Après plus d'un an d'attente, Rogers lance aujourd'hui le très convoité iPhone, un appareil de la compagnie Apple qui combine téléphonie cellulaire, navigation Web et lecteur multimédia dans le creux de la main. Le hic, c'est que plusieurs Canadiens en possèdent déjà un.

Ils seraient quelques milliers - impossible de connaître leur nombre exact - à utiliser l'appareil au pays. Le Québécois Carl-Frédéric De Celles est l'un d'entre eux. Depuis plusieurs mois déjà, il consulte ses courriels, effectue ses appels et planifie ses rendez-vous avec un iPhone. Bien que le modèle qui sort aujourd'hui soit une version améliorée, Carl-Frédéric est très satisfait du sien. «C'est un outil très pratique et très convivial.»

Comment a-t-il fait pour mettre la main sur un appareil qui n'était pas en vente au Canada? «Je l'ai acheté à Montréal, pour 600 $», explique-t-il vaguement.

En réalité, son iPhone provient des États-Unis, où Apple a lancé le premier modèle au printemps 2007. L'appareil était conçu pour fonctionner exclusivement avec l'entreprise de télécommuni- cations américaine AT&T. Or, quelques semaines après sa sortie, l'iPhone a été piraté pour être utilisable avec d'autres réseaux de téléphonie cellulaire moins chers.

Ainsi a débuté le marché du «déverrouillage» d'iPhone. Des gens achètent le téléphone aux États-Unis, le bidouillent, puis le revendent dans les pays où il n'est pas en vente, dont le Canada. Une activité tout à fait légale.

La compagnie Citi Mobility, à Montréal, est l'une des plus grandes entreprises spécialisées dans ce type de services au Québec. Pour une trentaine de dollars, un client peut faire pirater un iPhone. «Nous en avons fait près d'un millier jusqu'à présent», affirme le propriétaire, Hugo Vilchez.

Les compagnies de téléphonies cellulaires sont bien au courant de l'industrie du piratage. «Les gens ont le droit de déverrouiller des iPhones», admet Marc Choma, porte-parole de l'Association canadienne des télécommunications sans-fil. Cependant, ces modifications peuvent entraîner le mauvais fonctionnement de l'appareil, prévient-il. En cas de bris, impossible de le faire réparer. «Toute modification du produit annule la garantie du manufacturier.»

Une question de temps

Le nouveau iPhone qui sort aujourd'hui simultanément sur les marchés américain et canadien devrait être beaucoup plus difficile à pirater. Hugo Vilchez ne s'en inquiète pas. «Ce ne sera qu'une question de temps, affirme-t-il. Je ne sais pas encore quelles modifications ont été faites. Je vais en recevoir un ou deux demain (aujourd'hui) pour les tester.»

Selon lui, l'arrivée officielle du iPhone au Canada ne diminuera pas la demande pour ses services. «Mes clients voyagent beaucoup. S'ils font déverrouiller leur iPhone, ce n'est pas seulement pour l'utiliser au Canada, mais partout dans le monde.»

Cet avis n'est pas partagé par tout le monde. «La demande pour les iPhones déverrouillés existait parce qu'il n'était pas au Canada. Maintenant que le iPhone est vendu au pays, peu de gens vont vouloir les déverrouiller», affirme un étudiant qui pirate des iPhones pour boucler ses fins de mois. Selon lui, la demande aurait pu persister si d'autres compagnies canadiennes avaient la technologie pour supporter le iPhone. «Les gens auraient pu choisir un fournisseur moins cher.» Or, Rogers est la seule a posséder un réseau compatible.

Malgré le piratage, Rogers estime que l'arrivée du iPhone au Canada sera un succès. «L'engouement pour cet appareil est un phénomène mondial et nous sommes sûrs que le Canada ne fera pas exception à cette règle», affirme la relationniste Marie-Ève Villeneuve. Selon elle, Rodgers ne supportera pas les appareils déverrouillés. «Si cette situation se présente, nous agirons contre», explique-t-elle sans donner plus de détails.

M. De Celles ne sait pas encore s'il conservera son iPhone piraté ou s'il achètera le nouveau modèle. «Au début, je me disais que oui. Le son et la vitesse vont être meilleurs et il y a le GPS intégré. Mais plus j'y pense, plus je me demande si j'en ai vraiment besoin.»