Après une performance remarquée à l'E3 l'an dernier, Ubisoft a vu ses ventes progresser de 18% en 2012-2013. La Presse a pu rencontrer son PDG, Yves Guillemot, au moment où l'entreprise tente de profiter du passage à une nouvelle génération de consoles pour poursuivre sur cette lancée.

Ces dernières années, M. Guillemot s'est forgé l'image d'un PDG prêt à courir de grands risques pour permettre à son entreprise, présentement troisième éditrice en importance, de rejoindre celles qui la devancent, Activision et Electronic Arts.

«J'ai été étonné par le niveau de risque qu'est prête à tolérer Ubisoft», confie d'ailleurs David Polfeldt, directeur général de Massive, un studio suédois acquis par Ubisoft en 2008. Cette liberté a permis à Massive de créer The Division, dévoilé lundi, avec lequel Ubisoft espère attirer autant d'attention que Watch Dogs l'an dernier.

«On fait les jeux qui vont nous permettre d'être premiers un jour, explique simplement M. Guillemot. On va y parvenir s'ils ont le succès que l'on attend. Ça va dépendre de la façon dont on arrive à monter en puissance avec les nouvelles consoles.»

L'entreprise se prépare depuis longtemps à l'arrivée de ces consoles.

«Le dernier cycle a été très long, rappelle le PDG d'Ubisoft Montréal et Toronto, Yannis Mallat. Nous sommes habitués à des cycles d'environ cinq ans. Là, nous en sommes à huit.

«Nous n'avons pas attendu les fabricants de consoles pour commencer à tout repenser: nos processus, nos outils et notre mentalité. Le fait que Watch Dogs était l'un des deux seuls titres «jouables» au dévoilement de la PlayStation 4, en février, prouve l'état de notre préparation.»

Bonne nouvelle pour les coûts

Ces dernières années, plusieurs analystes se sont inquiétés des conséquences de la nouvelle génération de consoles sur les budgets de production des éditeurs.

Ces budgets n'exploseront pas, assure M. Guillemot. «Au cours des deux premières années, ils devraient rester équivalents. Nous allons même profiter du fait que les machines soient plus puissantes. Ça nécessitera moins d'efforts de compression. Après, il faudra investir davantage pour tirer profit de cette puissance.»

«Oui, ça coûtera plus cher, mais la bonne nouvelle, c'est que ce ne sera pas beaucoup plus cher. En tous cas, pas pour nous», ajoute M. Mallat.

Les outils développés par Ubisoft Montréal lui ont notamment permis de réduire de 50% les coûts de développement d'une ville virtuelle, affirme-t-il.

L'augmentation de performance dégagera aussi des économies, explique M. Guillemot. La résolution des images, personnages et décors produits pour les nouvelles consoles sera en effet suffisante pour qu'ils soient récupérés directement dans des séries télé ou au cinéma.

Il n'y a toutefois pas que la puissance qui évolue avec les nouvelles consoles. Les éditeurs doivent aussi tenir compte de nouvelles possibilités, entre autres celle d'utiliser des tablettes ou des téléphones intelligents comme accessoires.

Ubisoft y croit et ses superproductions Assassin's Creed IV: Black Flag, Watch Dogs et The Decision, entre autres, utiliseront cette capacité.

«Il va y avoir beaucoup d'argent d'investi là-dedans ainsi que sur les façons de rendre les jeux plus sociaux», juge M. Guillemot.

Pari raté

Par ailleurs, Ubisoft reconnaît que l'important pari qu'elle avait pris sur la Wii U, lancée l'automne dernier par Nintendo, n'a pas rapporté.

«Nous avons été déçus par les ventes de la Wii U jusqu'à maintenant», concède sans hésitation M. Guillemot, qui attribue une partie de cet échec au prix, demeuré relativement élevé.

L'investissement d'Ubisoft dans la Wii U «va baisser pas mal», explique-t-il. L'entreprise n'a plus de jeux exclusifs à cette console dans ses plans. Elle y livrera des versions de jeux aussi conçus pour les consoles rivales, plus puissantes.