À l'image d'autres secteurs comme la musique, des développeurs de jeux vidéo font désormais appel aux internautes pour les aider à boucler le financement de leurs projets, une initiative également prise par des studios réputés désireux de gagner en liberté.

Le nombre d'acteurs sur ce créneau va croissant: à côté du mastodonte américain Kickstarter, d'autres sites ont récemment vu le jour comme le français Gamesplanet Lab.

Le principe est à chaque fois le même. Un studio présente son projet et fixe un objectif d'argent à collecter dans un temps donné. Les contributeurs, eux, reçoivent des gratifications en fonction de la somme investie.

«Aujourd'hui, précommander un jeu donne accès souvent à un bonus gadget comme un objet dans le jeu. Notre idée est de permettre un accès au jeu en lui-même bien moins cher parce qu'on a soutenu sa réalisation en amont», explique à l'AFP Pierre Forest, co-fondateur de Gamesplanet Lab.

Son site a vu le jour au cours de l'été mais le premier projet proposé au public, un titre en vue subjective conçu par le studio 3AM Games, a atteint sans encombre les 100 000 euros de fonds levés.

Un succès qui reste toutefois loin des sommets atteints par Kickstarter, lancé en 2009 et qui couvre des secteurs allant du jeu vidéo à la musique en passant par le théâtre.

Sa partie dédiée au jeu vidéo a déjà hébergé des projets qui ont largement dépassé le million de dollars collectés et qui ont la particularité d'émaner de développeurs déjà bien connus.

Double Fine Productions, qui a déjà travaillé pour des éditeurs renommés comme Electronic Arts, n'a par exemple eu besoin que de huit heures pour atteindre le seuil espéré des 400 000$, alors que l'opération était censée s'étaler sur plus d'un mois. Au total, le studio a récolté 3,3 millions de dollars grâce à quelque 87.000 internautes.

Mieux que le cinéma

Selon une étude publiée cette semaine par Kickstarter sur son blog officiel, le jeu vidéo est la catégorie qui a le plus profité du financement participatif en 2012, avec 50 millions de dollars collectés, devant le cinéma (42 millions).

Sur l'ensemble de 2011, à peine 3,6 millions de dollars avait été versés aux créateurs de jeux.

La célébrité ne garantit pas néanmoins le succès: les Espagnols de Pendulo, créateur de la série «Runaway» sur PC, ont ainsi échoué dans leur quête de 300 000 euros, ne réussissant qu'à amasser 16% de cette somme.

Pour ces studios qui ont déjà connu le succès, faire appel aux internautes, c'est avant tout s'offrir une liberté dont ils ne jouissent pas toujours lorsqu'ils signent un contrat avec un éditeur traditionnel.

«Après les premiers jeux Broken Sword en 2D, nous étions passés à la 3D pour coller à l'air du temps afin de trouver un éditeur pour nous soutenir. Cette contrainte, nous y échappons désormais grâce au financement participatif», résume à l'AFP Charles Cecil, co-fondateur de l'équipe Revolution Software.

Le projet qu'il a soumis, un cinquième épisode de sa série «Broken Sword» (Les chevaliers de Baphomet en France), n'a eu aucune difficulté à atteindre le barre fixée à 400 000$ et dépassait même le demi-million jeudi soir à huit jours de la fin de l'appel aux contributions.

Interrogé sur la difficulté à anticiper le développement d'un jeu sans savoir quel sera son coût final, M. Cecil relève qu'il faut en effet s'adapter à cette donnée mais qu'elle influe finalement assez peu sur les choix opérés.

«Nous réalisons la première moitié du jeu pendant que les internautes peuvent nous financer. En fonction de la somme récoltée, c'est la seconde moitié que nous ajustons pour respecter le budget», souligne-t-il.