La décision d'Elon Musk de fermer les pages Facebook de Tesla et de SpaceX et celle de Sonos de ne plus annoncer sur le réseau social pendant une semaine n'ont pas d'impact au Québec. Les agences de marketing et de communications ne remarquent pas de désir de leurs clients-annonceurs de retirer leurs investissements en placement publicitaire sur le réseau de Mark Zuckerberg.

« Car le retour sur l'investissement est beaucoup trop grand », explique Philippe Boutin-Lizotte, gestionnaire de compte d'Adviso.

« Facebook est central aux campagnes des annonceurs, ajoute John Parlea, vice-président, média et CRM, de l'agence Havas Montréal. Ce n'est plus un à-côté, comme il y a quelques années. »

Il n'y a pas d'enjeu d'image de marque comme l'an dernier, lorsque Google a été mis en cause après que des annonceurs se sont retrouvés juxtaposés à du contenu haineux et extrémiste. 

« Dans le présent cas, l'annonceur devra surveiller la situation, mais sans renverser sa stratégie du jour au lendemain », conseille Leslie Molko, directrice, conseil et communications corporatives, de la firme de relations publiques Octane Stratégies.

« Pour l'instant, Facebook en soi n'est pas toxique pour l'annonceur, s'il ne fait que pousser du contenu. Le vrai risque sera s'il y a un mouvement de boycottage. » - Leslie Molko, directrice chez Octane Stratégies

« Ça reste alarmant pour Facebook, poursuit Jean-François Renaud, cofondateur d'Adviso. On notait déjà une lassitude inquiétante chez les moins de 25 ans. Mais l'acte de fermer son profil est marginal pour l'instant. Mark Zuckerberg est intelligent. Il a su garder sa parole dans le passé. Facebook est comme une banque, et changer de banque est compliqué. Où iras-tu parler à tes amis ? Il n'y a pas d'alternative, outre Instagram chez les jeunes... et ça appartient à Facebook ! »

Reste que les consommateurs risquent désormais d'être plus vigilants quant aux données qu'ils livrent sur Facebook, selon John Parlea. « Peut-être vont-ils bloquer certains accès et que ça limitera la capacité de faire du ciblage et d'avoir un bon impact », analyse-t-il.

« Les plateformes doivent faire des efforts pour faire plus attention avec nos données, mais le consommateur doit se responsabiliser, ajoute Jean-François Renaud. Si vous ne payez pas pour quelque chose, vous êtes le produit. Facebook a une business à faire rouler, et c'est le data. »

SITUATION QUI DÉPASSE L'IMAGINATION

L'utilisateur sait de plus en plus qu'il s'expose quand il se promène sur les réseaux sociaux et l'internet. Alors qu'est-ce qui est différent dans le cas de l'affaire Cambridge Analytica ? « Cette fois, on parle d'enjeux qui dépassent le commerce, répond Leslie Molko. En pub, on connaît l'enjeu de manipulation. Et on sait habituellement quel annonceur vend quoi. »

« Là, on s'énerve plus, car ça rentre dans la catégorie démocratie et influence du vote. » - Jean-François Renaud, cofondateur d'Adviso

On est loin de la pub qui tente de nous vendre une belle robe... « Facebook fait de l'argent sur les données qu'elle récolte, et ce n'est pas caché, explique John Parlea. Là, les gens se rendent compte que le réseau social a laissé une autre entreprise utiliser leurs données.

« Cela dit, on a plus confiance en un Facebook qu'en un Cambridge. Dans l'esprit des gens, c'est comme si Cambridge avait piraté Facebook pour avoir ses données. »