Les membres de la communauté gaie n'ont plus besoin de passer leurs soirées dans les bars du Village pour trouver un partenaire sexuel ou plus si affinités. Il suffit de se brancher sur l'application iPhone Grindr. Notre collaboratrice en fait la preuve.

D'aussi loin qu'il se souvienne, le Californien Joel Simkhai a toujours cherché un moyen de rencontrer des hommes dans son quartier, que ce soit à l'épicerie, au resto du coin ou simplement sur des sites de rencontres. Pourtant, ses efforts n'ont jamais porté leurs fruits. D'une part, parce que la gêne le freinait dans ses ardeurs. D'autre part, parce que les sites de rencontres ne lui permettaient pas de chercher des membres en fonction de leur quartier.

«Sur l'internet, on peut clavarder pendant des jours avec quelqu'un qui habite à l'autre bout de la ville et lui envoyer une tonne de textos pour planifier une rencontre, mais bien souvent, en fin de compte, ça n'aboutit nulle part. C'est tout le temps compliqué! explique-t-il. Je me suis dit que si on avait la possibilité de clavarder avec quelqu'un qui habite au coin de la rue et de lui donner rendez-vous une heure plus tard au café d'en bas pour voir si ça clique, ce serait plus simple et on perdrait moins de temps dans nos recherches.»

C'est en partant de ce principe que Simkhai a eu l'idée de créer Grindr: une application iPhone qui ressemble à Réseau Contact, mais avec un système GPS qui permet principalement d'entrer en communication avec des membres qui se trouvent à proximité.

Après six mois de travail avec des concepteurs danois, son projet a pris forme. Aujourd'hui, plus de 750 000 hommes dans 162 pays ont téléchargé l'application, dont 50% aux États-Unis et 3% au Canada.

Réseau Contact portatif

Il y a huit mois, Jean-Claude, serveur de profession, a découvert Grindr en naviguant sur l'App Store. Depuis, il a créé un profil et est devenu complètement accro: il est constamment branché. «Je sais que c'est naïf, mais je me dis que c'est peut-être un autre moyen de trouver l'amour, dit-il. J'y vais pour faire des rencontres, mais aussi par curiosité, parce que j'ai un côté voyeur et que je veux voir qui sont les gars inscrits dans le Village.»

En plus d'aider Jean-Claude dans sa quête de la perle rare, Grindr lui sert aussi lorsqu'il est en voyage. «C'est un excellent guide, dit-il. Si je vais en Gaspésie, par exemple, je vais pouvoir trouver des gais locaux, leur demander leurs recommandations et peut-être même aller prendre une bière avec eux dans un bar.»

Plusieurs hommes utilisent Grindr non pas pour trouver le prince charmant, mais pour avoir des relations sexuelles. C'est le cas de Patrick, qui a eu deux aventures depuis son inscription. «Grindr, c'est la version 2.0 du sauna, compare le jeune homme, qui étudie à la maîtrise. Grâce à l'iPhone, on peut avoir accès à des gars tout le temps! On peut être au dépanneur, avoir une conversation avec quelqu'un qui se trouve à moins d'un kilomètre et passer à l'acte avec lui plus tard si on est chanceux. Le sexe devient très accessible.»

Mieux vaut prévenir que guérir

Bien que le nombre d'utilisateurs croisse à vitesse grand V, Grindr est un phénomène relativement nouveau dans la communauté gaie montréalaise. L'organisme Séro-Zéro - qui fait la promotion de la santé sexuelle - s'interroge sur la possibilité que l'usage de cette application accroisse les risques de contracter une infection sexuellement transmissible. «Il n'y a pas encore d'étude à ce sujet, mais on suppose que le nombre de rencontres pourrait avoir une influence sur la prise de risque, indique son président, Robert Rousseau. Par exemple, si quelqu'un n'a pas planifié avoir une relation sexuelle et qu'il finit la soirée avec quelqu'un qui lui plaît, il se pourrait qu'il n'ait pas ce qu'il faut pour se protéger et qu'il prenne le risque de contracter une maladie transmise sexuellement.»

Il n'en demeure pas moins que Grindr peut s'avérer un excellent outil de communication et de réseautage pour certains homosexuels désireux de sortir de leur solitude. «Le coming out est souvent une expérience douloureuse pour un gai et peut pousser à l'isolement, remarque le père de Grindr, Joel Simkhai, qui travaille actuellement à une version pour hétéros de l'application. Pour quelqu'un qui habite dans le fin fond d'un village, par exemple, le fait de savoir qu'il n'est pas seul et qu'il y a des gais près de lui peut être une très grande source de réconfort!»