Derrière les succès d'Ubisoft et de Gameloft, devenus des références dans les jeux vidéo, ou encore derrière l'eCafé, un mini-PC qui vient d'être lancé sur le marché, se cachent cinq frères bretons, les Guillemot, entrepreneurs dans l'âme.

L'aventure a commencé en 1984, sous l'impulsion de Michel: «j'ai reconverti le négoce de produits agricoles de nos parents dans l'informatique, en particulier dans la distribution de jeux vidéo», raconte-t-il. «Nous avons gardé les salariés et tout le monde a changé de métier».

La société, baptisée Guillemot Corporation, fabrique désormais des matériels pour PC et des accessoires de jeux. Mais elle «est restée à l'endroit où on l'a créée, à la fois à Carentoir, dans le Morbihan, et à Rennes maintenant», précise Michel.

C'est l'aîné, Claude, qui chapeaute aujourd'hui cette entreprise de 150 salariés. Souvent dans l'ombre d'Ubisoft, elle a récemment fait parler d'elle en se lançant sur le créneau en vogue des ordinateurs portables à bas prix.

L'eCafé, proposé à 299 euros, se veut «simple d'utilisation» et s'adresse notamment à «ceux qui ne viennent pas de l'univers informatique», explique Claude.

Les discrets frères Guillemot aiment les défis. «Nos parents étaient entrepreneurs, leurs parents aussi, nous avons toujours baigné dans cet environnement-là et nous avons tous travaillé dans la société de nos parents un mois chaque été», relate Yves, PDG d'Ubisoft.

Le baccalauréat en poche, les cinq s'orientent naturellement vers des études de commerce. Fort du succès de sa première expérience, Michel appelle ses frères pour passer à l'étape suivante: la création de jeux vidéo. Ensemble, ils donnent ainsi naissance à Ubisoft en 1986.

Un petit poucet devenu numéro trois mondial, avec 4.350 salariés et un chiffre d'affaires proche du milliard d'euros.

Yves Guillemot, aux commandes de l'éditeur depuis 1988, se souvient des débuts artisanaux du groupe: les créateurs «étaient souvent des jeunes, âgés de 17 ans, qui n'étaient pas habitués au rythme de l'entreprise» et restaient parfois injoignables pendant plusieurs jours. Puis «nous avons loué un château en Bretagne où nous les avons regroupés».

Finalement Ubisoft monte en 1992 une vraie structure interne, à l'origine de son premier succès mondial trois ans plus tard, «Rayman», vendu à 22 millions d'exemplaires.

Introduction en Bourse dans la foulée, ouverture de nombreux studios, notamment à Montréal... «en 2000, Ubisoft est bien lancé», rapporte Michel qui part alors créer Gameloft, spécialisé dans les jeux vidéo pour mobiles.

Après des débuts difficiles, la société décolle et côtoie bientôt les sommets du classement mondial: «de 100 personnes début 2003, nous sommes passés à 4.000, dans le même temps le chiffre d'affaires est passé de quasiment zéro à plus de 100 millions», souligne-t-il.

Gérard s'envole lui pour New York où il fonde Longtail Studios en 2003: «il invente les jeux vidéo du futur», décrit son frère, tandis que Christian, le petit dernier, fonde AMA (applications ludiques pour mobiles) à Londres.

Pourtant, les cinq frères Guillemot, âgés de 42 à 52 ans, président toujours ensemble aux destinées de leurs pépites et se réunissent «deux fois par mois» en moyenne.

Avec un principe de base pour éviter les querelles et préserver la «motivation» de chacun: «quel que soit le poste occupé, nous avons les mêmes rémunérations et les mêmes parts dans chaque entreprise, ce qui fait qu'aujourd'hui nous sommes encore actionnaires à parts égales des différentes entreprises», conclut Michel.