance Agri 2013, qui espère lever 20 millions d'euros d'ici juillet pour financer des projets de création ou de modernisation d'exploitations agricoles.