La vinosphère aura les yeux rivés sur Beaune (Côte-d'Or) dimanche où 47 cuvées seront mises aux enchères pour la 154e vente des Hospices, qui attire toujours plus la clientèle asiatique, en particulier chinoise.

Des centaines de personnes se pressaient vendredi matin dans la cuverie pour une des traditionnelles dégustations précédant la vente. Parmi la foule, « Billy », un chef d'entreprise chinois de 31 ans, grand amateur de Bourgogne, prévoit d'acheter « neuf » pièces dimanche pour environ « 15 000 euros » (environ 21 200 $) chaque fût, contre « quatre » pièces en 2013.

L'une de ses motivations cette année? Sa fille. « Il y a une tradition en Chine: on prépare un fût de vin pour le futur mariage de son enfant », explique-t-il.

« En Chine, les vins de Bourgogne ne sont pas aussi connus que ceux de Bordeaux », ajoute le jeune businessman originaire de Shenzen, qui dit aimer la « pureté » des crus bourguignons. « Pour comprendre les vins de Bordeaux, il faut un ou deux ans, alors que les Bourgogne, qui sont plus difficiles à comprendre, il faut toute une vie ».

« Il existe un intérêt grandissant des Asiatiques pour le monde des vins car il y a beaucoup de passionnés qui veulent partager ce produit noble, qui véhicule une culture », souligne Pierre Beuchet de la maison de vins Champy.

Autrefois réservée aux négociants bourguignons, la vente des Hospices de Beaune s'est ouverte aux particuliers depuis l'arrivée, en 2005, de la maison d'enchères Christie's. « C'est une ''win-win situation'' », du gagnant-gagnant, estime M. Beuchet: « le particulier a l'avantage de pouvoir mettre son nom sur l'étiquette du vin qu'il achète, mais comme il n'a pas les moyens d'élever les vins, il se retourne vers les négociants pour l'élevage ».

534 pièces de 228 litres

Les enchères de Beaune constituent la plus grande vente de charité vinicole au monde. La recette en est reversée à l'institution hospitalière des Hospices, fondée au XVe siècle par Nicolas Rolin, chancelier du duc de Bourgogne, afin de financer la modernisation de l'hôpital de la ville et l'entretien du bâtiment historique de l'Hôtel-Dieu.

Ce sont 534 pièces (fûts de 228 litres) de 47 cuvées (33 de rouge et 14 de blanc) qui seront mises aux enchères dimanche, avec pour parrains l'ancien mannequin Adriana Karembeu et le présentateur télé Michel Drucker.

La « Cuvée des présidents » (tonneau de 228 litres) de Corton-Bressandes Grand cru sera vendue au profit de deux associations: « Toutes à l'École » qui finance la scolarisation de filles au Cambodge et la Fondation Imagine en faveur de la recherche sur les maladies génétiques.

En 2013, la vente avait rapporté la somme record de 6,3 millions d'euros avec une arrivée en force d'enchérisseurs chinois. La pièce de charité, un fût de 456 litres de Meursault-Genevrières 1er cru, avait été adjugée 131 000 euros (plus de 185 000 $) à une femme d'affaires de l'Empire du Milieu.

Pour M. Breuchet, « il faut savoir vendre cher », mais « le marché est très tendu en ce moment ». « On est à la limite, il ne faut pas faire la même erreur que Bordeaux. »

De son côté, le directeur adjoint de la Fédération des négociants-éleveurs de Bourgogne, Denis Duveau, remarque que « les enchères amplifient la dynamique de marché ». « Et pour le moment, le marché est à la hausse », souligne-t-il.

Peu de professionnels se risquaient à établir des pronostics sur le résultat de la vente de dimanche. « On a la chance d'avoir un beau millésime cette année avec notamment des vins blancs droits, taillés pour la garde », faisait valoir toutefois M. Duveau.