Une libéralisation partielle de la vente d'alcool au Québec ne serait pas synonyme d'une chute des prix dans la province. C'est du moins l'avis de la Société des alcools du Québec (SAQ) qui affirme que les Québécois paient leurs bouteilles en moyenne 4$ de moins que les consommateurs de la seule province où le marché est libéralisé : l'Alberta.

Dans sa plus récente étude publiée la semaine dernière, le professeur Frédéric Laurin affirme que le prix des bouteilles d'alcool au Québec pourrait diminuer de 30% si la SAQ faisait face à la concurrence. L'économiste suggère une libération partielle de la vente d'alcool dans la province. Il propose que l'État permette l'ouverture de boutiques de vin indépendantes qu'il nomme « cavistes ».

Mais la SAQ ne croit pas à une telle diminution des prix.

« Si on regarde l'exemple canadien. Il y en a un seul où il y a un marché libéralisé en totalité. C'est en Alberta, explique la porte-parole du monopole d'État, Isabelle Merizzi. Les prix y sont supérieurs en moyenne à ceux que l'on retrouve au Québec, bien que le Québec soit en situation de monopole. »

La SAQ a compilé le prix des bouteilles recensées par la firme indépendante Integrated Marketing Solutions Inc. (IMC) dans une centaine de magasins en Alberta en 2010. Parmi les produits sélectionnés par la compagnie IMC, une soixantaine sont également en vente au Québec. Selon la comparaison effectuée par la SAQ, les Albertains paient en moyenne 4,14$ de plus que les Québécois, soit une différence de 17%.

« C'est un petit échantillonnage de produits, explique Isabelle Merizzi. Mais ces produits sont présents dans beaucoup de magasins en Alberta. On a enlevé la taxe de vente de notre calcul, puisque cette taxe n'existe pas en Alberta et aussi la taxe spécifique sur l'alcool. »

Le monopole d'État appuie ses propos par une seconde étude préparée à l'interne. Celle-ci compare les prix affichés dans ses succursales avec ceux en vigueur chez le second plus important détaillant d'alcool à Calgary, le Calgary Wine and Spirits. Une centaine de produits identiques sont recensés de part et d'autre. Et encore une fois, ce sont les Québécois qui économisent.

En prenant soin de soustraire la taxe de vente des prix de la SAQ et la taxe spécifique sur l'alcool, les bouteilles coûtent en moyenne près de 9% de moins au Québec qu'en Alberta.

« On ne peut que constater que le morcellement de l'offre et la compétition entre plus petits détaillants en Alberta ne semblent pas avoir eu l'effet escompté pour le consommateur, soit des prix encore plus compétitifs, ajoute Isabelle Merizzi. À cet effet, la libéralisation partielle ou complète ne doit pas être vue comme une panacée.»

Devant ces résultats, Frédéric Laurin reste convaincu qu'une libéralisation partielle de la vente d'alcool au Québec serait bénéfique. Il ajoute qu'il ne faut pas comparer la province à l'ensemble des marchés de vin en Amérique du Nord.

« On a un enthousiasme du vin qui est plus grand au Québec, dit-il. On a aussi une connaissance plus grande. Ça laisse croire qu'il y aurait beaucoup plus de concurrence et plus de boutiques, par exemple, qu'en Alberta. »

La SAQ prépare un comparatif avec la Colombie-Britannique. Le marché de l'alcool dans cette province est partiellement libéralisé. Il existe donc un monopole et plusieurs petites boutiques. Dans ses résultats préliminaires, la SAQ conclut que les bouteilles sont moins dispendieuses au Québec qu'en Colombie-Britannique. L'écart serait toutefois moins important.