Les fausses nouvelles voyagent plus vite sur Twitter que les vraies, selon une nouvelle étude. Un espoir est toutefois permis: les mensonges se transmettent de façon différente des vérités, ce qui devrait permettre la création d'un logiciel de détection automatique des fausses nouvelles.

VITESSE

Les fausses nouvelles voyagent six fois plus vite en moyenne que la vérité, selon l'analyse de 126 000 nouvelles distribuées sur Twitter entre 2006 et 2017. « L'avantage des mensonges par rapport à la vérité sur Twitter est encore plus grand pour les nouvelles politiques que pour les désastres naturels, la science ou les attentats terroristes », explique Soroush Vosoughi, informaticien au prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT), qui est l'auteur principal de l'étude publiée vendredi dans la revue Science. « Le problème, c'est que les fausses nouvelles sont par définition souvent des nouveautés, des informations que les gens n'ont jamais vues, parce que ce sont des inventions. On pense souvent comme exemple de fausse nouvelle à l'histoire du lieu de naissance de Barack Obama, mais c'est l'exception qui confirme la règle. » La véracité des 126 000 nouvelles étudiées, qui avaient été vues par un total de trois millions de personnes sur Twitter, a été évaluée par six organismes indépendants de vérification (fack-checking). Cet avantage des fausses nouvelles se retrouve-t-il dans d'autres réseaux sociaux ? « Il faudrait le démontrer, mais je pense que oui, dit M. Vosoughi. Il n'y a aucune raison de penser que Twitter se comporte différemment sur ce point. »

DÉTECTION

La découverte la plus importante de Soroush Vosoughi est que les fausses nouvelles se propagent différemment. « Le mode de transmission des fausses nouvelles est linéaire, d'un utilisateur à un autre. Les nouvelles qui ont un bon fond de vérité sont plutôt transmises selon un rayonnement, à partir d'une source centrale. Chaque personne qui reçoit une vraie nouvelle la transmet ensuite à plusieurs personnes, et ainsi de suite. Ça veut dire qu'on pourrait faire un algorithme de détection des fausses nouvelles en se basant sur une transmission linéaire, ou plutôt en arborescence. C'est la prochaine étape de nos recherches. » Ici aussi, M. Vosoughi pense que ces conclusions s'appliquent aux autres réseaux sociaux.

ROBOTS

L'autre conclusion de Soroush Vosoughi, c'est que les robots envoyant des nouvelles aux usagers en fonction de leurs intérêts ne sont pas responsables de cette diffusion plus rapide des fausses nouvelles. « Les robots n'accélèrent pas la transmission des fausses nouvelles par rapport aux vraies nouvelles. Ça veut dire qu'il s'agit d'un phénomène créé par les humains, pas par les détenteurs des comptes des réseaux sociaux. »

MARATHON

Soroush Vosoughi a eu l'idée de cette étude après les attentats du marathon de Boston en 2013. « J'étais en train de faire mon doctorat au MIT. Un gardien de sécurité a été tué lors d'une fusillade avec les suspects. Pendant les jours qui ont suivi, j'ai été frappé de voir combien de fausses rumeurs circulaient sur les réseaux sociaux. Ça m'a convaincu qu'il fallait mieux comprendre le phénomène et surtout trouver une manière de le contrer. » Le Media Lab du MIT, où travaille M. Vosoughi, a l'un des meilleurs accès au monde à la base de données de Twitter. « La société collabore avec plusieurs groupes de recherche, mais nous avons un accès très rapide. »

EN CHIFFRES



260 000 

Nombre de retransmissions d'une « fausse nouvelle » pro-Trump durant les élections américaines de 2016

185 000 

Nombre de retransmissions d'une « fausse nouvelle » pro-Clinton durant les élections américaines de 2016

Source : Université Stanford