Le groupe japonais de jeux vidéo Nintendo a été contraint jeudi de raboter ses mirifiques prévisions de bénéfices pour l'année en cours, à cause de la brusque hausse du yen qui empiète sur ses marges, mais, crise ou pas, ses jeux et consoles se vendent de mieux en mieux.

Nintendo a ramené son estimation de profit net annuel à 345 milliards de yens (4,2 G$ CA), alors qu'il espérait auparavant le voir atteindre 410 milliards.

Ce nouveau calcul résulte de la prise en compte de taux de change yen/dollar et yen/euro moins favorables, compte-tenu des fortes fluctuations récentes que nul n'avait anticipées.

Même en défalquant ces milliards de yens, Nintendo n'est pas au bord du gouffre, tant s'en faut, puisque les nouveaux gains attendus seront encore d'un tiers supérieurs à ceux encaissés l'an passé.

Ces profits nets représenteront en outre plus du double de ceux du géant de l'électronique nippon Sony qui, plus éclectique, affiche pourtant un chiffre d'affaires quatre fois et demie plus gros.

Bien que l'économie mondiale aille mal, Nintendo n'est en réalité pas touché par la morosité ambiante due aux répercussions de la crise financière, mais uniquement par les variations brutales des cours des monnaies.

«Nos affaires vont bien en soi et nous nous attendons à une augmentation des ventes en volume», a assuré le porte-parole de Nintendo Ken Toyoda, selon qui les difficultés «viennent uniquement des changes».

Contrairement à d'autres groupes japonais plus diversifiés qui constatent que les clients mettent moins facilement la main à la poche pour s'offrir certains produits high-tech coûteux (larges téléviseurs à écran plat par exemple), Nintendo semble au contraire profiter de l'envie des consommateurs de se faire plaisir et de se distraire en famille à un prix jugé raisonnable.

Que les marges sur chaque console et jeu vendus à l'étranger soient soudainement grignotées par le yen glouton ne change rien au fait que le groupe continue de fabriquer des Wii, des DS et des boîtes de cartouches ou disques à tour de bras.

De fait, après un début d'année en fanfare, et alors que le marasme économique est avéré, Nintendo s'attend à vendre plus de consoles et jeux qu'il ne le pensait à la fin du premier trimestre.

Sur l'ensemble de l'année budgétaire (avril dernier à mars prochain), il compte écouler 30,5 millions de machines de poche à double-écran DS ainsi que 27,5 millions de consoles de salon Wii.

A mi-parcours, il a déjà vendu près de 14 millions de DS, portant le total à 84 millions depuis la naissance de cette famille de consoles fin 2004.

En six mois, plus de 10 millions de Wii ont également rejoint autant de foyers dans le monde, ce qui hisse le total à 34,5 millions depuis leur lancement fin 2006.

Ces machines portables et fixes sont toujours prisées car, selon Nintendo, elles sont simples d'emploi, accessibles et accompagnées d'une vaste logithèque pour tous les publics.

Pikachu et sa clique de Pokemon ou l'indéboulonnable Mario y côtoient des professeurs de mathématiques et de langues étrangères ou des conseillers pour la santé virtuels. Gamins, père, mère ou grands-parents, tout le monde est censé y trouver son bonheur.

«Une Wii par famille, une DS par individu», répète à l'envi le patron de Nintendo, Satoru Iwata, lorsqu'il affiche ses ambitions ultimes.

Et le même de dégainer de nouvelles armes chaque fois que la demande semble marquer un peu le pas, comme c'est le cas actuellement sur la DS au Japon.

Nintendo lancera ainsi samedi dans l'Archipel une nouvelle mouture de cette console de poche, dotée d'écrans plus larges, de deux modules caméras et de fonctions sonores plus performantes, autant de fioritures inédites pour mieux affronter la rivale combative PSP de Sony, stimuler les développeurs pour créer des divertissements inédits, amuser les petits et les grands et remplir le tiroir-caisse. Le yen, lui, n'aura qu'à bien se tenir.