Ubisoft lance aujourd'hui (mardi) son jeu vidéo Assassin's Creed 3, conçu en majorité dans son studio montréalais depuis trois ans.

La Presse a suivi au cours des derniers mois l'équipe de Montréalais derrière l'un des jeux vidéo les plus attendus de l'année, qui pourrait se vendre jusqu'à 10 millions d'exemplaires.

Suite et fin de notre dossier débuté samedi:

François Pelland et Alex Hutchinson forment un drôle de couple professionnel. Outre leur âge (36 ans) et leur passion du jeu vidéo, le duo de tête d'Assassin's Creed 3 (AC 3) a peu de points en commun.

Le premier est cartésien et réservé, le deuxième créatif et extroverti. Mais en jeu vidéo comme dans la vie, les contraires s'attirent. «C'est bon que nous soyons différents, dit le directeur créatif Alex Hutchinson. Je suis un peu plus fou et, heureusement, François est plus organisé.»

«Ils forment le duo idéal, car on ne veut pas avoir deux coqs dans le même poulailler», dit Alain Tascan, leur ancien patron chez Electronic Arts à Montréal, qui a fondé depuis le studio indépendant de jeux mobiles SAVA Transmédia.

Un drôle de «couple»

Un drôle de couple, donc, mais un couple qui se connaît bien: François Pelland et Alex Hutchinson ont tous deux travaillé à la direction chez Electronics Arts, à Montréal, sur le jeu Army of Two: The 40th Day.

Les néophytes en jeu vidéo peuvent difficilement comprendre l'importance de la relation professionnelle entre un producteur délégué et un directeur créatif.

Pour le meilleur et pour le pire, un jeu vidéo est un projet à direction bicéphale: le producteur délégué est responsable des aspects techniques, de la planification et de la production, tandis que le directeur créatif s'occupe de l'histoire et de la trame narrative, en plus d'être l'interlocuteur principal pour les médias spécialisés en jeux vidéo.

Au cours des derniers mois, le directeur créatif Alex Hutchinson a ainsi passé la moitié de son temps à faire des entrevues dans le monde. Fils d'un rédacteur de discours pour un premier ministre australien, il a des opinions arrêtées et n'a pas la langue dans sa poche.

Une excellente combinaison pour vendre un jeu vidéo, mais aussi pour attiser la controverse. Comme en août dernier, où l'Australien de 36 ans a dit que les journalistes de jeu vidéo faisaient du «racisme subtil» en favorisant les jeux japonais.

«Vous essayez d'expliquer un argument complexe, mais il est réduit à une phrase et...» dit-il, avant d'être interrompu par la responsable du marketing d'AC 3 quand La Presse Affaires voudra revenir sur le sujet. Il lui sourit. Ce n'est sans doute pas la première fois qu'on le rappelle à l'ordre.

Plus cartésien, plus réservé, François Pelland dirige son équipe comme il s'entraîne à la course à pied. «Tout est une course pour lui, dit Philippe Bergeron, directeur des missions de AC 3. On a tendance à être créatif et à fabuler, lui nous ramène sur terre.»

François Pelland est le premier à l'admettre: il a raffiné ses techniques de gestion au fil des projets. Ce qui est normal en jeu vidéo, un milieu où des gestionnaires au début de la trentaine sont responsables de centaines d'employés et de dizaines de millions de dollars.

L'esprit d'équipe, selon Phyz

Arborant la barbe longue, vêtu d'un simple t-shirt même si on se trouve toujours au mois d'avril, il arrive l'air détaché à la réunion hebdomadaire du lundi matin, un café à la main.

Mais ne vous fiez pas à votre première impression de Philippe Bergeron, rebaptisé Phyz à l'intérieur des murs d'Ubisoft Montréal.

«Comme pilier d'une équipe, on ne trouvera pas plus fiable que Phyz», dit le producteur délégué François Pelland à propos de son directeur du service des missions, un poste névralgique dans l'équipe d'Assassin's Creed. Engagé comme testeur chez Ubisoft, il a gravi les échelons et a travaillé sur quatre des cinq jeux de la série Assassin's Creed.

Rares sont les employés qui ont été aussi impliqués dans la franchise la plus célèbre du studio. Au fil des jeux, le gestionnaire de 35 ans a établi une règle d'or pour juger de la solidité d'une équipe de production.

«Une équipe qui boit de l'alcool ensemble reste ensemble, dit-il. Quand on me parle de problèmes dans les autres équipes ou les autres studios, je demande toujours: allez-vous prendre une bière à l'extérieur du bureau? Ils me répondent non, et je dis que c'est justement ça, leur problème.»

Le réveillon d'Andréanne

Andréanne Meunier n'aura pas de réveillon de Noël mémorable cette année. Le 25 décembre au matin, elle sera plutôt à son bureau chez Ubisoft, dans le Mile End.

Directrice du volet en ligne d'Assassin's Creed 3 (c'est l'une des rares directrices de service dans l'équipe majoritairement masculine d'AC 3), elle doit s'assurer que les serveurs fonctionnent comme prévu quand les centaines de milliers d'amateurs d'AC 3 déballeront leur cadeau.

S'ils veulent tous l'essayer immédiatement, il y a des risques d'engorgement sur les serveurs.

«On veut que les gens aient une belle expérience quand ils déballent leur cadeau», dit la gestionnaire de 35 ans. Surtout qu'AC 3 a une nouveauté: du jeu en ligne en solo.

«On peut savoir ce que nos amis font pendant qu'on joue seul. L'idée, c'est d'ajouter des comparatifs pour que le joueur ne se sente pas seul», dit celle qui a étudié le piano avant d'étudier en génie informatique à l'École polytechnique.