Nintendo lance vendredi au Japon et dans plusieurs autres pays sa dernière console, la Switch, un modèle de conception nouvelle qui vise à contribuer à redresser les ventes en chute libre de la maison centenaire.

La Switch arrive après l'échec de la Wii U.

«Je pense que la Switch est une des consoles les plus importantes de ces dernières décennies pour Nintendo», tranche d'entrée de jeu Serkan Toto, analyste du secteur pour Kantan Games.

«Les premiers éléments montrent que la demande est là, mais il est trop tôt pour dire si la Switch sera un succès ou pas, car le concept est nouveau», modèle de salon, mais qui peut en partie être emporté à l'extérieur pour continuer à jouer, poursuit-il. «Nintendo n'a pas d'autre choix, il faut que ça marche».

Le patron de la firme de Kyoto s'est voulu jusqu'à présent rassurant.

«Nous prévoyons de livrer 2 millions de Switch courant mars», a déclaré récemment Tatsumi Kimishima, précisant que les réservations étaient allées bon train et que le groupe était «en ordre de marche pour que l'approvisionnement s'effectue ensuite régulièrement».

Si les aficionados de la marque s'étaient enthousiasmés lors de la présentation de la Switch il y a quelques semaines, les analystes et investisseurs à la Bourse de Tokyo, eux, avaient fait la moue.

«Plus que l'intérêt ludique, les professionnels de la finance regardent surtout quel peut être l'impact en termes de ventes et profits, or cela est difficile à mesurer tant que Nintendo n'a pas dévoilé toute la stratégie entourant cette console, notamment les possibilités en lien avec les téléphones intelligents et le jeu en ligne», soulignait en janvier pour l'AFP Hirokazu Himamura, expert du jeu vidéo de la maison d'édition Kadokawa.

Et le même d'insister sur les possibilités inédites de jeu qu'offre la Switch grâce à ses manettes dotées d'une caméra infrarouge et autres nouveautés techniques.

Le jeu d'abord

Si l'on s'en tient à la théorie selon laquelle le succès d'une console dépend grandement des jeux disponibles dans les premiers temps, la Switch part mal armée, avec seulement huit titres garantis au départ au Japon.

«Plus de 100 émanant de 70 studios de développement sont en cours de création», a cependant affirmé le mois dernier M. Kimishima.

Fidèle à sa tradition, «du jeu d'abord», Nintendo n'a pas emprunté la même voie que Sony, qui a choisi le couplage du multimédia numérique en plus du divertissement pur, une façon aussi pour le géant de l'électronique d'en faire profiter tous ses métiers (jeu vidéo, musique, cinéma, TV) et de faire venir à lui des partenaires de premier plan comme Spotify pour son service de musique en continu (streaming). Sony a vendu plus de 53,4 millions de PlayStation 4 en un peu plus de trois ans, une performance qui montre que le choix était, pour lui du moins, judicieux.

Le côté hybride de la Switch, proposé au Japon à un prix qui pourrait être un peu dissuasif, est non sur le contenu, mais le mode de jeu: à la maison et ailleurs.

Du coup, les joueurs ont tendance à ne pas tant opposer Sony et Nintendo, mais à considérer que les deux sont complémentaires, si bien que l'achat d'une PS4 ne signifie pas nécessairement un client de moins pour la Switch.

Interrogé sur le risque de cannibalisation de sa gamme de consoles portables 3DS/2DS par la Switch, le patron de Nintendo s'est dit «convaincu qu'il s'agit là de marchés différents ayant chacun leur raison d'être», laissant entendre que la Switch n'allait pas mettre fin au développement de machines de poche.

Si le succès d'une console ne se mesure pas avec certitude le jour de son lancement, un bon départ serait bienvenu pour ce dernier mois de l'année budgétaire, compte tenu du fait que le chiffre d'affaires de Nintendo a été divisé par plus de quatre depuis le pic de 2008-2009.